Mâcher

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(Croquer la vie à pleines dents)

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Respirer, Boire, Manger, Bouger. Voilà bien les fonctions essentielles pour tous les organismes animaux, dont nous faisons partie. On y pense quelquefois, on oublie souvent. Heureusement ! Cette évidence, cette insouciance, voilà bien le privilège de la bonne santé. Et rien de tel qu’un épisode de défaillance fonctionnelle pour en retrouver la conscience.

Comme tout le monde j’avais connu des petits soucis dentaires, ces périodes où il nous est interdit de mâcher le temps qu‘un plombage durcisse ou qu’une couronne se stabilise. Avec l’âge ça ne s’arrange pas.

Mais dernièrement l’affaire est devenue plus sérieuse. Plus aucune dent ne pouvait être sauvée. Il fallait tout extraire et prévoir des prothèses, avec des implants pour les stabiliser.

Le dentiste, mon entourage, tout me poussait à prendre la décision.

Ce n’est qu’un mauvais moment à passer !

Je ne m’étendrais pas sur l’opération d’extraction elle-même. L’anesthésie a fait son œuvre, j’entendais chaque dent tomber sur le plateau du dentiste. C’est plus tard, au réveil des nerfs endormis qu’on déguste. S’ouvre alors une période à la durée indéfinie où on cherche le salut auprès des médicaments anti-douleurs. C’est un calvaire mais on se dit que demain ça ira mieux. Je pense que, si les dentistes disaient la vérité, on n’accepterait jamais de se faire arracher les dents. Ne dit-on pas « menteur comme un arracheur de dents ? »

Ça va bien se passer !

En théorie on peut installer les prothèses provisoires, en pratique la gencive est trop sensible pour supporter quoi que ce soit. Me voici amené pour un bout de temps dans la situation des « sans dent » moqué, parait-il, avec mépris par le président Hollande. Alors il faut adapter son régime alimentaire et retrouver la gastronomie des premiers mois de notre vie. Et d’abord faire des courses adaptées.  Et c’est là dans les rayons des supermarchés que je découvre l’univers du mou.

Petit déjeuner :

C’est au rayon petit déjeuner que je vais trouver l’offre la plus abondante. Classiques, les diverses brioches, gâches vendéennes et autres pandorro me promettent le fondant adapté à mon état. Ils tiennent toujours la vedette sur les rayons.

 Mais ce qui me sidère c’est l’explosion des pains de mie : blancs, complets, avec ou sans croûte, grands formats pour tartine ou sandwich, ou petits destinés aux toasts. Mais tous partagent la même consistance, celle qui avait fait la réputation des « sandwichs SNCF ». Aucun cependant n’annoncent la mollesse, ils ne sont pas mous, ils sont tendres, moelleux mais aussi « puissants, ils se proclament «sans huile de palme » mais n’affichent pas la matière grasse indispensable à leur souplesse.

Les amuse-gueules ne sont pas en reste : les bouchées au maïs soufflé au goût de fromage qui fondent dans la bouche sont toutes présentées comme « croustillantes », on se demande où on peut trouver la croûte annoncée.

Question dessert, les contrastes se renforcent : les « croquants » du midi ( Provence, Corse) annoncent la couleur. Sur leurs amandes, leurs noisettes on peut vraiment se casser des dents fragiles. A l’autre bout, les fondants, coulant au chocolat puis les desserts lactés qui s’échelonnent entre liquide (à boire) et onctueux (à la cuillère).

Mais que choisir en plat principal ? Il y a des spécialités qui nous évitent les petits pots pour bébés et qui sont amies des édentés : Les quenelles, les purées de légumes, l’aligot, la brandade de morue, le boudin, les terrines de poissons…

Et puis il y a ce qu’on peut confectionner à la maison à partir de légumes cuits à la vapeur et passés soit au mixeur plongeur (ça donne des soupes, des potages), soit au blender (ça nous donne des mousses fines et délicates).

Il y a donc toute une gastronomie possible qui nous permet de survivre un temps sans mâcher. On peut tout à fait satisfaire nos besoins alimentaires.

Mais au fil des jours, on se rend compte que l’appétit s’amenuise, que l’envie de passer à table se réduit.

Vient le jour où on va retrouver le mordant des prothèses. Pas encore de quoi croquer une pomme entière, comme on le voit dans les publicités pour les colles à dentier, juste de quoi mâcher, ça change tout. On redécouvre le désir, le plaisir de manger.

Alors, conclusion : prenons soin de nos dents (d’origine quand elles tiennent le coup) ou de nos prothèses en veillant à ce qu’elles soient bien adaptées par un professionnel compétent et attentionné.

Prochaine étape : des implants pour arrimer les dentiers. Encore des périodes délicates et…  un trou dans mon budget !

Retour du parlementarisme ou quatrième tour ?

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Tout le monde l’a dit : avec ces élections législatives du 12 et 19 juin, le parlement se retrouverait au centre du jeu politique. Fini ce régime hyperprésidentiel créé par la Vème république et poussé jusqu’à la caricature par Emmanuel Macron, l’heure est maintenant à l’initiative parlementaire et à des majorités directement issues des différents courants de l’assemblée élue. Ce sont les électeurs qui auraient choisi le principe d’une assemblée sans majorité, comme si la proportionnelle était enfin reconnue.

 Mais est-ce que ça va vraiment marcher ?

Du coté de l’Elysée, pas vraiment préparé à cette perspective, la surprise a été mauvaise.

Et Macron a continué à faire du Macron : « le 26 avril j’ai été élu président sur un projet clair ». De quoi faire rire (jaune) tous ceux qui, comme moi, ont voté Macron au 2ème tour juste pour s’opposer à Le Pen. Alors après avoir cité – pour la forme – la possibilité d’un gouvernement d’Union Nationale, puis d’une hypothétique coalition dont personne ne veut, il s’est fixé sur la perspective de compromis au cas par cas.  

  Mais à ses conditions, c’est-à-dire sur son programme et avec interdiction d’augmenter les impôts ou la dette. Bref rien ne change, prééminence du Président même s’il n’a plus la majorité absolue au parlement. On se demande comment il va s’y prendre – ou comment sa première ministre qu’il n’a pas citée va s’y prendre- pour faire passer ses réformes.

Tout le monde regarde du côté de la droite LR au Palais Bourbon (qui a évité le naufrage et sauvé les meubles). On sait que le programme de Macron s’était beaucoup rapproché de celui de Pécresse qui criait même au plagiat. Et un Jean-François Coppé et et un Gaël Perdriau plaident pour un rapprochement. Mais la plupart des leaders des républicains savent qu’ils n’ont rien à gagner à soutenir Macron. Pas question de ralliement ou de coalition.

Tout le monde s’interroge sur la position du RN. Marine Le Pen savoure la bonne performance de son camp et revendique sa place de première opposante au président. Mais … Elle pense à 2027 et au brevet de respectabilité qu’elle pourrait acquérir grâce à une attitude coopérative à l’assemblée. Quelques échanges de services avec la macronie, pour désigner les vice-présidences et la présidence de l’assemblée, par exemple.

Du côté de la NUPES, chaque composante, à part le PCF, a gagné à la démarche unitaire. Mais le succès a ses limites.

Avec 133 sièges elle a de quoi peser en tant qu’opposition mais pas de quoi renverser le gouvernement par une motion de censure, encore moins de quoi porter Mélenchon au poste de premier ministre. Quel sera son positionnement dans la vie parlementaire ?     

Lorsqu’on parle de stratégie il faut regarder du côté de JL Mélenchon. Certes on ne peut résumer la NUPES à la France Insoumise, certes on ne peut résumer la FI à son leader, mais on ne peut que constater le poids considérable de son influence, malgré sa décision (qu’il regrette sans doute maintenant) de ne pas briguer de mandat.   

Et il faut suivre sur son blog ses dernières analyses. Pour lui Macron est condamné à quémander l’abstention de LR et du RN. Ses jours sont comptés et la dissolution n’est pas loin. D’où son insistance à réclamer un vote de confiance à la première ministre lors de sa déclaration de politique générale, dans l’idée de faire tomber le plus tôt possible le gouvernement. Son horizon ? « Le quatrième tour est déjà commencé ».

A le suivre, le seul objectif de la gauche est de tout faire pour bloquer toute avancée à l’assemblée qui pourrait apparaître comme favorable à Macron  et préparer de nouvelles élections, avec la même certitude : se retrouver premier ministre.

Cette obsession électorale, cette foi inébranlable dans son destin du Lider Maximo peut-elle tenir lieu de boussole pour la NUPES ? Les forces qu’elle a rassemblées peuvent-elles se résigner à suivre Mélenchon dans cette impasse ? La gauche sortirait-elle renforcée de nouvelles élections ?

Finalement ce grand retour annoncé du parlementarisme risque de faire long feu. Il ne faut pas se faire d’illusion. On n’est pas en Allemagne, ni dans les pays scandinaves. Personne, dans les travées de l’assemblée et à l’Elysée, n’a de volonté sincère de faire vivre des compromis dans l’intérêt général.

Charolais : entre canaux et pâtures

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Le week-end de Pâques s’annonçait magnifique : soleil, ciel bleu, douceur de l’air printanier. L’idée c’était de prendre le vert pas loin de chez nous, avec des circuits en vélo. A la différence des vrais amateurs de cyclo qui apprécient la pente et l’effort, ce qu’il nous faut, à nous, ce sont les véloroutes paresseuses, le long des canaux ou sur l’emplacement des anciennes voies de chemin de fer. Pari réussi, même si une petite grippe m’a empêché d’accompagner Danièle dans ses sorties en vélo et ses longues promenades avec Snoopy.
De la verdure, beaucoup de vaches dans les prés, des canaux, une ligne de chemin de fer (Givors- Paray le Monial), nous voici dans le Brionnais-Charolais.

Quatre jours à se repaître d’herbe verte en regardant brouter les vaches blanches, à observer notre chien retrouver dans son pays natal ses instincts de berger de troupeau (avec plus ou moins de succès), quatre jours à admirer les viaducs et canaux, tel a été notre programme d’un week-end pascal bien paisible et ensoleillé.

Danièle voulait retrouver un viaduc qui l’obsédait depuis que nous l’avions raté lors de notre dernière visite, un viaduc particulièrement imposant entre deux rives, entre deux tunnels, sur une ligne qui ne manquait pourtant pas de prodiges de construction. Il s’agit du viaduc de Mussy-sous-Dun

Mais bien avant le chemin de fer, c’est la voie d’eau qui a assuré le transport dans cette région centrale de la France, jusqu’à la Loire atlantique mais aussi vers la capitale. Et nous apprécions particulièrement ces paysages de canaux, de darses, de ports, de pont-canaux (ci-dessous à Digoin), d’écluses, de ponts, de chemins de halage avec leurs rideaux d’arbres.

Le canal du centre ( le plus ancien , inauguré en 1793) a permis de relier la Saône à la Loire, potentiellement Marseille à Nantes. Il traverses une région agricole bien connue du fait de ses vaches blanches : le Charolais.

Et puis, il y a la Loire toujours sauvage. Bordée de quais aux belles maisons bourgeoises dans les lieux urbanisés, laissée à ses divagations et aux oiseaux ailleurs avec parfois la mention d’un bac ou d’une pêcherie qui n’existe plus.

Dans ses vertes étendues, entre les canaux, les étangs et les rivières paresseuses, ne cherchez pas des parcelles de maïs au feuillage allongé, de colza au jaune intense au moment de la floraison, de tournesol avec ses capitules toutes orientées vers le soleil. Il n’y a que de l’herbe, de l’herbe, de l’herbe ! Je ne connais pas de terroir agricole aussi homogène. Avec ses grands troupeaux paisibles de vaches blanches, accompagnées de leurs veaux. La pâture est leur cadre de vie, à l’année, qu’il vente ou qu’il neige, l’hiver on complète avec du foin dans les parcelles, on ne les rentre qu’autour du vêlage. On est loin de l’élevage intensif. Pas loin du bio, même si beaucoup de parcelles reçoivent un peu d’engrais chimique.

Mais comme dans toutes les zones d’élevage, les prix stagnent, les marges sont faibles, le malaise est là, poussant quelques éleveurs à mettre la clé sous la porte, dès le moment où leur situation est plus fragile pour une raison ou une autre : endettement, investissements mal calibrés, accidents de troupeaux, évènements familiaux …

Mardi, nous reprenons la route du retour, après une nuit paisible auprès du Canal à Artaix, face à un ancien lavoir entouré de floraisons généreuses.

Mélenchon, premier ministre à défaut de président ?

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Tout le monde est d’accord, il a fait une campagne efficace, gagnant 5à 6 % dans les derniers jours, prenant à la fois sur les autres listes de gauche (vote utile) et sur les abstentionnistes. Mais il lui a manqué moins de 500 000 voix pour figurer au 2ème tour. Mélenchon aurait pu se lamenter comme en 2017, accuser les autres mais le leader a une meilleure idée : Inventer un 3ème tour de la présidentielle avec les législatives du 12 et 19 juin.

L’idée c’est qu’on pourrait avoir une majorité d’opposition à l’assemblée qui forcerait le (ou la) président (e) à nommer un premier ministre de gauche (Mélenchon par exemple). Ça s’appelle la cohabitation, comme Balladur en 1986, comme Chirac en 1993 sous la présidence Mitterrand ou Jospin en 1997 sous la présidence Chirac.

Première remarque : Ces cohabitations ont été permises par une déconnexion entre la présidentielle (qui intervenait alors au bout de 7 ans) et les législatives (au bout de 5 ans). Depuis la réforme du 2 octobre 2000, les législatives et la présidentielle ont la même fréquence (5 ans) et les législatives sont organisées dans la foulée de la présidentielle. Elles ont donnée systématiquement un avantage – et un avantage important – au camp du vainqueur de la présidentielle. On pourrait espérer un miracle mais l’histoire récente n’est pas favorable à une hypothèse de victoire de l’opposition.

Deuxième remarque : Les élections législatives se font localement sur des noms dans 560 circonscriptions qui sont autant de terrains différents. En 2017, les listes Macron, avec le renfort du Modem avaient raflé la mise avec 350 élus, le Parti Socialise, majoritaire sur la période 2012-2017, n’obtenait que 30 sièges. La France insoumise comptait 17 élus, le Parti communiste français 11 et le Front national 8. Les négociations à gauche avaient été compliquées, les insoumis ne s’engageant vraiment qu’avec le PCF (qui faisaient candidature présidentielle commune avec Mélechon). Le PS avait offert des possibilités aux écologistes d’EELV, sans succès, vu que beaucoup de ses sortant étaient passés chez Macron. EELV n’a finalement eu aucun député.

Cette fois-ci la France Insoumise forte de son succès national, veut dicter ses conditions : les -rares candidats choisis dans la gauche écologique et sociale – devraient adhérer à un programme inspiré de l’Avenir en Commun (le mantra des insoumis), ils devraient respecter une discipline de vote une fois à l’assemblée et devraient présenter des excuses publiques pour avoir dit du mal de Mélenchon (!). Et de toute façon le Parti Socialiste en est exclu -définitivement, a précisé Mathilde Pannot, la chef du groupe insoumis à l’assemblée. Une manière étrange de vouloir rassembler la gauche écologique et sociale. Bref : tous derrière l’étendard des insoumis, je veux voir qu’une tête.  

Troisième remarque : Dans ses déclarations, Mélenchon nous appelle à l’élire premier ministre. Le coup politique a peu de chance de succès. Mais d’un seul coup, il se présente comme seul recours, face à un Macron ou même à une Le Pen élue présidente, (apparemment, l’un ou l’une, c’est un détail pour lui), il a la prétention de dominer, à lui tout seul, tout l’éventail de la gauche. Oubliés les 50% de ses voix qui ont voté utile mais qui auraient préféré voter écologiste, communiste, ou social-démocrate. Le rouleau compresseur insoumis est en marche.

Alors, assez des calculs foireux de Mélenchon ! Votons pour des candidats que nous choisissons selon nos convictions. Et agissons pour une recomposition de la gauche qui soit respectueuse de chacun. La gauche n’est pas morte, quand on regarde au-delà de nos frontières, en Allemagne, en Espagne, au Portugal, en Suède, au Danemark, en Norvège, en Finlande, souvent dans des coalitions particulières.

Mais pour l’instant, ne sautons pas les étapes. Dimanche faisons barrage à Le Pen , éloignons ce danger mortifère pour notre démocratie, notre état de droit. Pas d’autre choix efficace que :

VOTEZ MACRON !

2017 – 2022 : Bis repetita ?

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Au soir du premier tour c’est la même photo : Macron, Le Pen, Mélenchon, trois candidats au premier plan, tous les trois un peu plus hauts, par rapport à la photo de 2017, malgré l’abstention plus importante.

Même dilemme : faire barrage ou s’abstenir, même hésitation des insoumis. Mêmes reproches adressés aux autres candidats de gauche qu’ils avaient pourtant méprisés.

Sur la photo en arrière-plan les déçus : Zemmour, et Jadot. Et des fantômes : Pécresse, Hidalgo, Roussel (qui avait rêvé mieux pour les communistes). Mais des fantômes (LR, EELV, PCF) qui sont encore très implantés dans des régions, des départements, des grandes villes… (les communistes de moins en moins)

Même scenario pour le second tour ? Non! Maintenant la situation est bien plus grave, car MLP a des réserves de voix et Macron ne peut pas invoquer le bénéfice du doute (« ni droite, ni gauche»? ). Son programme annoncé pour le premier tour est vraiment à droite (retraite à 65 ans, contreparties pour le RSA, vers une école néo-libérale), ce qui rendra plus difficile le front républicain.

Malgré tout, je n’hésiterai pas : pour faire barrage à MLP, je voterai Macron, la mort dans l’âme. L’urgence de la lutte pour le climat et la justice sociale devront, hélas, attendre, à un moment où le GIEC nous donne à peine trois ans pour inverser la course vers la catastrophe. Il faudra compter sur les initiatives , les mobilisations pour avancer.

Et après ?

Nous aurons à voter pour les législatives.  

Question : la gauche désunie saura-t ’elle se reprendre ? Les Insoumis sauront-ils tendre la main aux autres formations pour des alliances de terrain. Ou bien profiteront-ils de leur score national pour faire cavalier seul (malgré une très faible implantation locale). La tonalité du discours de Mélenchon pencherait plutôt pour la posture dominatrice (l’Union Populaire, seule issue).
C’est que la gauche n’est pas morte quand on additionne les voix : près de 32% quand les derniers sondages donnaient 26,5 pour toutes les listes. Elle pourrait peser au parlement.

Nous vivons une période de dépérissement de la forme parti (même s’il ne faut pas mettre dans le même sac PS, EELV et PCF). Mélenchon, depuis dix ans, a tout misé sur la forme mouvement dans une vision populiste de gauche. C’est une démarche assumée et théorisée par des penseurs comme Chantal Mouffe et Ernesto Laclau, qui s’éloigne des approches classiques d’alliance pour conquérir le pouvoir et qui prône un rassemblement autour d’un leader charismatique.
Les Insoumis pourront-ils aller plus loin sans alliance ? Ce mouvement pourra-t-il faire l’impasse sur l’absence de cadres intermédiaires, sur l’absence consécutive de démocratie interne (deux caractéristiques qui faisaient la force dans la durée des partis traditionnels) ?

Entendrons-nous en 2027 la même rengaine : 2017 : il nous a manqué 600 000 voix – 2022 : il nous a manqué 500 000 – combien en 2027 ?

Et question subsidiaire : que deviendra le vieux leader ? Je parie pour une quatrième candidature…

Galice ou Toscane ?

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Ce début mars on allait retrouver nos amis en Charente pour un tour en Camping-car . L’idée c’était direction La Galice, au Nord-ouest de l’Espagne. On nous avait prévenu : la Galice c’est un peu la Bretagne de la péninsule ibérique, quand le temps est à la pluie, ça ne fait pas semblant. Un coup d’oeil aux prévisions sur 15 jours ne me rassurait pas – une belle succession de dépressions. Alors nous voici partis à la recherche (avec les prévisions moyen terme de l’ECMWF de Reading) de zones géographiques exempte de pluie. Résultat des courses : la Toscane ! C’est à dire à l’exact opposé de notre objectif initial : la Corogne.

Première étape dans le Languedoc : Gruissan ! Je ne compte pas le nombre de fois que nous avons frôlé ce pays d’étangs, de lagunes, de canaux, sans jamais dévier de l’autoroute A9. Quelle erreur !

Nous n’avons pas regretté cette étape, une idée de Danièle, un souvenir de cinéma : 37°2 le matin. À Gruissan sur la plage des Chalets, Zorg, 34 ans, est un homme à tout faire, chargé des réparations et de l’entretien d’un groupement de petites maisons, au milieu de nulle part. Vivant dans un bungalow sur pilotis, il rencontre Betty, une jeune femme jolie, impulsive et incontrôlable , avec qui il vit une histoire d’amour sensuelle et passionnée.

Ce quartier des Chalets nous l’avons trouvé à peine changé par rapport à ses plans initiaux, un des premiers grands lotissements populaires en bordure de mer de l’immédiat après-guerre. Et fidèle aux souvenirs cinématographiques de Jean-Mi.

Mais l’Italie est encore loin ! Passé la Camargue, Arles et Aix-en-Provence, les autoroutes françaises puis italiennes nous amènent dans ces côtes escarpées de la Riviera, alternant les passages dans l’arrière-pays, les littoraux et surtout une multitude de tunnels, de viaducs. Il faut dépasser Gênes (et son pont Morandi tout neuf) pour trouver un paysage moins accidenté et se rapprocher des grandes plages de Follonica. Un soir, au bout de 3 jours d’autoroute, nous arrivons enfin derrière les pinèdes qui longent ici la Toscane méditerranéenne.

Un cycliste rencontré sur le parking, aussi camping-cariste, nous tuyaute sur les spots intéressants : L’Ile d’Elbe , le golfe de Baratti où nous pourrons passer la nuit face à la mer dans un parking désert en cette saison.
La saison, justement, en ce mi-mars la plupart des campings sont fermés (à la grande déception de Christiane très attachée à sa douche quotidienne) et l’Ile d’Elbe est peu accueillante avec un petit vent du Nord (office du tourisme en vacance, musée Napoléon fermé le mardi, restent la plage Le Viste au pied de la résidence d’exil de l’empereur, la Palazzina dei Mulini et un petit resto sympa, Al Pescator sur la piazza della republica). Au retour, sur le Ferry (dédié à Batman, c’est le thème de sa déco) une silhouette étrange nous surprend dans le vent et les nuées.

Mais quelle Toscane voulons-nous ? Christiane et Jean-mi ont leur projet : Pas question de « faire » la toscane, sans visiter Sienne, Florence, San Giminiano, Volterra et plus loin, les Cinque Terre. Nos envies sont plus proches de la nature : éviter les villes, explorer les sentiers, les terroirs au gré de nos découvertes. Alors on se sépare avec des rendez-vous pour se retrouver.

Sur la plage du Molino, nous découvrons cet édifice qui se dresse face à la mer, accolé à un étrange port et un circuit de canaux.

Renseignement pris auprès d’un marin occupé dans sa petite embarcation. Il s’agit d’un moulin qui fonctionne grâce au débouché sur la mer d’un important canal de drainage. Un habitante nous explique le plan de bonification de l’archiduc de Toscane Léopold II de Médicis. La Maremme, qui doit son nom à son caractère marécageux et donc insalubre, fit l’objet d’un grand plan d’aménagement et d’assèchement au XIXème siècle puis sous le régime de Mussolini pour en faire une région agricole prospère.

Cette côte tyrhénienne est une alternance de longues plages adossées à des pinèdes et de falaises rocheuses entrecoupées de golfes accueillants. Nous avons passé deux jours du coté de Baratti.

Au départ du port de Baratti, le sentier de grande randonnée Volterra-Piombino nous avait été présenté comme un parcours facile, autrefois parcouru à cheval. Sur cette section il longe tout le long des falaises vertigineuses et il n’est pas bien entretenu : rambardes cassées, arbres abattus en travers du chemin, murets écroulés, au-dessus des précipices . Au final une étape éprouvante avec des points de vue saisissants.

Le rendez-vous suivant nous amène vers l’intérieur des terres au coeur de ces colline metallifere exploitées pour leurs minerais dès les premiers étrusques. Les paysages sont encore hivernaux, ici la Toscane apparaît moins riante, plus sévère et plus pauvre que sur les guides touristiques.

Notre point de rencontre se situe sur le parking de l’abbaye de San Galgano, fondée au XIIème siècle par les Cisterciens

pour célébrer le chevalier Galgano qui s’était converti après une jeunesse dissolue, et s’était retiré ici en pénitence. En signe d’humilité et d’abandon de sa vie passée, il aurait voulu briser son épée sur le roc, mais celle-ci s’y serait enfoncée, formant ainsi une croix. Cette dernière est toujours présente, très rouillée et désormais protégée sous une chasse de plexiglas.
La petite fondation prend rapidement une grande ampleur dans l’ensemble de la Toscane , jusqu’à son dépérissement au XVIIème siècle et l’écroulement de son clocher et de sa toiture. Les ruines , bien stabilisées, sont une vrai merveille.
A la veillée nos amis nous rapportent leur périple : Sienne, San Giminiano, Voltera. Florence sera pour la suite.

Pour notre part, nous poursuivrons notre périple campagnard, à travers le pays du Chianti. Castellina en est le chef-lieu. Nous nous garons auprès du parking du marché très fréquenté ce dimanche. Danièle, fait le plein d’artichauts (petits violets à poêler ), de rapa (brocoli-rave qu’on ne trouve couramment qu’en Italie), des tomates de plein champ de la Basilicate et de radicchio rosso (une chicorée rouge d’hiver).

En ce week-end de mars beau mais venté, la place du village est envahie de bikers en goguette,

qui apprécient les petites routes sinueuses de la région, regroupés autour du monument qui célèbre le Gallo Nero , le signe de qualité des meilleurs chianti. Dans les ruelles du village, à coté de quelques maisons prestigieuses de négoce de grands crus, de nombreuses échoppes proposent un choix de vin mais c’est surtout les restaurants, les galeries d’art et les boutiques de souvenirs qui pullulent en attente des touristes encore peu nombreux à cette époque de l’année.

La vigne est partout, c’est elle qui apporte sa prospérité à cette Toscane agricole.

Sans oublier l’olivier. Les plantations – récentes, 20 à 30 ans, c’est l’enfance, vue la longévité de l’arbre – ont colonisé la moindre colline. L’huile toscane se classe dans les catégories premium et contribue à faire de l’Italie le second producteur au monde après l’Espagne, malgré la menace de Xilella Fastidiosa, une bactérie qui ravage les plantations des Pouilles

Les deux camping-cars se dirigent maintenant vers Florence, plus précisément Fiesole sur les hauteurs au-dessus de l’agglomération. Un point de vue saisissant sur la plaine, mais un piège de ruelles, de pentes abruptes, de tournants en épingles à cheveux très inconfortable pour la circulation en camping-car. Le seul camping signalé est fermé pour travaux et les quelques parkings annoncés ne sont pas adaptés. Ce n’est pas un endroit pour nous.

Devant ces difficultés, nous prenons la fuite vers l’arrière-pays, le lac de Bilancino aprés San Piero a Sieve, une retenue artificielle. Ciel bleu, palmiers sur les plages, grandes prairies le long du rivage, de quoi contenter notre chien Snoopy qui s’est engagé dans des courses poursuites sans fin avec une congénère aussi agile que lui. Le lendemain nous reprenons la route pour nous rapprocher du retour.

Nous avons tous apprécié ces vacances Toscanes mais c’est sans doute Snoopy qui en a tiré le plus de satisfaction . Pour ses premières vacances en Camping-car c’est une réussite !

Danièle en a fait un compte-rendu, sur un ton plus personnel, sur son blog Les mots Justes

Presidentielle 2022

À la Une

Vote utile : Pour qui , pour quoi ?

C’est une petite musique que l’on entend dans les médias, portée par la France Insoumise. La gauche divisée n’a aucune chance de marquer ces élections à part le candidat Mélenchon en hausse dans les sondages et susceptible de se qualifier au second tour pour peu que l’électorat de gauche abandonne les autres candidats.

Le vote Mélenchon serait le seul vote utile quand on est de gauche. Cette notion de « vote utile » mérite d’être examinée.

Au fait : Pourquoi vote-t’on ? et surtout à cette présidentielle telle que l’a forgé la Vème république et qui n’a pas grand’chose à voir avec les mécanismes en vigueur chez nos voisins, pourtant pas plus, pas moins démocrates.

  • On vote pour élire le président de son choix. Mais c’est un peu théorique. Chacun d’entre nous peut s’interroger en regardant en arrière. Combien de fois notre candidat préféré s’est -il retrouvé finalement président ? Moi jamais, même si je me suis réjoui profondément de l’élection de François Mitterrand en mai 1981.  Je ne me souviens pas précisément de mon choix du premier tour. Sans doute Huguette Bouchardeau candidate du PSU soutenue par plusieurs organisations d’extrême gauche. Au second tour ce fut évidemment Mitterrand.
  • C’est que les votes du premier et du second tour n’ont pas la même fonction. Au deuxième tour il n’y a plus que deux candidats. Aux législatives les candidats peuvent se maintenir dès le moment qu’ils réunissent au moins 10% des électeurs inscrits, dans certains cas, ce sont 4 candidats qui restent en lice. A la présidentielle, c’est sans appel : on peut faire une troisième place brillante, on est obligatoirement éliminé. Alors on nous répète la maxime : au premier tour on choisit (le candidat le plus en accord avec ses convictions), au second tour on élimine (le candidat qu’on ne voudrait surtout pas voir président).
  • Mais les choses se compliquent. En 2002, le candidat Jospin qui sortait avec un bilan plutôt positif de cinq années à la tête du gouvernement, ne parvient pas au second tour du fait de la multiplication des candidats à gauche. Beaucoup de mes amis avaient préféré voter Taubira, Chevènement, Besancenot ou Mamère. Evidemment au second tour, c’est sûr, ils voteraient Jospin. Mauvais calcul ! C’est comme ça qu’on s’est retrouvé face à un duel Le Pen-Chirac. Du coup le premier tour ce n’est pas seulement exprimer un choix, il faut aussi penser au second tour. C’est là qu’intervient la notion de « vote utile ». Nous pouvons voter pour un candidat qui ne recueille pas totalement notre accord parce qu’il serait bien placé pour bloquer un autre candidat bien placé pour le second tour et que nous voulons absolument éliminer de la compétition.
  • Mélenchon nous explique que même si nous ne sommes pas complètement d’accord avec sa personnalité, son programme, il faut lui permettre d’accéder au second tour contre Macron qui y sera dans tous les cas. On connaît d’avance le résultat, vu le rapport de force, Macron aura une victoire écrasante quelle que soit la qualité de la campagne de Mélenchon. Alors quelle sera donc l’« utilité » de notre vote en dehors du plaisir de voir Mélenchon à la télévision à la place de Marine Le Pen ?
  • Derrière cette question se profile une autre. Dans une gauche rétrécie, désemparée à qui peut-on se fier pour reconstruire une alternative à gauche ? Sans doute pas à Mélenchon : qu’a-t-il fait de son -relatif- succès (à 19,6%) en 2017. A-t-il cherché à nouer des liens avec les autres formations à gauche, avec les verts et à la gauche de la gauche. Son obsession : la prochaine présidentielle et sa troisième candidature, quitte à s’opposer, comme aux municipales à Marseille aux listes communes et citoyennes du Printemps Marseillais
  • Je ne suis pas prêt à accorder un rôle de leader dans la recomposition de la gauche à un Mélenchon ami de Maduro, de Castro, compréhensif vis-à-vis de Poutine, s’abstenant devant la dénonciation du « génocide » des Ouigours en Chine. Son anti-américanisme, son hostilité envers l’Union Européenne sont ses seules boussoles internationales.
  • Alors, ce premier tour, je voterai selon mes convictions Yannick Jadot, car c’est le seul à incarner la lutte pour le climat et pour la justice sociale.
  • Pour le second, peu de chance, sauf miracle, de trouver Mélenchon dans les bureaux de vote. Face à Marine Lepen , en 2017 j’avais voté Macron. On pouvait avoir un doute sur le « ni gauche, ni droite ». En 2022 le doute n’est plus permis.  Je pense que j’irai à la pêche.    

Eté indien en Italie

À la Une

On a tourné autour du Pô

Nous sommes partis à trois camping-cars cette fois, trois couples, six adultes. Une première expérience ! L’idée c’était de suivre le Pô de son cours moyen jusqu’à l’embouchure

Il fallait d’abord se retrouver venant de lieux assez éloignés les uns des autres (Charente, région Lyonnaise, Venise). À raison de plusieurs échanges de mails pour concilier les exigences des uns et des autres (distance à parcourir en un jour, soleil, objectif final, récupération d’une participante en cours de route), un lieu fut trouvé :

Premier point de chute : sortie Broni-Stradella de l’autoroute Turin-Venise chez des viticulteurs accueillant gratuitement les camping-cars dans sa cour et proposant une dégustation de leurs produits. Situés au sud entre Pavia et Piacenza, entre la Lombardie et l’Emilie-Romagne, les Colli Piacentini, dominent le Pô, avec de douces ondulations, derniers contreforts des Apennins.

Merveilleux petits coteaux plantés en vigne sous le soleil d’automne dans un paysage qui rappelle les coteaux du beaujolais. Les productions sont très variées, suivant ainsi la diversité des cépages utilisés : barbera, croatina, cabernet sauvignon, pinot noir, chardonnay, malvoisie, ortrugo, pinot gris et sauvignon blanc.

Après dégustation et achat de vins, repas au bord du Pô dans un restaurant : All avamposto sul grande fiume. Le resto mérite parfaitement son nom, face au cours majestueux du Pô, particulièrement large à ce niveau.

Les constructions sont interdites dans cette zone hautement inondable. Alors, c’est sur des barges posées à terre qui peuvent flotter en cas de crues que le restaurateur et ses voisins se sont installés.

Depuis 2018, nous avions repéré cet endroit surprenant, mais jamais ouvert lors de nos passages. A l’origine installé sur la barge, l’établissement, à moitié embarcation, s’est étendu sur une terrasse arrimée à la terre ferme. La salle est pleine (heureusement nous avions retenu), c’est le rendez-vous des travailleurs du coin et de quelques connaisseurs. Bonne cuisine italienne simple et goûteuse. Des pâtes, des saucisses et du poisson, arrosés d’une petite piquette fraîche et frizzante.

Départ pour Pavie, son pont couvert, sa cathédrale et sa vieille ville. Nous dormons en contrebas d’un grand parc public qui borde le Ticino, juste avant le confluent avec le Pô.

En route pour Crémone où la halte est encore plus séduisante, encore un parc public au bord du Pô, des promeneurs avec ou sans chien, des coureurs, des voies cyclables et à proximité un camping pour prendre des douches. Alors on sort les tables au bord du fleuve, sous un soleil estival.

La façade de la cathédrale toute de marbre blanc est splendide…

mais ressemble à un décor de théâtre dès qu’on fait le tour et découvre la traditionnelle église en brique, cette brique, omniprésente dans toutes les cités que nous avons visitées.

Il fait si beau que nous restons deux jours.

Départ pour Sabbioneta et Mantoue (toutes deux classées au patrimoine mondial de l’UNESCO). C’est dimanche, il y a un monde fou sous le beau soleil d’octobre. Sabbioneta est toute petite derrière ses remparts imposants.

Mantoue est splendide avançant comme la proue d’un navire sur les lacs artificiels qui ont été créés au 12e siècle pour la protéger des inondations du Mincio qui descend du lac de garde. Il y a tant à voir que nous restons deux jours.

Si nous tardons encore nous ne verrons jamais le delta du Pô. Nous sautons Ferrara et choisissons d’arriver à Comacchio, tout au sud du delta.

C’est un bon choix, car cette petite ville est imposante dans sa simplicité. Vieille ennemie de Venise qui ne supportait pas son implication dans le commerce du sel, elle a été rasée en 932, mais s’est reconstruite avec superbe autour de ses canaux et des ponts qui les franchissent pour exploiter ses richesses de pêche, de sel et de marais mis en culture.

Puis c’est la splendeur du delta pour qui aime ces paysages de terre et d’eau, de ciels et d’oiseaux. Un peu de la Camargue, un peu de la Charente, l’immensité en plus et la pleine lune qui rend les oiseaux très bruyants toute la nuit.

La pêche est omniprésente dans la lagune, dont tout le littoral est équipé d’une multitude de cabanes à carrelet, ces filets carrés qu’on remonte avec l’espoir de belles prises

Ce delta a inspiré de nombreux créateurs italiens célèbres. Comacchio, c’est aussi le lieu où fut tourné « La fille du fleuve » un des premiers films de Sophia Loren.

Ses photos avec les habitants de Comacchio figurent partout dans la ville. Le mambo dansé par la Loren reste indubitablement un des sommets de l’érotisme des années 50. Réalisé par Mario Soldati (par ailleurs bon écrivain), co-écrit par une pléiade de scénaristes-romanciers-poètes dont A.Moravia, G.Bassani et P.P.Pasolini (quelle brochette !), ce pur mélodrame vaut surtout par sa peinture des petites gens qui vivent du fleuve.
Un Pô déjà figure de cinéma chez Visconti (« Ossessione », 1942) et qui sera notamment si bien filmé par Antonioni, d’abord dans un documentaire (« Gente del Po », 1947, court-métrage de 11 minutes) puis dans deux fictions (« Le cri », 1957, et « Le désert rouge », 1964) mettant bien en valeur ces paysages de marécages et de lagunes où se mêlent eau douce et eau de mer.

Deux jours à admirer et nous nous séparons là sur le parking d’une auberge au bord de l’eau.
Quelques ennuis mécaniques mineurs ont marqué le voyage (plaquettes de frein au départ, courroie d’alternateur en cours de route) et quelques découvertes culinaires : les orrechiette à la cime di rappa, les raviolis d’ortie et les raviolis de zucca cuisinés dans le camping-car auxquels il faut ajouter quelques repas au restaurant. Des moments de découvertes et de convivialité à voir dans ce film photographique

Notre retour à la maison a marqué le début d’une nouvelle aventure : Accueillir un petit chiot suite au décès de notre cher Wiki. Dans l’élevage, ce sont dix chiots Border Collie qui ont été menés à bien par leur brave mère. Nous avions déjà choisi le nôtre, mais ses 4 frères étaient aussi craquants.
Alors bienvenue à Snoopy !

Covid19- On n’est pas sortis de l’auberge (bis)

À la Une

Souvenez-vous, en avril, en pleine troisième vague, nous nous interrogions sur la sortie de cet épisode de l’épidémie. Entre temps, avec le secours des nouvelles restrictions (on ne parlait plus de confinement) les contaminations avaient baissé fortement, laissant entrevoir un été presque comme avant : Un virus en perte de vitesse, une vaccination qui démarrait vraiment à un bon rythme, il était temps de rouvrir les restaurants, les lieux de culture, les boîtes de nuit …

Et, patatras ! Arrive le variant delta (on ne dit plus « indien ») que personne n’avait vu venir, sauf quelques épidémiologistes ronchons. Ce foutu delta change la donne : il serait jusqu’à 60% plus contagieux qu’Alpha, le variant « anglais » lui-même beaucoup plus contagieux que la souche de Wuhan.

Plus question maintenant de reconfiner. L’économie, et même la santé mentale de nos concitoyens ne s’en remettraient pas. Quand on réfléchit au problème, il faut bien se rendre à l’évidence : Pas de salut en dehors de la vaccination !

Mais dans quelle mesure la vaccination peut nous sauver de la déferlante d’une quatrième vague ? On commence à avoir des données sérieuses.

La bonne nouvelle :

  • Le vaccin est sûr : Avec plus de 3,5 milliards de personnes vaccinés depuis 18 mois dans le monde, peu d’accidents, peu d’effets secondaires signalés.
  • Le vaccin protège vraiment des formes graves.  Les personnes non vaccinées contre le Covid-19 représentent environ 85% des malades hospitalisés, y compris en réanimation, et 78% des décès dus au virus, selon les chiffres récoltés par le service statistique des ministères sociaux.
    Le vaccin est la meilleure arme pour éviter l’embouteillage des hospitalisations, des réanimations, et des décès

La mauvaise nouvelle

  • Face à un variant plus agressif, les personnes vaccinées peuvent, en faible proportion, attraper la maladie, sous forme asymptomatique ou peu symptomatique. Dans ce cas, elles peuvent contribuer à la propagation du virus. C’est ce qui se passe en Israël avec un redépart des contaminations malgré un taux de vaccination très élevé. Heureusement peu de conséquences sur le système hospitalier. Les autorités commencent une campagne de troisième vaccination qui devrait réduire le phénomène. Elles recommandent la réintroduction des gestes barrière.

Face au nouveau péril du variant delta, les autorités françaises (en fait notre président le 12 juillet) ont décidé de forcer la progression de la vaccination : renforcement des centres de vaccination, ouverture aux jeunes, obligation vaccinale pour les soignants, extension du pass sanitaire à de nombreux lieux et activités.

Des mesures qui sont accueillies favorablement par 69 % (pour l’obligation vaccinale) des Français et 62% pour l’extension du pass.

Mais le diable se cache dans les détails : un restaurateur a-t-il le droit de vérifier l’identité d’un client présentant un pass sur son smartphone, un soignant récalcitrant doit-il être licencié, les cinémas peuvent-ils survivre avec les seuls porteurs du pass ? Ces mesures préparées à la hâte par un exécutif autoritaire ont été retravaillées et modérées par le parlement et seront soumises au Conseil Constitutionnel.
On est loin de la dictature évoquée par certains.

Mais un mouvement se lève contre ces restrictions aux libertés du côté des politiques : une partie de l’extrême-droite (Florian Philippot et Dupont-Aignan espèrent bien en tirer un profit) et à la gauche de la gauche (Insoumis, communistes, CGT et quelques personnalités écologistes) qui lancent une pétition attrape-tout contre la loi sanitaire, pour des moyens à l’hôpital, contre la réforme du chômage et des retraites. Bref, la confusion est grande.

Dans la rue, ils sont nombreux de tous horizons : extrême-droite, catholiques intégristes, complotistes, antivax, soignants récalcitrants, gauchistes, divers anti-Macron, Gilets jaunes, attelage hétéroclite, sans vraiment de chef de file, mais souvent biberonné aux fake news. Cela nous rappelle les beaux jours des manifs Gilet Jaune. Sauf qu’il ne s’agit plus des 80 km/h, ni du prix de l’essence ni du référendum d’initiative populaire, mais de la santé de nous tous face à un virus qui n’épargne personne. On peut critiquer le pouvoir, on peut s’impatienter de virer Macron en 2022, mais pas affaiblir la vaccination collective.

Alors, restons mobilisés. Vaccinons-nous ! Et conservons les gestes barrière !

De bien jolies vacances déconfinées

À la Une

Tourisme, amitié, vélo, nature et bonne cuisine …

Cela fait un bout de temps que notre van était prêt au départ. Mais il a fallu attendre : le 3 mai pour oublier la limite des 10 km, et puis le 3 juin pour recevoir notre deuxième injection, plus quelques jours pour garantir l’immunité. Et puis des invitations à retrouver des amis.

En route pour Poitiers et Les Bavards où Béatrice nous attend, une halte presque traditionnelle quand nous partons vers l’Ouest. Il fait très chaud sur la route mais nous trouvons en chemin une halte  fraîche et agréable pour le soir au bord du plan d’eau de Châtelus-Malvaleix, au nord de Guéret en sortant des grands itinéraires.
Le lendemain pour midi, après une courte visite à la modeste maison de George Sand à Gargilesse, nouvelle recherche d’un point d’eau frais et ombragé au bord de la Creuse.

Et c’est la découverte, après Argenton sur Creuse, de Romefort, l’endroit idéal où l’on peut même se baigner au milieu des renoncules d’eau en fleurs.

Les Bavards, au-dessus de la Gartempe, au milieu des bois, un hameau que Norbert fréquente depuis plus de 40 ans.

Béatrice y passe son été, entre les voisins, les amis et les soins de son potager. Aujourd’hui elle a des copains cyclotouristes qui passent la nuit chez elle avant de faire le tour de la Creuse à vélo. Échange d’adresses et de recettes d’amateurs de vélo. Les fauvettes à tête noire chantent à tue-tête mais le potager a soif et Norbert règle l’arrosage automatique pour que tomates et haricots ne meurent pas pendant l’absence de Béatrice.

Départ pour la mer, mais arrêt imprévu dans le marais poitevin à Arçais où un joli camping ombragé nous tend les bras. Le gérant écoute RTL à fond (pour faire le ménage) mais cela ne nous arrête pas. Les campings ombragés ne sont pas légion.

C’est le week-end, il y a du monde. Ballade à vélo le lendemain sur les pistes cyclables au bord des canaux (pas toujours très bien indiquées) et le soir tour en barque avec guide (très compétent sur la gestion de l’eau et l’histoire du marais).

Pourquoi changer quand on est bien ? On reste le lendemain pour visiter la réserve ornithologique de Saint- Hilaire la Palud.
Vélo à nouveau, marche à pied, oiseaux du marais et restauration de la réserve : assiette vendéenne de produits du terroir, parfaite.

On nous attend à Rochefort chez Léni, une amie d’amis. Sa maison est ancienne et simple mais elle la retape avec énergie. Et nous trouvons derrière un immense pré en bordure de forêt, parfait pour nous. Marché de Rochefort pour le repas de midi (aïoli aux légumes parfaitement épluchés par les messieurs et poisson excellemment préparé par les deux cuisinières que sont Léni et Babeth).

Le soir repas au restaurant au bord de la Charente près de la corderie royale. Tables de 6, nous sommes 7, mais on s’arrange : filles d’un côté et garçons de l’autre. Devant nous les gros bateaux qui partent pour le bout du monde.

N’oublions pas la culture et le lendemain c’est la visite de l’architecture de Royan : architecture estivale des villas de bord de mer, architecture de reconstruction après la guerre (les documents de l’office de tourisme sont de toute beauté!).

Retour par Marennes pour manger des huitres au bord des parcs à huitres. Le bar à dégustation vient de réouvrir avec des serveuses toutes neuves dans le métier qui commencent leur saison.

Nouveau départ cette fois vers Challais et la maison de famille de Jean Mi, modeste mais au milieu des bois de chênes. Un régal pour moi qui vient de voir disparaître le bois de Montvallon à Lissieu !

On passe d’abord la tondeuse et on sort les tables, chaises, coussins, parasols en mode été.

Challais est à l’extrème-sud de la Charente, à la limite du Périgord. Pour venir on a traversé les étendues de vigne de la Saintonge, les vignes à perte de vue qui servent à faire le Cognac.

Beau programme à Challais après les quelques travaux de mise en route de la maison de vacances. La forêt est toute proche, la vie sauvage est très présente, témoin cette jeune biche saisie par la caméra de chasse installée par Danièle.

Aubeterre et son église monolithe (troglodyte plutôt) au bord de la Dronne. Guizengeard le lendemain avec ses lagons bleux dans d’anciennes carrières de kaolin. Et quelques détours par les souvenirs d’enfance de Jean Mi, coins de pêche et de baignade.

Une invitation à l’île de Ré ne se refuse pas. On repart en convoi pour un camping au bord de la mer. Simple, on ne voit pas la mer qui est derrière la dune, mais magique, aéré, accueillant et sans aucune animation bruyante (à l’exception du groupe nombreux de nos jeunes voisins). Ré en vélo quand il n’y a pas encore grand monde, c’est un vrai bonheur de pistes cyclables agréables et planes. On découvre St Martin en Ré, la Flotte, Rivedoux-plage. Puis tout le bout de l’île : Ars en Ré après des retrouvailles avec Andréas et Arya (fils et petite fille de Norbert) chez Hanna (leur mère et grand’mère).

Essai de pêche à pied aussi lors des deux grandes marées (5 palourdes que je donne à la personne qui m’a appris à les découvrir!). Bistrot à Ars en ré, cuisine agréable et service rapide (« depuis le déconfinement, nous faisons en juin le chiffre d’affaire d’un mois de juillet »)

Les bonnes choses ne durant pas et l’île de Ré commençant à se remplir pour le dernier week-end de Juin (nous renonçons au phare des baleines déjà envahi), retour vers Challais et derniers préparatifs pour reprendre la route sous la pluie et la grisaille. Cette fois, d’une seule traite, il vient un moment où l’on a envie de se retrouver chez soi !

Les forêts et le CO2

À la Une

Un bois de chênes centenaires qui disparaît dans notre village à deux pas de chez nous, juste au-dessus de l’école. Des surfaces dévastées, une centaine de tronc prêts à partir pour la scierie. L’évènement a créé une grande émotion. Mais en plus des ravages du chantier, de la dégradation du paysage, c’est aussi une très mauvaise affaire pour la planète et le climat.

Les arbres, grâce à la photosynthèse, absorbent le CO2 de l’atmosphère et le transforment en feuilles, branches, et tronc. Chaque année ils produisent plus de bois et rejettent autant d’oxygène dans l’environnement. Bref, tout au long de sa vie : 20, 30, 50, 100, 200 ans l’arbre aura ainsi retiré des quantités considérables de CO2 responsable principal du changement climatique qui nous menace tous.

Mais la vie d’un arbre a une fin : Maladie, foudre, incendie, tempête. La plupart meurent du fait de l’exploitation humaine. Que devient alors cette machine naturelle à fixer du CO2 ? Va-ton le retrouver dans notre atmosphère ? Classiquement on présente le schéma suivant. Que faut-il en penser ?

  • Séquestration dans les produits : VRAI !  les charpentes, planches, tasseau, meubles se retrouvent dans la construction et dans nos logements. Ils ont une durée de vie longue (quand ils ne partent pas en fumée comme la charpente de Notre-Dame). Le CO2 capté pendant le cycle végétatif reste séquestré dans le bois.
  • Substitution énergétique : VRAI et FAUX La question n’est pas si simple. Evidemment cela permet d’économiser des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) qu’on laissera dans le sous-sol et qui ne viendront pas augmenter le CO2 atmosphérique. MAIS …

Dans l’immédiat on brûle le bois qui dégage donc le CO2 correspondant. On le brûle dans notre cheminée ouverte (très mauvais rendement), dans notre foyer fermé (meilleur rendement) ou dans notre poêle à granulé, notre poêle de masse (meilleur, meilleur rendement). Mais si l’on regarde le cycle du combustible, c’est plutôt mauvais : on a laissé beaucoup de matière dans le sol (souche et racines), sur la terre (les branches), et puis le rendement de la combustion elle-même n’est pas fameux : au total, le rendement est 1,5 fois moins bon que le charbon et 3 fois moins bon que le gaz.

Mais le plus inquiétant ce sont les projets de fournir de l’électricité ou du chauffage urbain à grande échelle, à partir de la forêt. Les objectifs envisagés au niveau de l’Union Européenne consommeraient la totalité de la croissance naturelle de la totalité des forêts d’Europe.

Plus inquiétant encore : le caractère renouvelable de cette ressource est tout à fait fallacieux. Si effectivement on replante, les nouveaux arbres mettront de nombreuses années avant de « rembourser » la dette CO2. Dégagement massif de CO2 maintenant, compensation dans 20, 30, 50 ans. Or c’est bien dans les années proches (avant 2050) qu’on a besoin de réduire massivement les émissions de CO2.

Le bois énergie, faussement renouvelable, est une mauvaise affaire pour la planète, contrairement à la propagande mensongère des industriels et des autorités.

C’est d’ailleurs le sens d’un appel de 500 scientifiques à travers le monde qui réclament l’abandon de tels projets.

Laisser les arbres grandir, vieillir, continuer jusqu’à la fin de leur vie à absorber du CO2 ( c’est prouvé ! )

Et au moins ne pas prélever plus que la croissance naturelle des forêts (qui en France ont doublé leur superficie depuis le XIXe siècle)

Non ! Brûler nos forêts n’est pas une solution à nos besoins de chauffage et d’électricité. L’isolation et l’efficacité énergétique devraient permettre aux énergies réellement renouvelables de prendre le relais des énergies fossiles.

COVID19 : On n’est pas sortis de l’auberge.

À la Une

Trois semaines après le (pseudo, mini, quasi …) confinement dans les 19 départements, 2 semaines après l’extension au territoire national, rien ne bouge. Tout juste si on perçoit un début de ralentissement dans l’augmentation.

Et pourtant on était tenté d’y croire, à commencer par le président qui voyait bien le « plateau » des contaminations se stabiliser jusqu’à la victoire de la vaccination, un espoir vite déçu.

Ce relatif optimisme, nous l’avions partagé, Danièle et moi lorsque nous avons été vaccinés (à l’AstraZeneca) chez le pharmacien le 30 mars. L’idée c’était que le couvre-feu et les mesures locales suffiraient à éviter l’explosion des contaminations. L’évolution des dernières semaines a démenti ces espoirs, amenant le Président à renforcer, malgré lui, les restrictions.

Que s’est-il passé ?

L’impact des variants a été sous -estimé, malgré les avertissements des scientifiques. Les restrictions, efficaces sur le virus historique, ne suffisent plus devant le variant, britannique notamment, qui s’est imposé à la première place en France.

Alors les dernières mesures peinent à ralentir, voire diminuer les contaminations. Le R effectif commence à peine à repasser timidement sous le seuil de 1, gage d’un recul de l’épidémie.

Est-ce le moment de penser à la réouverture, d’annoncer un calandrier ?

Alors que les contaminations ne baissent pas, que les entrées en réanimation progressent, est-ce bien raisonnable de mettre en avant la date du 15 mai pour déverrouiller progressivement la vie sociale ?

Nous sommes tous envieux des Britanniques qui retrouvent leurs pintes de bière sur les terrasses ; on aurait tendance à oublier qu’ils sortent de près de quatre mois de confinement sévère et qu’ils ont vacciné 40 millions de leurs concitoyens. Même constat en Israël.  On en est bien loin en France. D’autant que les redéparts d’épidémie ne sont pas rares sur la planète.

Les usa ont vacciné 189 692 045 personnes.  Beaucoup d’états ont adouci, voire supprimé les restrictions. Au final, les contaminations repartent à la hausse : +8% sur les deux semaines d’avril.

Le Chili a vacciné complètement 24,5% de sa population (37 % des Chiliens ont reçu au moins une dose). Jeudi 8 avril, 8 195 cas positifs ont été confirmés, du jamais-vu. Les services de soins intensifs sont de nouveau exsangues : 95 % des lits sont occupés. En cause : le variant brésilien qui s’est invité en voisin, l’allègement des mesures de restrictions qui a exposé les jeunes, pas encore vaccinés, mais aussi le vaccin chinois qui protège moins à la première injection (3% selon l’Université du Chili). Alors c’est la course à la 2èmeinjection (56%d’efficacité).

Pour améliorer l’efficacité du Sinovac, les autorités des Emirats arabes unis ont récemment expérimenté l’administration de trois injections du vaccin chinois, au lieu de deux.

Quels que soient les vaccins les études montrent que le nombre de cas graves est vraiment réduit par la vaccination. Mais partout les variants introduisent une nouvelle donne et réclament des mesures plus strictes.

Alors, en France, accueillons avec prudence les promesses de grande réouverture. Ce serait déjà bien de pouvoir bouger pour les vacances d’été.

COVID 19: la vaccination à la peine en France

À la Une

4 500 000 personnes vaccinées en France dont 1 500 000 pour les deux doses. Après un début chaotique, on attend toujours l’accélération .

  • La France a choisi de maintenir la contrainte de pratiquer la deuxième injection dans un délai de 3 à 4 semaines, à la différence de nos voisins britanniques et même en dépit de l’avis de la Haute Autorité de Santé qui recommandait d’aller jusqu’à un doublement du délai. Ce qui implique que les centres de vaccination vont être embouteillés dans les jours qui viennent par les personnes déjà vaccinées. Plus de la moitié des doses disponibles y sera consacrée. Pas idéal pour augmenter la couverture …
  • La vaccination chez les médecins généralistes autorisée depuis le lundi 25 février grâce au vaccin AstraZeneca patine, c’est le moins qu’on puisse dire: Moins de 20% des doses disponibles de ce vaccin ont été utilisées. Seuls 19 000 médecins sur les 101 000 généralistes se sont inscrit pour délivrer le vaccin.

En cause, des contraintes d’organisation qui rebutent beaucoup de médecins déjà surchargés au quotidien : il faut planifier des plages de vaccination, commander et prendre livraison des doses dans les pharmacies, annuler les plages des RDV habituels, repérer et convoquer des patients, les convaincre, remplir les dossiers pour le suivi. Possible pour des cabinets collectifs avec du personnel, mais difficile dans le cas d’un exercice individuel. Bref, ce n’était pas la meilleure idée pour faire avancer la vaccination. Alors que les centres de vaccination qui, eux, sont en capacité de vacciner des grandes quantités, sont en panne faute de doses Pfizer et Moderna.

Alors pourquoi ces choix ? Pourquoi les syndicats de généralistes ont-ils revendiqué haut et fort cette exclusivité, alors qu’ils savent parfaitement que la plupart de leurs adhérents ne sont pas organisés pour répondre à cette demande ?
Pour le comprendre il faut remonter à l’épidémie de grippe H1N1 de 2009. A l’époque les grands centres de vaccination prévus par les autorités avaient fait un bide : peu de candidats à la vaccination. Les syndicats de médecins, alors en guéguerre avec le ministère, avaient proclamé que l’échec était dû au choix des « vaccinodrômes » qualifiés de « soviétiques » aux dépens des cabinets des généralistes . Une question de territoire à défendre pour la médecine libérale, un enjeu corporatiste et politique, il faut le dire.
En fait si les vaccinodrômes étaient désertés, c’est que la population avait bien compris que l’épidémie annoncée avait perdu de sa virulence (à tel point que les décès cette année furent inférieurs à une saison ordinaire de grippe) et que la vaccination n’était donc pas indispensable. Rien à voir avec le COVID19 : chacun peut constater le danger couru, surtout pour les catégories d’âge et de comorbidité désignées. Les doutes et les hésitations du début sont oubliés.

Et en 2021 rebelote ! C’est vraiment pour faire plaisir aux corporations de généralistes qu’on les a remis dans la boucle . Alors, si vous faites partie des publics cible, interrogez donc votre généraliste. A mon avis vous pourrez attendre longtemps avant de recevoir l’injection dans son cabinet.

Les pharmaciens pourront-ils prendre le relais ? On attend de voir …

Mais, à un an des élections présidentielles, les médecins représentent un potentiel électoral qu’il convient de choyer.

Danièle et moi, nous faisons partie du « trou dans la raquette » comme disent les commentateurs, les personnes entre 65 et 75 ans sans comorbidité qui pourraient être concernées à partir de début avril, nous dit-on. Mais il paraît qu’on est 7 millions, alors on risque d’attendre longtemps.

Covid19 – Le pire n’est pas toujours sûr !

À la Une

Rappelez-vous : au lendemain du confinement d’automne on parlait déjà de reconfiner pour les fêtes de fin d’année, considérées comme un risque absolu de contaminations. Alors on a fait attention et le danger s’est éloigné. Mais dès la mi-janvier, tout le monde s’attendait à un reconfinement prochain. Les nouveaux cas positifs plafonnaient à 20 000 et les autorités scientifiques s’attendaient à une explosion. Alors l’exécutif a dégainé son couvre-feu, d’abord à 20h puis à 18h, avec un certain succès puisque les cas positifs n’ont pas (ou peu) grimpé. La nouvelle doctrine proclamé par le président Macron exclut la perspective du confinement général. Place aux adaptations locales : Nice, Dunkerque et peut-être d’autres à venir.

Mais l’incertitude, l’inquiétude sont fortes chez les scientifiques, plus généralement chez nos concitoyens.En cause les fameux variants : anglais, sud-africains, brésiliens … qui seraient beaucoup plus contagieux ( 40 à 70 % nos dit-on) que le virus historique. Leur montée inexorable nous conduirait inévitablement vers une explosion du nombre de cas comme au Royaume-Uni. Cette analyse mérité d’être discutée.

C’est un fait indéniable que le variant a rapidement supplanté au RU le virus historique, il a démontré son avantage évolutif. Mais est-il totalement à l’origine de la contagion exponentielle observée ? Il faut rappeler que la flambée britannique s’est produite à un moment où les bars, les pubs et les restaurants restaient ouverts et que les masques n’étaient pas obligatoires outre-manche. Variant ou pas, on pouvait s’attendre à une explosion.

En France , le département de la Moselle est un cas à part : c’est le variant sud-africain qui prospère. Suite à une progression « fulgurante », le variant sud-africain est devenu dominant en quelques semaines en Moselle. Quels sont ses effets sur l’épidémie ? Certes, les encours hospitaliers augmentent mais ce, à une vitesse incomparable avec ce que le département a connu de mi-octobre à mi-novembre. Quant au nombre de cas positifs, il a connu un regain de croissance à partir de la mi-janvier mais ce regain s’est ensuite tassé, le nombre de cas n’augmentant encore un peu que parce qu’il y a eu une augmentation faramineuse du nombre de tests. C’est ce que Odile Filliod analyse dans son excellent blog et sur sa page facebook. Pas de quoi conclure pour l’instant à une contagiosité exceptionnelle du variant face au virus historique

L’épidémiologiste Martin Blachier se demande de même dans une interview à LCI si les prévisions d’impact des variants ne sont pas complètement surestimées. Il n’y aurait pas d’explosion à craindre du coté des variants.

Tout le monde s’accorde à dire que le vaccin va modifier toutes les données. On le voit déjà en Israël où près de la moitié de la population est vaccinée – à l’exception des palestiniens qui commencent juste à recevoir les injections. Les formes graves et les décès régressent rapidement sur les personne âgées. Même en France où la vaccination est poussive, on commence à voir un recul des décès correspondant à la couverture vaccinale des EHPAD. Alors on ne peut qu’être impatient devant le lenteur du démarrage des opérations dans notre pays (suite à des erreurs d’analyses et à une série de couacs). On en est hélas à un point où on est limité par le rythme des livraisons de dose, comme nos homologues de l’Union Européenne.

Alors une fois qu’on a éclairci ces données, est il possible de faire des pronostics ? N’ayant personnellement aucune responsabilité dans la conduite des affaires, je peux m’y risquer . La situation risque de perdurer, sans s’aggraver radicalement.L’explosion annoncée du fait des variants risque de rester contrôlable. Ainsi le reconfinement général semble exclu. Mais les ouvertures souhaitées des restaurants, des lieux de culture… etc restent hors de portée.. Il se passera de longues semaines avant que la vaccination change la donne.

C’est dire que le choix de l’exécutif (en fait le choix du président Macron) reste une voie praticable : Pas de confinement général, mais des mesures ciblées. Au risque d’énerver toujours plus nos concitoyens qui sont nombreux à privilégier la philosophie du tout ou rien et du tout national. Partout pareil et tout le monde à la même enseigne !

Seul l’avenir et la comparaison avec des voisins qui poursuivent chacun des objectifs différents pourront désigner les meilleures politiques

Salut les reconfinés – 4-

À la Une

Vous avez remarqué : le sous-titre du Clairon n’a pas bougé : Salut les reconfinés ! Malgré les « allègements » des contraintes du mois de décembre, l’impression demeure qu’on n’a pas quitté le confinement et que ça risque de durer.

Bonne année 2021 … la santé surtout !

Il est de tradition qu’au moment du passage vers la nouvelle année, on tourne le regard vers celle qui s’achève. Tous les médias y consacrent analyses, récapitulatifs, et bilans circonstanciés.

Mais Le Clairon ne cédera pas cette année à cet exercice obligé. Personne n’a vraiment le cœur à revisiter cette annus horribilis.

Bye bye 2020 ! et sans regret, on tourne la page.

Regardons vers les mois qui viennent. Quand retrouverons-nous une vie normale ? Les efforts collectifs vont d’abord se concentrer sur les moyens qui visent à maîtriser l’épidémie, puis à ceux qui permettent d’espérer en finir avec la Covid

La maîtrise de l’épidémie

Les premiers jours de janvier seront décisifs. Si les cas positifs passent au-dessus des 15000 quotidiens, ce qui n’est pas exclu après les regroupements des fêtes de fin d’année, des nouvelles mesures seront prises. Le ministre Véran annonce un couvre-feu anticipé à partir du 2 janvier. Il faut s’attendre à l’avenir à un reconfinement dont les modalités ne seront peut-être pas celles du précédent. S’y rajoute la menace du virus mutant qui circule sans doute déjà dans la population française et qui serait plus contagieux, même si aucune étude n’est venue confirmer pour l’instant l’alerte des autorités britanniques.

Les campagnes de tests

On attend les résultats des opérations massives de test au Havre, à Charleville Mézières et dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Quelle proportion d’habitants a profité de l’opération ? Quel effet sur la progression du virus ?

Les exemples de la Slovaquie et de la métropole de Liverpool  ne sont pas encourageants. Ils ont montré que le recul de l’épidémie est très provisoire et que les contaminations ne tardent pas à remonter en flèche.
Ces tentatives butent toutes sur les mêmes difficultés : Comment toucher toutes les populations ? comment isoler efficacement les cas positifs ?

Bref les premiers mois de l’année risquent de ressembler beaucoup aux derniers mois de 2020, en passant de confinement en allégement relatif. Il n’y a pas de raisons que l’épidémie ralentisse. Les théories – qui se sont avérées fumeuses- des immunités (croisées, sous-jacentes et autres) n’ont pas survécu à la réalité des faits. Il y aura hélas ! d’autres vagues.  Et les autorités n’auront d’autre choix que de tout faire pour éviter la surcharge, voire la paralysie des services hospitaliers. Sauf si la vaccination change la donne.

La vaccination

Dans cette situation la vaccination poursuit plusieurs objectifs :

  • Dans un premier temps en protégeant les plus fragiles (le quatrième âge en EHPAD, les patients présentant des comorbidités), elle devrait freiner drastiquement les entrées en réanimation. Resteraient des cas isolés qui, en fonction de particularités individuelles, présenteraient des formes graves de la maladie. Le virus pourrait continuer à circuler dans le reste de la population sans poser de grave problème pour les systèmes de santé.
  • Dans un second temps, lorsqu’une partie importante de la population sera soit immunisée (cas positifs) soit vaccinée, la circulation du virus devrait s’éteindre d’elle-même. Mais à partir de quelle proportion de la population, et à quel moment pouvons-nous l’espérer ?

C’est là qu’intervient la stratégie vaccinale de chaque pays.

  • Aux USA la vaccination est avancée comme une arme de destruction massive de la pandémie : «Nous aurons vacciné 100 millions de personnes à la fin du premier trimestre de 2021, avec deux doses de vaccins», a annoncé Moncef Slaoui, le «monsieur vaccin» de la Maison blanche. Pour atteindre l’immunité collective, 70% à 80% de la population, qui compte 328 millions d’habitants, doit être selon lui vaccinée.
  • Le Royaume Uni a commencé le 8 décembre avant tout le monde dans 1000 centres de vaccination. Tous les groupes à risque devraient être vaccinés avant la fin du premier trimestre
  • En Allemagne, tout est prévu dans 440 méga-entres de vaccination

. Le gouvernement allemand table sur la livraison de 11 à 13 millions de doses de vaccin (qui doit être injectées par des médecins et personnels de santé volontaires en deux fois) d’ici la fin du premier trimestre 2021 pour les publics prioritaires. Parmi eux, les plus de 80 ans n’auront pas à se déplacer au centre de vaccination mais des équipes mobiles se rendront directement à leur domicile et dans les maisons de retraite.  

Une campagne de sensibilisation va être lancée. Les deux tiers des Allemands veulent se faire vacciner mais une partie d’entre eux préfère attendre un peu.

  • En France le plan de vaccination diffère peu de celui de ses voisins. C’est du côté de l’organisation, que les choses sont encore dans le flou.
    Un début de campagne au compte-gouttes ! En deux jours, les 27 et 28 décembre, ce sont moins de 100 résidents d’Ehpad et soignants qui ont été vaccinés contre le Covid-19.

Invité d’Europe Soir lundi, le président du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale anti Covid-19, pointe qu’il « ne faut pas se précipiter » pour vacciner le plus de personnes possible. La lenteur de la stratégie vaccinale française « donne le temps de faire les choses bien en termes de sécurité, d’efficacité, d’organisation et d’éthique avec le consentement ».

 Pour rappel, la France est le seul pays à demander un consentement par écrit avant l’injection. Et de prévoir systématiquement une visite préalable chez son médecin. A priori les « vaccinodromes », mauvais souvenir de la grippe A de 2009,  sont exclus. Les médecins généralistes sont réintégrés au centre du jeu. Mais sauront-ils faire face à cet enjeu considérable ? Avec une cible de un million de vaccins fin janvier et 15 millions fin mars, est-ce réalisable dans les seuls cabinets des médecins généralistes ?
En comparaison de certains de nos voisins, comme la Grande-Bretagne qui comptabilise déjà 800.000 injections, la « lenteur à la française » semble être l’exception. Est-ce le bon choix ?

Les autorités donnent l’impression de marcher sur des œufs, tant la prudence l’emporte dans cette opération de vaccination dont l’objectif ultime devrait tout de même concerner 30 à 45 millions de nos concitoyens si l’on veut atteindre l’immunité collective. A ce rythme on se demande quand il sera atteint : en 2022 ? Plus tard ?

On invoque la réticence des français à accepter ce vaccin. Actuellement ils seraient 60% à refuser la perspective de la vaccination. Mais la situation risque d’évoluer radicalement devant les bons résultats des vaccins, la rareté des effets indésirables et la tranquillité qu’ils introduisent devant la progression de l’épidémie. On peut penser que ceux qui annoncent aujourd’hui un refus,seront les mêmes dans quelques semaines qui réclameront l’injection pour eux dans les meilleurs délais. Ils critiqueront alors vivement les autorités pour le retard français. Autant de semaines, de mois perdus qui nous éloignent d’une vie sans Covid !

Salut les reconfinés -3-

À la Une

Noël sauvé ! Mais dans quelles conditions ?

Jeudi 10 décembre, nous étions tous suspendus à ses lèvres. Qu’allait nous annoncer Jean Castex ? Quel serait notre sort pour les semaines qui viennent ? Le président Macron nous avait fait miroiter un déconfinement à partir du 15 décembre. Il laissait donc au premier ministre la tâche ingrate de faire les annonces désagréables.

  • Les quelques bonnes nouvelles : c’est la fin des attestations. On pourra se déplacer au-delà de sa région. La soirée de Noël est préservée
  • Et un tombereau de mauvaises : Les lieux accueillant du public (notamment les activités culturelles et récréatives) resteront fermés. Un couvre-feu de 20 h à 6h du matin. Pas de dérogation pour le réveillon du jour de l’an. Pas de ski avant janvier.

L’avenir proche est plutôt sombre avec cette courbe des cas positifs qui refuse de baisser et fait craindre une troisième vague. Heureusement il nous reste quelques raisons d’espérer : Des campagnes massives de test avant Noël et les vaccins qui démarreront avec la nouvelle année.

Mais même ces annonces positives sont troublées par des messages contradictoires. Est-ce là le signe éclatant de notre génie français, si prompt à écouter les grognons,  à rejoindre les pessimistes et les sceptiques ?

  • Les tests massifs vont être organisés dans trois métropoles (Saint-Etienne, Lille et le Havre). Juste une expérimentation, et plutôt timorée.

La région Auvergne-Rhône-Alpes fera plus en proposant le test (surtout les antigéniques) au quart de sa population.

Mais déjà les esprits chagrins, des médecins, et même le ministre de la santé en réduisent la portée. D’après eux il ne faudrait pas se croire protégé et non-contaminateur pour autant, car on peut, sans le savoir, avoir été contaminé la veille ou l’avant-veille. Certes, c’est une évidence… mais que nous proposent les autorités ? Les futurs convives de Noël devraient plutôt se confiner préventivement pendant sept jours auparavant. Facile à dire ! Autant Danièle et moi sommes déjà et depuis longtemps quasi-confinés vue notre situation de retraités confortables, autant c’est impossible pour tous les actifs (à moins d’imposer de nouveau à tout le monde une quarantaine de 7 jours).

Alors ne les écoutons pas et faisons-nous tester avant de retrouver pour le réveillon les plus vulnérables. Cela permettra de repérer les cas positifs qu’ils soient symptomatiques ou asymptomatiques pour qu’ils restent à l’écart.
Et puis il y a les vaccins avec l’espoir d’en finir avec les restrictions

  • Les vaccins arrivent. Mais déjà le scepticisme monte en force.

Tel le professeur Eric Caumes qui s’inquiétait de ne pas avoir la documentation (alors qu’elle était entre les mains de l’Agence du Médicament : plusieurs milliers de pages, paraît-il). Et qui renouvelait ses alertes, une fois qu’elle était publiée dans la revue de référence The Lancet. Il y aurait trop d’effets secondaires ! Qu’on en juge (même si nous n’en avons pas les compétences, on peut comprendre) : 15% des vaccinés dans la fleur de l’âge auraient connu une petite poussée de fièvre à 38 °. La belle affaire !

Le déploiement du vaccin ne pouvait s’organiser en France que lorsque les autorités compétentes auraient donné leur feu vert. Cette prudence (que n’ont pas respectée les autorités du Royaume Uni) est indispensable.

Mais si l’on doit encore patienter pour la mise en place que chaque médecin, spécialiste ou non, ait pu étudier les milliers de pages du dossier et se soit fait une idée argumentée, on pourra attendre Noël de l’année prochaine pour espérer se faire vacciner !

Vous avez compris que je suis pro-vaccin et impatient de recevoir l’injection (après les précautions et vérifications nécessaires) ; Et je vous encourage à faire de même.

Salut les reconfinés -2-

À la Une

COVID : Quelles perspectives ?

Vous avez bien vu, lu, entendu ces derniers jours dans tous les médias : La grande affaire c’est l’ouverture des commerces. A tous les sujets d’actualité, sur toutes les antennes, difficile d’échapper au reportage sur la mercerie de Romorantin, le magasin de jouets de Vierzon, où la boutique de fringues de Chauvigny. Les enseignes commerciales ont accepté du bout des lèvres de différer le légendaire Black Friday. Tous les responsables économiques et politiques se préparaient à scruter les courbes d’affluence et de chiffre d’affaires, à espérer le boum attendu dans les boutiques, pendant que les responsables sanitaires craignaient la cohue qui favoriserait un nouveau pic de contagion.

Un petit retour dans les commerces

Finalement, rien de cela ne s’est passé.  Une petite affluence de fin Novembre (20 % en moins parait-il, à part les jouets). Explication : beaucoup d’achats de Noël ont été anticipés (sur internet ? on ne sait pas encore). Les prudents (dont je fais partie) sont restés chez eux. Et les soucis de l’évolution de la pandémie ont peut-être mis au second plan la frénésie supposée de consommation.

C’est que les fameuses (et stupides) attestations sont toujours là au moins jusqu’au 15 décembre. Ou peut-être plus longtemps, même si les fêtes de fin d’année échapperont sans doute à la vigilance des forces de l’ordre, on pourra sans doute aller saluer Papy et mammy (et « les laisser manger seuls dans la cuisine » comme le conseille le professeur Rémi Salomon…).

Mais toutes les autorités insistent à juste titre sur la persistance du danger et annoncent des actions sur les tests et sur le fameux vaccin.

Les tests de masse.

L’idée c’est de tester tout le monde ou au moins tous les volontaires avec un accès facile. On pense d’abord à une échelle locale, la métropole de Lille, par exemple. Mais aussi de toute une région. Ainsi Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes annonce une opération globale entre le 16 et le 22 décembre avec des moyens considérables. Ces campagnes massives de test ont deux intérêts : avoir une connaissance fine de la situation de l’épidémie au niveau d’un territoire et alerter les individus testés positifs, surtout lorsqu’ils sont asymptomatiques, sur la nécessité de s’isoler, en particulier à l’approche des fêtes de Noël. De quoi rassurer les familles à quelques jours des rassemblements autour des sapins.

Mais un autre objectif majeur de la démarche n’est pas assuré : L’isolement des positifs. Le président Macron a ouvert la porte à un débat (bien français) : doit-on utiliser la contrainte ? Faut-il prévoir de fortes amendes ?  Il faudrait plutôt commencer par examiner précisément ce qui se fait actuellement. On commence à connaître quelques cas autour de nous : cas contact ou testés positifs. Quel a été le suivi pour chacun ? : en général un SMS avec quelques recommandations et puis … et puis …c’est tout.
Alors on pourrait déjà améliorer l’information sur les modalités de l’isolement qui apparaît sans doute problématique à bien des cas positifs. Mais on peut regarder aussi ce qui se fait à l’étranger.
Les pays qui réussissent le mieux le traçage mettent le paquet : isolement dans des hôtels pour les plus précautionneux, et pour ceux qui restent chez eux : visite chaque matin d’un professionnel de santé qui examine avec le patient les modalités de l’isolement et le soutien à apporter. Cela demande des moyens humains considérables, mais toujours moins coûteux qu’un nouveau reconfinement.

Le vaccin

Il arrive, nous dit-on, mais on est encore dans le grand flou. J’ai vu un reportage d’Arte sur l’Allemagne. La campagne y démarre précisément le 15 décembre, la logistique des doses de vaccins, leur conservation (à -70° pour certains dans des congélateurs spéciaux), les centres de vaccination installés dans des centres de congrès ou des gymnases, le personnel recruté, tout est prêt.

En France on s’interroge encore sur les modalités (chacun chez son généraliste ou dans des centres dédiés ?) ; sur les publics prioritaires ; sur la stratégie vaccinale (précisée lundi 30 novembre par la Haute Autorité de santé) ; sur le calendrier (un premier déploiement des doses pourrait avoir lieu en janvier…).
Tout le monde a en tête le fiasco du vaccin contre la grippe, vivement conseillé par les autorités, mais en rupture dans les pharmacies trois jours après le début de la campagne.

Alors, on prend les paris : A quel moment serons-nous appelés, Danièle et moi, qui faisons partie des publics prioritaires pour avoir la fameuse injection ? A mon avis pas avant le printemps dans le meilleur des cas, plus sûrement au début de l’été !
Et on s’étonne que dans ce grand flou, les français ne sont que 40 % à se déclarer favorables personnellement à la protection vaccinale.  Le jour où les autorités seront en mesure donner une information fiable et complète, ils seront manifestement bien plus nombreux.

Alors en attendant RESTEZ PRUDENTS !

Salut les re-confinés -1 –

À la Une

Alors ? Ce qu’on craignait ces derniers jours s’est finalement réalisé. Sans attendre le résultats des mesures des derniers jours (couvre-feu,  etc.), le gouvernement (ou Macron tout seul ?…) a tranché. Sans doute que les chiffres de l’épidémie qui flambent n’ont pas laissé le temps de l’examen sérieux de la situation.

A ce moment de retour en force de l’épidémie la Chaîne Parlementaire diffusait samedi en fin de soirée (à voir : d’autres diffusions cette semaine à venir) un documentaire instructif : Grippe de Hong Kong, la pandémie oubliée

La grippe de Hong Kong

C’était entre l’hiver 1968 et l’hiver 1969, une épidémie qui était passée inaperçue, j’en suis témoin, moi qui en fus contemporain. Aujourd’hui je n’en ai aucun souvenir direct ou indirect. Après mai 1968, j’avais, comme beaucoup de ma génération, d’autres préoccupations. L’hiver 1968 c’est l’Asie et les USA (50 000 morts en trois mois) qui sont sévèrement touchés.  A l’été 1968, les spécialistes estiment l’épidémie terminée. En France les autorités sont rassurantes : pas de seconde vague, pas de danger !

Mais l’hiver arrive et le virus flambe : En France, tous les milieux sont touchés : dans les entreprises, les écoles, les administrations l’absentéisme varie entre 30 à 50% des effectifs. On estime a postériori que 25 % de la population a été infectée par le virus en quelques semaines. Mais la population, les médias, les responsables politiques ne prennent pas le fléau au sérieux et les commentaires légers, voire humoristiques ne sont pas rares. Evidemment aucune mesure de distanciation, aucune restriction  n’est évoquée

Pourtant cette grippe tue, les services hospitaliers n’ont aucune thérapie efficace (pas d’intubation, pas de respirateur…) pour les formes graves. Le documentaire fait la place au témoignage d’un médecin alors externe à Nice : « On n’avait pas le temps de sortir les morts. On les entassait dans une salle au fond du service de réanimation. Et on les évacuait quand on pouvait, dans la journée, le soir. Les gens arrivaient en brancard, dans un état catastrophique. Ils mouraient d’hémorragie pulmonaire, les lèvres cyanosées, tout gris. Il y en avait de tous les âges, 20, 30, 40 ans et plus. Ça a duré dix à quinze jours, et puis ça s’est calmé. Et étrangement, on a oublié »

A l’époque on s’est peu soucié peu de compter les morts. Après une analyse rétrospective les épidémiologistes estiment maintenant que l’épidémie fut responsable de 40 000 morts en France. Au niveau mondial ce fut un million de morts.

Ce qui frappe au cours de l’émission, c’est l’insouciance générale de la population et des autorités qui tranche tellement avec l’inquiétude qui nous a saisi, cinquante ans plus tard, avec la Covid 19. Et si nous avions aujourd’hui adopté la même insouciance – ou la même priorité à nos activités, nos libertés- combien compterions-nous de morts maintenant ?

Le re-confinement

Emmanuel Macron a trouvé des arguments à la télé mercredi pour justifier le reconfinement . Des arguments par défaut, en rejetant des solutions plus ciblées sur les publics vulnérables, en exposant les conséquences dramatiques de formules plus libérales (si on laisse faire, ce sont 400 000 (?) morts à venir).

« Tout le monde a été surpris par la force de cette seconde vague. » a t-il souligné. Tout le monde sauf le conseil scientifique qui depuis juin alerte sur les scenarii les plus noirs.

Mais Macron préférait sans doute faire une visite le 10 avril au professeur Raoult qui annonçait une moindre virulence du Sars-covid2 et les résultats exceptionnels de son traitement à la chloroquine, aujourd’hui démentis. On dit même que le marseillais avait encore récemment l’oreille du président qui se souciait en priorité de l’activité économique.

Alors les réalités de l’épidémie ont douché les espoirs infondés de tous les « rassuristes » et ramené -sans doute un peu tard- le président à la raison. Terminés l’approche territoriale et le ciblage par zone (le vert, l’orange, le rouge, l’écarlate), terminé le traçage (tester, suivre, isoler, qui n’a  jamais vraiment été mis en œuvre efficacement), terminé Stop-Covid qui n’a jamais vraiment marché, terminé le couvre-feu…

Retour aux bonnes vieilles attestations de déplacement, à la recherche des quelques dérogations autorisées. Et aux contrôles policiers.

Mais l’inertie de l’épidémie qui continue sur sa lancée est telle qu’avant de décélérer sous l’action du confinement, le nombre des décès restera encore élevé. On observe un délai de 30 jours entre une contamination et le décès ; c’est parmi les positifs de cette fin octobre, qu’on comptera les morts de fin novembre. Pour la durée du confinement Thierry Crouzet, fin statisticien, estime la mortalité sur la période à 10 000, soit un mort toutes les 5 mn.

Les boomers coincés dans la bulle

Si Macron l’avait un moment évoqué, personne n’a osé mettre en avant un confinement spécifique des personnes vulnérables, âgées en particulier qui pourrait alléger les restrictions imposées aux plus jeunes. Personne n’a osé, pour diverses raisons.

  • Pour des raisons d’égalité citoyenne qui nous interdirait de soumettre une population particulière à un traitement discriminatoire, presque vexatoire.
  • Pour des raisons pratiques, car on voit mal comment isoler efficacement les séniors du reste de la population, du reste de leur famille.  

Or c’est quand même de ce côté qu’on peut espérer réduire les hospitalisations à venir. 85 % des hospitalisés ont plus de 60 ans L’âge médian des décès du Covid 19 s’établit à 84 ans. 

Alors on peut peut-être s’attacher à faire la promotion de pratiques efficaces pour tenir les plus âgés à l’écart des contaminations sans pour autant stigmatiser ces populations. C’est le sens d’une tribune de plusieurs universitaires parue dans Libération le 26 octobre dernier :

« Il est parfaitement possible, en effet, de donner les moyens effectifs aux personnes vulnérables, sur une base volontaire mais fortement recommandée :

• de rester chez elles grâce à des distributions à domicile de tout le nécessaire ;

• d’être relogées temporairement si elles vivent avec d’autres générations susceptibles de les contaminer ;

• si elles sont économiquement actives, de se mettre en télétravail ou en chômage partiel ;

• de circuler dans les espaces publics grâce à des mesures de prophylaxie généralisées et adéquates (distanciation, port du masque en intérieur ou en cas de forte densité…) et grâce à l’augmentation de l’offre des transports en commun, pour qu’une véritable distanciation soit possible ;

• de se retrouver en famille et entre amis de préférence en extérieur et munies des protections adéquates ;

• de bénéficier, en Ehpad comme à l’hôpital, d’un service optimal grâce à l’embauche massive et permanente d’un personnel suffisant et convenablement équipé, au lieu du sous-effectif structurel installé depuis des décennies dans ces secteurs. »

Je dois dire qu’avec Danièle, nous pratiquons déjà une forme d’auto-confinement. Nous avons cessé les activités -sportives, culturelles- collectives. Nous continuons à voir nos enfants et petits-enfants, nos amis, mais à petite dose et avec les distances recommandées.

Nous pratiquons en petit comité un qi-qong qui se veut quotidien et nous promenons le chien deux fois par jour. Nous avons la chance d’avoir un jardin et les soins du potager nous occupent aux beaux jours. Et nous passons beaucoup de temps devant notre ordinateur.

Le plus difficile c’est d’échapper à la morosité générale. Beaucoup parmi les plus jeunes enragent de ne plus faire la fête (même si les transgressions ne sont pas rares).
Les plus anciens font le compte du temps à vivre devant eux : combien de mois gâchés par cette épidémie, combien de projets annulés, reportés, combien d’énergie dispensée pour la seule préservation ?

Mais c’est le prix à payer pour notre survie, pour espérer voir grandir nos petits-enfants, pour pouvoir encore témoigner de notre expérience, pour découvrir encore tout ce que nous ignorons.

Salut les déconfinés – 9 –

À la Une

La seconde vague est en marche

 Avec 122 000 nouveaux cas par semaine, l’épidémie rejoint une croissance exponentielle et double ses effectifs en moins d’un mois. On est encore loin des pires semaines de mars où ça doublait en 3-4 jours, avec beaucoup de cas symptomatiques (puisqu’on ne testait que ceux-là).  La montée est plus lente, avec encore beaucoup d’asymptomatiques mais personne ne sait comment la situation va évoluer.

Du coup les coronasceptiques, les « rassuristes » comme on les a nommés, se font plus discrets.

Laurent Toubiana

Que dit maintenant le professeur Toubiana, persuadé de l’existence d’une immunité sous-jacente qui nous protégerait d’une hypothétique seconde vague ?
Que dit Jean-François Toussaint qui jugeait les chiffres de nouveaux cas faibles, voire en déclin, et surtout un nombre de malades négligeable ? : «Le nombre de décès quotidiens, on le voyait diminuer à partir du 7 avril, et donc on pouvait rendre l’espérance aux Français pour se dire, tiens, c’est en train de refluer, et nous sommes toujours dans cette phase de reflux, entre 20 et 40 décès par jour» déclarait-il le 11 septembre.

Didier Raoult

Et du coté de Marseille, c’est la mutation du virus qui le rendrait moins dangereux : Dans une vidéo datée du 22 septembre, le Pr Raoult résumait les choses ainsi : «Il existe différents mutants, actuellement, qui sont corrélés avec l’existence de formes qui sont moins graves, en termes d’hospitalisation, de réanimation et de mortalité. […] La sévérité de l’infection, la réponse inflammatoire, diminue de manière très significative dans cet épisode.» 

Mais le 6 octobre, devant l’évolution de la situation, sur CNews, le professeur marseillais se ravisait totalement : « là on a un nouveau variant dont les données préliminaires – on a analysé pour l’instant 70 cas -, semblent montrer qu’il est différent dans les manifestations cliniques du variant 1 qui paraissait vraiment banal. »
Sur sa dangerosité, le professeur répond « oui » mais il ajoute : « Je suis plus prudent que ça : les éléments qu’on a nous font penser qu’il n’est pas aussi banal ni bénin que ce que nous avons eu en juillet-août. » … on admire l’art du retournement.

De son coté le Docteur Nicole Delépine ne s’embarrassait pas de précaution dans une tribune en août : « Une épidémie terminée en France selon toutes les analyses des chiffres officiels de Santé Publique France : il n’y a presque plus de décès liés au covid (inférieurs à 20 par jour alors que les cancers en tuent 500 quotidiennement.
L’arrivée de la fameuse deuxième vague attendue comme l’arlésienne depuis 3 mois est compromise car le virus semble avoir muté et être devenu très peu virulent. Il donnera au mieux de bons rhumes comme les autres coronavirus (qu’on retrouve dans les tests aussi bien que l’actuel, ils sont cousins germains).

Jean-Dominique Michel qui s’était fait une jolie réputation sur Internet en incarnant un coronascepticisme souriant mais radical, est un peu embarrassé le 19 octobre :
« Nous vivons une période d’incertitude avec une sorte d’emballement. Certains chiffres s’envolent, d’autres progressent, avec certaines données et variables qui posent question.
Ce qui est sûr, c’est qu’il ne s’agit pas d’une deuxième vague. Si deuxième vague il y avait dû y avoir, elle se serait produite au déconfinement de mai, quand aucune des mesures imposées depuis n’était en vigueur.
Nous sommes face à un regain de diffusion du virus, certainement saisonnier, mais encore peu lisible… »

Gageons que les coronasceptiques qui ont enflammé les réseaux sociaux, laisseront peu de traces dans l’histoire sanitaire. L’important est maintenant de discerner l’évolution actuelle de l’épidémie.  

La différence principale avec la première vague, c’est l’existence massive de mesures de dépistages et de précautions qui sont déclinés maintenant dans tous les pays de la planète. Et chaque gouvernement hésite sur le point où poser le curseur. D’où des projections assez disparates. Le schéma ci-dessous (un peu ancien mais toujours d’actualité) l’illustre parfaitement.

Tout le monde a compris que les limites de tolérance de nos sociétés se situent aux limites de tolérance de notre système de santé, du nombre de places en réanimation particulièrement.
Le nombre de malades du Covid-19 actuellement en réanimation a dépassé ce lundi 19 octobre les 2000 personnes, un seuil qui n’avait pas été atteint depuis mai, selon les chiffres officiels, qui font en outre état de 146 morts en 24 heures. 
Au pic de l’épidémie, en avril, plus de 7000 malades étaient hospitalisés en réa, un nombre qui a fortement chuté jusqu’à fin juillet, avant de remonter progressivement.

Or il faut bien constater que la situation ne s’est pas améliorée en France depuis le mois d’avril. Malgré les engagements, il n’y a pas plus de lit en réanimation qu’au début de l’épidémie :

« On sent que le président a compris la gravité de la crise, mais il ne prend pas la mesure de la crise hospitalière. Et on doit paralyser le pays parce que les hôpitaux manquent de lits« , a réagi le 14 octobre Patrick Pelloux (Président de l’association des médecins urgentistes) auprès de l’Agence France-Presse suite à l’annonce du couvre-feu.

 Pas assez de lits, c’est surtout pas assez d’infirmières et ce ne sont pas les augmentations du Ségur de la Santé (90 € au 1er septembre,  puis au 1er mars 2021 avancé à la fin de l’année finalement)  qui attireront de nouveaux candidats. Trop peu, trop étalé dans le temps.  

Et puis le virus est partout sur le territoire. Pas question de déshabiller une région pour regarnir une autre.

Et puis une stratégie de dépistage chaotique qui ne permet plus de remonter la chaîne des contaminations.  Les « clusters » identifiés ne représentent plus qu’un quart des cas positifs. Les trois quarts sont diffus dans la population.

Alors dans ce cas, on comprend que les autorités n’ont pas eu d’autre choix qu’adopter les mesures les plus sévères (couvre-feu…) avant le confinement général. Vingt millions de Français condamnés au triptyque Métro/boulot/dodo !

Les seniors à la retraite comme moi et nos proches ne s‘en plaignent pas trop. Mais quel gâchis pour la société dans son ensemble !

  • Il n’y a pas que le Covid dans la vie, suivez nos aventures en Camping-Car dans le midi et nos mésaventures face au promoteur qui démolit notre quartier : Les mots justes , le blog de Danièle

Salut les déconfinés – 8 –

À la Une

On dirait le sud !

On nous dit qu’avec le changement climatique, il faut s’attendre à une modification de nos paysages, qu’un jour les alentours de Lyon ressembleront à ceux de Madrid aujourd’hui.
Cette semaine passée à Chabeuil, à une heure de chez nous, au milieu de cette petite canicule de septembre, m’a donné comme un avant-goût de ce glissement vers le sud. En parcourant ces espaces péri-urbains, à distance de la vieille ville sur son piton, ces bâtisses anciennes à l’allure quasiment coloniale, ces jardins grillés me rappelaient le midi de mon enfance et peut-être plus loin vers le sud, l’Andalousie, les quartiers européens du Maghreb…

Les palmiers sont courants et même cet agave mexicain au coin d’une terrasse:

Les clôtures occultantes protègent de la vue mais aussi de la chaleur qu’elle reflètent grâce à leur blancheur agressive.

Mais toutes les villas ne sont pas pimpantes. Le temps, l’absence d’entretien ont fait leur oeuvre :

Sans compter ces espaces délaissés où s’entreposent toutes sortes de matériaux à l’abandon :

C’est dans le camping où nous logeons, à deux pas du centre ville. Une bonne part des emplacements sont occupés à l’année par des familles qui y ont installé leur domicile, grâce aux commodités modernes : électricité, eau courante, eaux usées, à l’ombre de platanes centenaires;

Credit photo Danièle Godard-Livet

Chabeuil ne cesse de s’étendre, de construire de nouveaux lotissements pour des exilés de la ville voisine Valence qui se dépeuple. Les champs, les terrains vagues, les bâtiments agricoles sont promis à l’oeuvre des promoteurs.

Cette vieille grange, située rue des Alexandrins va rejoindre les constructions disparues de ce « clos des Poètes ».

Le dernier en date des lotissements. Un bel ensemble encore en peine croissance . Des maisons individuelles et des petits immeubles collectifs au bord de la Véore, qui serpente à coté, encore en eau malgré la sécheresse.
Qui a dit que les petites villes n’avaient plus d’avenir ?

Salut les déconfinés -7-

À la Une

Etrange épidémie !

Non contente de semer la panique d’un bout à l’autre de la planète, d’envoyer au cimetière 800 000 terriens à ce jour, cette épidémie excite les esprits et transforme les plus placides en passionaria (ou -o) d’un camp ou d’un autre.

J’en sais quelque chose, vu que je suis placé entre deux types de combattants opposés, de quoi craindre les balles perdues. Tous les deux sont retraités et ont passé depuis plus ou moins longtemps les soixante ans.
 Commençons par Philippe, qui habite Venise depuis toujours (enfin presque, je l’ai connu aussi dans sa vie française). Au moment où tout le monde parlait de « grippette » en France, c’est grâce à lui que l’épidémie a pris, à nos yeux, un peu de consistance, une vraie réalité jusqu’à ce que nous annulions début Mars notre voyage vers la Sérénissime.

Philippe a survécu dans une Vénétie confinée parmi les premières régions d’Europe.  Pendant toutes ces semaines, il a tenu sur Tweeter une chronique régulière des chiffres italiens présenté par la protection civile. Dans un appel adressé à ses amis français, il s’inquiétait de l’insouciance qui régnait encore chez nous où l’épidémie observait un retard de 8 jours par rapport à l’Italie du Nord 

RESTEZ A LA MAISON !!! tel était le message qu’il martelait sur son blog, sur les réseaux sociaux.

Au moment du déconfinement, Philippe n’a pas quitté son attitude inquiète face à l’épidémie. A chaque relâchement programmé des mesures de protection, il s’insurgeait devant cette hâte coupable des autorités.  Il a ainsi refusé cet été de rejoindre son épouse en France, vu les mauvais signes de reprise de l’épidémie de ce côté des Alpes.

Jean se trouve à l’opposé. Cet ami de quarante ans est viticulteur, on se voit aux vendanges et puis sur Facebook.

Comme beaucoup d’agriculteurs qui ont pu continuer à se déplacer, à travailler leurs champs, il n’a pas été personnellement gêné par le confinement. Mais il s’inquiétait des restrictions qui pesaient sur son activité : annulation des foires au vin, fermeture des bars et restaurant, exportation en berne du fait des taxes imposées par Trump sur les vins français. Il n’a pas tardé à se rapprocher des coronasceptiques contre la « dictature sanitaire » et au nom des libertés fondamentales, partageant sur Facebook les publications de Jean-Dominique Michel puis celle du Professeur Raoult, recommandant la lecture de son livre. Le point commun : l’épidémie n’est pas si grave, elle est appelée à disparaître, les autorités en profitent pour restreindre les libertés, le système politico-médico-médiatique s’acharne à discréditer le seul traitement efficace : la Chloroquine !

Entre les deux, nous observons les jeunes dans notre entourage, qui se soucient fort peu des querelles académiques. Vaille que vaille, ils se sont soumis avec difficulté aux restrictions du confinement. Maintenant, ils attendent impatiemment de pouvoir reprendre leur liberté, bouger, voir leurs amis, faire la fête ….

Alors c’est vrai que cette épidémie (et surtout la reprise actuelle en Europe) ne fait rien pour clarifier nos débats :


 Des contaminations en hausse rapide, qui contrastent avec des hospitalisations stables voire en légère augmentation. Des jeunes, asymptomatiques (la moitié des cas) sont détectés grâce à des tests enfin nombreux, ils ont peu de risque de développer des formes graves. Rien à voir avec la situation de février-mars !

La situation donne un avantage aux tenants de la thèse de la disparition de l’épidémie. Même si leurs arguments n’en sont pas plus convaincants. Peu importe qu’on évoque la saisonnalité, l’immunité collective, les mutations d’atténuation ou l’adoption d’un traitement miracle, aucune de ces hypothèses n’a, à ce jour, bénéficié de preuve recevable, voire définitive.

Du coté des autorités, on craint le pire pour la suite, les cas positifs donneront inévitablement les hospitalisations de demain et les décès d’après-demain. Taxés de cécité et d’impréparation en Mars, ils ne voudraient pas se laisser surprendre par une reprise incontrôlée de l’épidémie et multiplient les mesures parfois excessives.

Ce resserrement des restrictions peut apparaitre décalé par rapport à une situation où les menaces sont encore vécues comme abstraites.

Les querelles n’ont pas fini de prospérer… l’avenir seul les départagera à condition que chacun s’astreigne à juger des faits et non à rechercher à tout prix confirmation de ses opinions.

Salut les déconfinés -6-

À la Une

Certaines théories scientifiques sont invoquées par les coronasceptiques.

Le corona-scepticisme est une opinion. Elle s’appuie parfois sur l’une ou l’autre des interrogations scientifiques sur le virus et le développement de l’épidémie.
A un moment où le conseil scientifique s’inquiète d’une probable seconde vague dans les semaines à venir, diverses thèses viennent alimenter le doute ou la révolte des anti-mesures sanitaires , au-delà des critiques légitimes de la gestion politique de l’épidémie.

L’épidémie est en train de disparaître : Le professeur Raoult ne disait pas autre chose dès le 14 avril. Maintenant, après 30 000 décès, il n’est plus aussi affirmatif !

D’autres médecins mettent en avant la baisse des cas positifs (et encore il pourrait s’y cacher beaucoup de faux positifs) et surtout la baisse, voire la disparition des cas mortels. Le docteur Nicole Delépine, dans une tribune parue le 31 juillet  dans le Parisien  y voit le signe d’une disparition de l’épidémie.

et le règne de « la propagande de la peur ». Comment le virus est -il amené à sa fin, selon quels mécanismes biologiques ? Mystère !

Alors, comme la prédiction n’est pas fondée sur des éléments explicatifs, il n’y aura qu’un juge de paix pour la réfuter : les chiffres des jours suivants qui pourraient annoncer le rebond de l’épidémie.

Le virus est saisonnier

Le virus pourrait disparaître avec le retour des beaux jours mais pourrait revivre avec l’hiver.

La diffusion du virus sous toutes les latitudes permet maintenant de mettre en doute cette théorie : le virus flambe simultanément dans l’hémisphère nord en plein été (cf les USA) ainsi que dans l’hémisphère sud en plein hiver (cf le Brésil). Difficile d’espérer une disparition estivale même si la diffusion du virus a considérablement ralenti.

L’immunité collective

 Pour l’instant le nombre d’individus ayant contracté le virus et ayant acquis sans doute une immunité est estimé aujourd’hui en France à 10% par le conseil scientifique.
 Tout le monde s’accorde à dire qu’un jour, la proportion de personnes ayant contacté le virus, et ayant développé une immunité, sera suffisante pour stopper sa diffusion. Les épidémiologistes de l’Impérial College de Londres l’avaient fixé à 70%. Mais que se passe-t-il, si l’on ne prend aucune mesure sanitaire, avant d’atteindre ce seuil ? Eh bien pas mal de morts : 250 à 500 000 morts annoncés au Royaume uni qui, finalement, a changé de doctrine.

Une autre thèse met en avant le fait -incontestable- que parmi les individus infectés, certains ne donnent lieu à aucun nouveau cas par contagion, alors que d’autres sont des « superspreaders » des supercontamineurs qui contaminent des dizaines de personnes, sans doute du fait d’une particularité biologique ou d’une pratique sociale très extravertie. Il est donc difficile de parler d’un R0 (« le taux de reproduction ») homogène. Ce R0 effectif peut aussi évoluer selon le stade l’épidémie. Le seuil d’immunité peut donc se situer plus bas que les 70 %, peut-être autour de 25 %. Même avec cette hypothèse, on est loin actuellement en France de s’en approcher.

C’est néanmoins le pari qu’a adopté la Suède, sous l’impulsion de l’épidémiologiste en chef, Anders Tegnell, en renonçant à la perspective de mesures sanitaires fortes. Les lieux publics sont restés ouverts, la population libre de ses mouvements et sans masques.

Les parcs publics à Stockholm en mai

Résultat : beaucoup de morts (560 par million d’habitants), mais moins que la Belgique, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne et un peu plus que la France (450 par million), avec une baisse plus tardive comparée aux autres pays européens ayant confiné.

Les mutations du virus

Certains commentateurs ont pu espérer qu’au fil des mutations le virus pourrait devenir moins agressif. C’est ce qu’on avait dit au sujet de la grippe H1N1 dite grippe porcine qui s’était révélée moins virulente que prévu. Et c’est ce que prédisaient certains optimistes pour l’épidémie COVID 19.

Hélas ! Pour le coronavirus Sars-CoV-2, c’est une autre affaire. On sait qu’il mute sans cesse, mais pas pour s’atténuer. La mutation D614G, est pointée par le laboratoire national de Los Alamos : mieux adaptée, plus contagieuse, mais pas plus mortelle, elle serait apparue en Europe dès Février.

Un recul improbable de l’épidémie

Nous avons vu que les théories sous-jacentes aux pronostics optimistes ne permettent pas de les valider. Elles sont l’occasion pour de nombreux commentateurs de dénoncer une soi-disant dictature sanitaire et de refuser les mesures de distanciation sociale et les gestes barrière.

N’écoutons pas ces faux prophètes qui affaiblissent nos défenses face à une deuxième vague hélas bien probable.

Personnellement, mon choix est fait : Faisant partie de la population à risque, je maintiens mes distances vis-à-vis de ceux, plus jeunes, qui ne craignent pas de s’exposer et je garde mes protections.

*Spécial Beyrouth : Les libanais ont tout eu : la crise économique, le COVID et maintenant cet accident format XXXL. On a vérifié la situation de nos amis là-bas, de notre famille : Ils vont bien !
Place maintenant à la solidarité : Fondation de France Solidarité Liban

Un seul cadeau qu’on ne peut leur amener à leur place : Une démocratie débarrassée des clans et des confessions et une bonne gouvernance !

Salut les déconfinés – 5-

À la Une

Face à l’épidémie, on est loin du consensus !

Au-delà de l’insouciance des vacances, désirée pour beaucoup, redoutée pour les autres qui craignent l’envolée des contaminations, tout le monde s’interroge sur les semaines qui nous attendent. Et nous avons peu d’éléments pour imaginer la suite, à moins de consulter des voyantes. Alors écoutons « les spécialistes, les scientifiques, plus généralement les penseurs » qui vont nous montrer le chemin.

Hélas ! Si les scénarios de prudence l’emportent dans les milieux scientifiques et sont respectés majoritairement dans l’opinion publique, il ne manque pas de voix dissonantes. Les corona-sceptiques sont nombreux.  Essayons d’en faire l’inventaire : Rappelons-nous, début mars : l’épidémie commence à flamber en Italie qui confine des régions au Nord puis dans tout le pays ? Le 17 mars, le confinement est décrété en France.

Dans le même temps le professeur Raoult annonce la fin de partie pour le virus. Sans oublier de vanter les mérites de son traitement, le célèbre infectiologue annonce la fin de l’épidémie :
“Pour nous, l’épidémie est en train de disparaître progressivement.” Voilà comment débute la vidéo du 14 avril publiée par le directeur de l’IHU Méditerranée, à Marseille, au sujet de la propagation du coronavirus dans la ville. 
“Il est possible que d’ici quelques semaines, il n’y ait plus de cas”, poursuit le docteur controversé, dont le président de la République Emmanuel Macron a vanté les mérites le mercredi 15 avril. “C’est assez banal”, ajoute-t-il évoquant la perspective de la disparition de l’épidémie au printemps, ce qui arrive avec certains virus.



Une autre voix le rejoint de Suisse cette fois : Jean-Dominique Michel et son blog qui est repris abondamment sur les réseaux sociaux, Il n’est pas épidémiologiste, infectiologue ou virologue, ni même médecin ou universitaire. Il se présente comme anthropologue de la santé, en fait il est juste titulaire d’un “diplôme d’études supérieures” en provenance d’une certaine “Psycho-Physics Academy” de Londres, complété par d’autres formations (bio-généalogie, coaching, théologie). Il ne dispose pas de position institutionnelle centrale mais gravite depuis longtemps dans le monde de la santé.
Jean-Dominique Michel est par ailleurs secrétaire général de l’association Pro Mente Sana, fondateur d’un institut de neuro-coaching et auteur d’un livre sur les médecines alternatives, auxquelles il dit s’être converti à la suite d’une expérience personnelle auprès d’un chamane philippin. Il a monté sur ces bases un prospère business de caoching.
Selon l’auteur l’épidémie a été surestimée, les autorités sanitaires en ont profité pour imposer des mesures liberticides. Il évoque une « hallucination collective »
Un site d’information suisse a bien résumé ses positions.

Certains penseurs ont pris position contre la « dictature sanitaire ».

Bernard Henri Levi parcourt les plateaux télévision en serrant ostensiblement les mains en dépit des recommandations.« Une vague de crétinisme et d’ignorance a déferlé sur le monde» . C’est ainsi qu’il analyse la réaction de nos sociétés face à ce « virus qui rend fou ».

Henri Comte-Sponville s’insurge contre le « tout Covid ».

Pour le philosophe, « il faut d’abord se rappeler que l’énorme majorité d’entre nous ne mourra pas du coronavirus. J’ai été très frappé par cette espèce d’affolement collectif qui a saisi les médias d’abord, mais aussi la population, comme si tout d’un coup, on découvrait que nous sommes mortels. Ce n’est pas vraiment un scoop. Nous étions mortels avant le coronavirus, nous le serons après ». « La tendance existe depuis déjà longtemps à faire de la santé la valeur suprême et non plus de la liberté, de la justice, de l’amour qui sont pour moi les vraies valeurs suprêmes. » 

Et puis c’est du côté des politiques qu’on trouve les meilleurs corona-sceptiques.

Trump pendant des mois n’a cessé de relativiser l’épidémie, organisant des grands rassemblements sans aucune précaution. Mais devant la croissance incontrôlable du nombre de mort dans son pays, s’est finalement rangé du côté des précautionneux en recommandant le port du masque.
De son côté, Bolsonaro, malgré sa contamination, n’a pas cessé de défier les règles de distanciation sociale et de combattre les mesures de santé publique.

Une partie de la population, surtout aux USA, refuse les mesures de santé publique pour des raisons idéologiques ou politiques.

Une manifestation anti-confinement dans le Michigan avec des armes : photo

Le corona-scepticisme est une opinion. Elle s’appuie parfois sur l’une ou l’autre des interrogations scientifiques sur le virus et le développement de l’épidémie. Dans un prochain post nous tenterons de faire le tour des diverses approches.

Salut les déconfinés -4-

À la Une

Le tour du Sancy en quatre jours et en camping-car

Depuis le déconfinement, nous avions dans l’idée de respirer l’air des sommets auvergnats, mais de nombreux travaux à la maison et sur notre camping-car, nous avaient fait différer notre projet.

Mercredi 15 juillet nous prenons la route par temps gris pour joindre Aydat et son aire de camping-car superbement aménagée en limite de zone humide au bord du lac propice à l’observation des oiseaux et autres éléments de la biodiversité. Nous y avions fait un séjour agréable en octobre 2014.   Après une difficile traversée d’Aubière pour cause de fermeture de la jonction A89-A75 nous arrivons à destination. L’aire (payante) est plus chargée qu’en automne, mais il reste des places. Pas un seul oiseau, hormis les canards cols-verts qui se moquent du mauvais temps.

Jeudi 16 juillet il fait toujours très gris et frais. Après l’invite d’un animateur d’exploration de la zone humide et un rapide (demi) tour du lac, nouvelle petite incursion en zone humide où je vois un ragondin (petit).

La zone est bien aménagée avec des cheminements de planches au-dessus de l’eau et de la végétation aquatique . Et de nombreux postes d’observation, peu utiles en cette période , les migrateurs sont déjà passés. J’avais repéré le héron et je peux indiquer son emplacement à l’animateur qui termine sa promenade avec le groupe de 20 personnes, dont de nombreux enfants… qui se moquent de voir le héron. En début d’après-midi nous décidons de lever le camp et d’aller voir plus loin et plus haut.

En route donc pour la vallée de Chaudefour, réserve naturelle, haut lieu des botanistes clermontois et promenade appréciée depuis le XIXe siècle comme en témoigne le tableau d’un peintre russe exposé au musée de St Petersbourg.

Il y a tant de voitures garées dans le modeste parking que nous renonçons et nous garons un peu plus loin au milieu des prés et des vaches. Une grand-mère et ses deux petits enfants (8 et 10 ans) tous munis de jumelles observent un milan royal (ci-dessous) posé dans une prairie fauchée.

Le rapace n’est pas pressé; j’ai même le temps de régler le zoom et de le saisir dans son envol. Les enfants nous montrent aussi des bruants jaunes et des torcols ! Repérés grâce à leur jumelles de qualité mais aussi à l’acuité de leurs yeux tout jeunes. Jamais je n’ai vu des enfants aussi calés en ornitho qui font la différence entre le bruant jaune et le bruant zizi et vérifient dans le guide !

Il fait toujours très gris et on ne voit pas grand-chose de la vallée de Chaudefour. Les nuées s’accrochent dans les hauteurs. Parfois, sur les sommets,  la Dent de la Rancune apparaît à travers le brouillard qui la cache très vite à nouveau.

Vendredi 17 juillet. Il fait toujours gris. Nous partons très tôt à l’assaut du circuit de la vallée de Chaudefour. Quelques camping-caristes ont dormi sur le parking vidé par la nuit. Très vite nous sommes rejoints par de nombreux randonneurs. Le chemin est bien aménagé, la hêtraie et la sapinière d’épicéas splendide. Arrivés à la source ferrugineuse, il est évident que le temps ne se lèvera pas et qu’il y aura bientôt un monde fou. Il est temps de lever le camp.

Direction Super-Besse pour prendre de la hauteur. Un arrêt à Besse, et une visite du centre-ville moyenâgeux nous fait découvrir une vieille cité commerçante sans doute très prospère qui se préparer à une foire touristique de grande ampleur pour le week-end.

Les parkings pour camping-car ne manquent pas à Super-Besse ! Le village manque de charme malgré son grand lac.

Urbanisme de station à la mode des années 70, certaines constructions comme cette tour de 15 étages au bord des pistes ont de quoi choquer. Beaucoup de logement gardent leur volets fermés. Mais l’affluence des familles , souvent venues pour la journée, est le signe d’un tourisme d’été qui va bon train. Différentes activités de glisse sont proposées autour des quelques remontées mécaniques qui fonctionnent : nous n’empruntons pas la Tyrolienne, pas plus que nous ne louons un kart ou un VTT pour descendre les pentes. Ça a l’air réservé aux enfants d’ailleurs.
La grisaille et le froid persistent. Cela fait trois jours que Norbert m’annonce en vain le retour du beau temps. Aujourd’hui il est frigorifié et se réfugie à l’intérieur du camping-car.  Je suis plus couverte que lui et je vais par les prés jusqu’à la chapelle de Vassivière. C’est plein de fleurs.

Samedi 18 juillet. De premiers signes de ciel bleu apparaissent dès le lever du soleil.

Nous partons pour le lac Chauvet par le col de Geneste. Planèzes en fleurs splendides et une maison isolée sur une butte. A 1400m d’altitude, sur une butte soumise aux vents d’hiver, au gel, à la neige, cette construction du siècle dernier qui n’a rien d’une bergerie d’estive, ne manque pas d’attirer notre curiosité.

Plus bas, le lac Chauvet est charmant, à fleur de terre, très bleu, encadré par les molles ondulations des prairies d’élevage.

Les nuages courent dans le ciel. Un papa initie son fils à la pause longue avec pied et filtres… pour saisir un filé sur les nuages ? Mais le lac est propriété privée et le propriétaire de l’unique maison surveille les promeneurs. Pas question de s’installer.

À Picherande, petites courses. Nous nous mettons en quête de Saint-Nectaire après avoir vu un panonceau annonçant la vente à la ferme du précieux fromage. Un brave homme occupé dans son potager à qui nous demandons notre chemin nous prévient : il y a pénurie de Saint-Nectaire, ce qu’il m’explique par « trois causes combinées » :

– la sècheresse de l’an dernier dont les vaches ont souffert

– le printemps très précoce qui a rendu l’herbe rapidement trop dure et la covid 19 qui a contraint les producteurs à trouver d’autres modes de commercialisation puisque plus personne ne venait à la ferme

– l’afflux des touristes au moment du déconfinement.

Effectivement, il n’y a plus aucun Saint-Nectaire dans les fermes. Nous ferons deux tentatives avant d’abandonner. A chaque fois nous croisons des touristes à la recherche du stock caché. Du jamais vu pour une production fromagère qui a su maintenir et développer les exploitations laitières et amener un peu de prospérité dans ces territoires difficiles grâce à une bonne gestion de l’appellation protégée.

Nous terminons la journée au bord du plan d’eau de La Tour d’Auvergne et une petite promenade par un chemin creux et ombragé à la vieille église de St Pardoux, classée monument historique et en pleine rénovation.

Dimanche 19 juillet retour par l’A89 et l’A 71. Nous quittons la très verte Auvergne pour retrouver les prairies desséchées des Monts du Forez et des monts du Lyonnais.

En prenant de l’essence chez Leclerc, nous rencontrons nos amis Jean François et Colette qui partent manger chez Marcon (une table réputée) à Sauzet le froid. Décidément l’Auvergne a la côte cette année.

Salut les déconfinés -3-

À la Une

L’épidémie sous contrôle ? Ou pas ?

Après deux mois de confinement, un déconfinement très prudent, tout le monde se détend désormais. Où passer ses vacances ? Où trouver une plage ? Où faire la fête ?

Même de modestes fêtes de famille sont l’occasion d’embrassades, de bises qui claquent. Sauf une bonne partie de ceux qui, comme moi, ont dépassé les 65 ans qui se retrouvent un peu à contre-courant, cherchant à éviter les rapprochements excessifs. Ils savent -on leur répète dans tous les médias – que 90% des décès concernaient les plus de 65 ans (85% des cas mortels pour les plus de 70 ans). Les plus jeunes peuvent donc logiquement se permettre l’insouciance après les lourds sacrifices du confinement.

Et pourtant les autorités rappellent que le virus est toujours présent et que les gestes barrière sont toujours indispensables.
Nos gouvernants sont-ils vraiment exemplaires ?
Si quelques masques apparaissent à l’assemblée nationale : ici JM Blanquer et Jean Castex.

En revanche, finies les précautions, lorsqu’il s’agit de se rapprocher, montrer son affection, ses émotions vraies ou feintes, lors de la passation de pouvoirs du nouveau gouvernement.

L’exemple ne viendra pas de nos dirigeants. Alors écoutons les scientifiques :

 Le conseil scientifique ne cache pas son inquiétude, teintée d’une pointe d’exaspération. «On est frappé de la dissociation entre la connaissance des Français que le virus continue de circuler et le relâchement profond sur les mesures de distanciation sociale», déplore son président, Jean-François Delfraissy. Lors d’un «point d’étape» mercredi, alors que prend fin le 10 juillet en métropole l’état d’urgence sanitaire, plusieurs membres du conseil mis en place pour éclairer l’exécutif dans la gestion de la crise sanitaire ont tenu à marteler l’importance des gestes barrières.

En Mayenne l’épidémie connaît une progression inquiétante. Une vaste campagne de dépistage est mise en oeuvre. La Bretagne, PACA repassent dans le rouge.

L’alarme a été entendue par nos dirigeants : E. Macron annonce le port du masque obligatoire le 1er août. Pourquoi le 1er Août si c’est une mesure adaptée à une situation qui devient urgente ? Quelques jours plus tard, le premier ministre Castex rectifie le tir : ce sera finalement à partir du 20 juillet. Alors n’oublions pas les masques dans les endroits confinés (commerces, services publics, réunions) , mais aussi à l’extérieur quand les distances ne peuvent être respectées.

Mais au-delà de la perspective à court terme, on s’interroge : devra-t-on reconfiner d’ici quelques semaines comme dans la région de Barcelone, dans la région de Lisbonne ou dans un canton en Allemagne ?
Aux USA, pourtant confrontée à un redémarrage violent des décès, Donald Trump annonce inlassablement la fin proche de l’épidémie. Que se passera-t-il d’ici l’hiver ? Dans un prochain post nous ferons le tour des différentes thèses en présence

Salut les déconfinés – 2-

À la Une

Déconfinement en Haute Azergues

Retrouver d’un seul coup sa liberté de mouvement (même dans la limite des 100km) peut s’avérer déstabilisant pour certains. Ainsi en Espagne, les médias ont identifié des troubles mentaux qui touchent certains déconfinés devant une difficulté à sortir, une angoisse dans les lieux ouverts, une hésitation à rencontrer leurs proches. Ils ont baptisé cette situation du joli nom de « syndrome de la cabane », en référence à l’aspect protecteur qu’on peut trouver à son logis habituel.
Après deux mois de confinement, nous avons trouvé la transition idéale pour échapper au traumatisme de la liberté : notre « cabane » s’est transférée sur les 4 roues de notre Camping-car.
Et où trouver un dépaysement suffisant dans les 100km autour de chez nous ?

Privés par deux fois ( une grève, puis la Covid19) du voyage en train Lozanne-Paray-le-Monial, en remontant la vallée d’Azergues où nous habitons, nous avons ainsi décidé de le faire en Camping-Car dès l’annonce du déconfinement pour approcher les ouvrages d’art de la ligne et explorer les multiples vallées, vallons, versants, croupes et cols de cette Haute Azergues.

Première étape : Chambost-Allières, nous nous posons au premier parking au dessus de la vallée, juste à côté du village de Chambost. C’est ensoleillé et très venté. Les agriculteurs font les foins : fauchent, andainent , enroulent, transportent, enrubannent.

Des milliers de fleurs couvrent les bords de chemin.

Danièle ramasse un énorme bouquet qu’elle porte religieusement jusqu’à la fin de notre périple.

Deuxième étape : l’autre versant de la vallée, de Grandris à Cublize, ce ne sont que bois de douglas serrés et routes tortueuses. Ici la forêt assombrit tous les versants. C’est une forêt exploitée, les coupes sont nombreuses.

Le lac des sapins est bien décevant et interdit (à cause de la Covid19) de toute façon. Nous rejoignons la vallée d’Azergues par Ronno, charmant vallon agricole, et faisons étape pour la nuit au col de la Croix de l’Orme. Chants des grenouilles des étangs en contrebas, vol de hérons, terre préparée pour le maïs. la route croise une piste de trail : cyclistes, marcheurs, motards équipés pour l’aventure extrême.

La voie ferrée n’est pas très intéressante dans cette portion et nous ne la rejoignons qu’à Lamure d’Azergues (qui offre aussi l’avantage d’une très belle station de vidange pour camping-car proche de la gare). Cap sur St Nizier d’Azergues et Claveisolles, site de la fameuse boucle de Claveisolles. Un tunnel au tracé hélicoïdal qui lui permet de gagner 43 m sur la pente.

Repas à la gare de Claveisolles, pimpante mais désaffectée. Pas de train non plus, le service est encore assuré par car dans cette période de déconfinement.

Troisième étape : nous repassons de l’autre côté de la vallée d’Azergues pour gagner Ranchal, au milieu des bois. Halte pour la nuit à Notre Dame de la Rochette, immense sanctuaire à la vierge. Entre forêt épaisse et coupe à blanc, on observe les traces du travail des débardeurs, et on se félicite de ne pas rencontrer de camions grumiers sur la route étroite.

L’exploration ne serait pas complète sans un arrêt à Poule-les Echarmeaux où la voie s’enfonce dans un très long tunnel (4153 m, le plus long de toute la ligne) pour ressortir côté Bourgogne. De quoi éviter les fortes déclivités du col des Echarmeaux (712 m) , dernier obstacle avant de redescendre vers la Saône-et-Loire et Chaufailles.
Il nous faut bien longtemps pour trouver la gare, les deux hôtels de la gare (désaffectés) et l’entrée du tunnel. Un sculpteur a élu domicile en face d’un des hôtels, près de l’autre un immeuble de logements, au milieu de nulle part, mais avec de très beaux potagers bien entretenus.

Quatrième étape : allons-nous jusqu’à Monsols ou rejoignons-nous le beaujolais viticole ? C’est un peu tôt et une erreur d’orientation nous conduit à nouveau au-dessus de Claveisolles. C’est l’occasion de voir l’ancien immense couvent qui eut de beaux jours au XIXeme siècle mais est désormais repris par l’Opac et promis à un autre avenir.

C’est au col de la Casse froide que nous trouvons abri sous un tilleul majestueux pour le repas. Un paysan épand son fumier et le vent nous apporte l’odeur que nous jugeons moins dangereuse que celle des épandages phytosanitaires. On devine le Mont-Blanc mais le temps n’est pas assez clair.

Nous partons pour Monsols, mais nouvelle erreur d’orientation et c’est sur la route du Vernay que nous nous retrouvons, à flanc de côteau. Face au Mont-Blanc (toujours aussi peu visible) le village expérimente la route solaire !

Cette fois nous redescendons côté vignes, mais pas trop vite, à flanc de côteaux entre vignes et forêts (de feuillus) en passant par les cols de la croix de Marchampt et celui de la Croix Rozier. C’est étroit, tortueux et sans véritable découverte à l’exception d’un étrange dépôt de camions abandonnés au col de la Croix Rozier. Les vignes montent à l’assaut des collines vertes .

On descend et ce ne sont que vignes et vignerons traitant leurs vignes jusqu’à atteindre Denicé où nous mangeons chez Mathias (le bar du village fait des pizzas à emporter).

Salut les déconfinés -1-

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Economie : c’est reparti ?

Rappelons-nous : au lendemain du confinement installé le 17 mars, chacun se faisait une idée de la fin de ce mauvais passage. Ainsi le déconfinement nous ramènerait nos libertés d’aller et venir, de travailler, de fréquenter nos lieux collectifs, de voir nos amis, de partir en vacances … On connaît la suite : comment ces espoirs ont été largement relativisés par la réalité de l’épidémie.

Pour l’économie ce fut un peu pareil. Le déconfinement donnerait le signal du redémarrage de l’économie qui avait été en grande partie préservée par les mesures de soutien aux entreprises, de maintien des salariés grâce au chômage partiel… L’économie était sur pause, il suffisait de basculer sur Play pour que chacun retrouve son activité. Mais plus l’échéance se rapprochait, plus on prenait conscience que ça risquait d’être plus compliqué.  

Redémarrage : Pourquoi ce n’est pas si simple

Il faut bien se rendre à l’évidence : le virus est présent et restera présent pour un bout de temps. Si on veut éviter une seconde ou une troisième vague qui pourrait submerger de nouveau le système de santé, il faudra maintenir un dispositif important de précautions. Les restaurants, les discothèques, les concerts ne sont pas près de réouvrir. Et dans de nombreux secteurs les mesures de protection sanitaire s’opposeront à une pleine activité.  

Et puis ça dépendra des décisions individuelles des entrepreneurs, des salariés, des clients, des syndicats, de la justice. Autant il suffisait au moment de la mise en place du confinement de quelques décrets et des gendarmes postés aux carrefours, autant le redémarrage de l’économie est le résultat d’une multitude de variables souvent imprévisibles.

Les fabricants de bière ne peuvent reprendre leur pleine activité que si les bars, les restaurants, les concerts et les apéros entre amis réamorcent la demande. En attendant ils se demandent si une partie de la production ne devait pas partir aux égouts ou à la distillation.

Certaines entreprises ont une grande difficulté à organiser un process de production respectueux des gestes barrière. C’est ainsi qu’Amazon, contraint de fermer par décision de justice à la demande de la CFDT, a d’elle-même suspendu momentanément son activité en France.

A Renault Sandouville, les syndicats majoritaires (Force Ouvrière, la CFE-CGC et la CFDT) étaient en train de mettre au point un accord avec la direction pour une réouverture en toute sécurité, lorsque la CGT (un tiers des voix aux élections professionnelles) a obtenu une décision de justice (sur un défaut dans la consultation obligatoire) pour annuler la reprise. Dans bien des entreprises, la CGT, parfois à raison, en face de risques réels, parfois en application d’une ligne politique, risque de tout faire pour s’opposer à la reprise d’activité.

Mais il n’y a pas que des incertitudes. Pendant la crise un certain nombre de secteurs ont bien résisté, ou même progressé. Les services publics de base (gestion des déchets, propreté, sécurité) n’ont pas flanché. Les industries de réseau : l’eau, l’électricité, les fournisseurs internet ont assuré. Les GAFA et autres Netflix ont tiré avantage du confinement. Plus généralement le numérique s’est introduit dans tous les process de travail avec le télétravail et les services à distance. Bref, les 65% d’activité (73% en avril) assurés tout au long du confinement sont restés solides, loin de l’idée d’effondrement généralisé chère aux collapsologues. 
Mais que se passera-t-il pour les 35% (27% en avril) restants ? Beaucoup d’inconnues président au redémarrage. 

Anticiper en zone d’incertitude

Du coup, peu d’économistes se hasardent à faire des pronostics : Reprise rapide en V, stagnation durable en L …

Alors il n’est pas interdit aux économistes amateurs de faire leurs prévisions. Les miennes, en l’occurrence : A court terme, l’économie est sous la férule de l’évolution de l’épidémie. De la permanence de sa virulence dépendra la reprise qui pourrait subir un effet persistant des précautions sanitaires.  Au-delà, à moyen terme il n’y a pas de raisons que les affaires ne reprennent pas à un bon rythme, malgré certains secteurs durablement touchés comme le transport aérien, l’industrie du tourisme et celle du spectacle. En effet les habitudes de consommation dans ces domaines auront du mal à se rétablir ou à trouver un nouveau modèle.
 Il est, hélas, certain que les inégalités devant l’emploi vont se creuser et que les précaires seront les premières victimes d’une hausse prévisible du chômage

Et puis, le « monde d’après » ne pourra faire l’économie d’un examen de son développement. Quelles sont les activités essentielles ? Quelles sont les activités inutiles, voire nuisibles. Il faut notamment arrêter d’investir dans les énergies fossiles au profit de la transition énergétique. 

Salut les confinés – 16 –

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OK  Boomer ! COVID : Les seniors au centre des enjeux 

Parmi les fortes particularités de cette épidémie, à coté de sa contagiosité élevée, figure la menace qui plane sur les plus âgés. « A ce jour, on compte 25 000 morts du coronavirus en France. L’âge médian des personnes décédées est de 84 ans. Les plus de 75 ans représentent 75 % des décès. Il s’agit d’hommes à 55 %. Deux personnes décédées sur trois présentaient une autre déficience, une comorbidité, comme l’hypertension, le diabète, une pathologie pulmonaire, l’insuffisance cardiaque ou l’obésité. Les personnes de moins de 65 ans et sans comorbidité ne représentent que 2,5 % des décès.

Donc, en l’état actuel de ce que l’on sait de cette pandémie, les statistiques disent que le coronavirus tue surtout les vieux déjà malades. » C’est ainsi qu’Eric Le Boucher résume dans l’Opinion du 3 mai 2020 la situation. Un diagnostic incontournable, qui avait amené le Président Macron à laisser entendre que les « populations vulnérables » devraient prolonger leur confinement.
 Une annonce qui avait inspiré une petite musique, notamment ceux qui analysent la crise et les politiques mises en place pour combattre l’épidémie en termes de lutte entre génération.

« Sidérée par l’attaque du coronavirus contre une génération que l’on croyait éternelle (et qui se pensait telle), la société politique, civile et médicale a fait corps pour la protéger. » s’exclame Monique Dagnaud dans Slate du 1er mai

L’approche générationnelle apporte plus de confusion que de lumière. En tant que Baby boomer, je ne me sens pas solidaire des dirigeants de ma génération qui ont façonné ce monde, je ne me sens pas responsable des graves erreurs environnementales, des inégalités sociales installées à la faveur du néo-libéralisme triomphant. Je les ai combattus comme je pouvais ; mon seul regret c’est d’avoir perdu la bataille (heureusement elle n’est pas terminée).

Mais je peux être sensible à l’argument. Demander aux générations suivantes de se saborder pour sauver les anciens, est-ce légitime ?

Et puis un philosophe est venu en renfort. Pour André Comte-sponville, la liberté (d’aller et venir , rencontrer d’autres humains) la justice , l’amour, la préservation de notre planète ne sont -ils pas plus importants que la simple préservation de la vie de nos aînés ?

Et puis je m’interroge : sauver mes propres enfants d’un désastre ou bien perdre la vie. Qu’une alternative pareille, un de ces quatre jours m’échoie c’est, j’en suis convaincu, le sort de mes enfants qui sera l’objet de mon choix.

Mais je perçois bien que ces raisonnements, en termes de génération, en termes de choix personnel ne peuvent tenir lieu de boussole politique. Car il faut être capable de pousser l’hypothèse à fond et examiner toutes les conséquences.

Sommes-nous prêts à laisser libre cours à l’épidémie, à abandonner à leur sort des dizaines de milliers de citoyens âgés, à fermer les yeux sur les EHPAD en train de se transformer en mouroir, à laisser les malades graves terminer leur jours sans les soins nécessaires dans les couloirs des hôpitaux. La plupart des gouvernements démocratiques ou non, dictatoriaux ou non, (à part les ambigüités des Trump et autres Bolsonaro) ont fait le choix de préserver la santé. Pouvons-nous faire différemment ?

Et puis qui s’occuperait des petits-enfants, qui se mobiliserait dans les associations, les communes, qui prendrait le temps de la réflexion, qui cultiverait le potager pour les produits à partager avec les proches ?

Salut les Confinés -15-

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J-3 : Le déconfinement aura bien lieu le 11 mai !

 Il a fallu que le président le rappelle plusieurs fois le 6 mai, tant ses ministres essayaient d’éviter la promesse et de noyer le poisson. Pour Olivier Véran ce sera le 11 … si les résultats sont bons. Pour Jean-Michel Blanquer, ce sera selon … la bonne volonté des maires.

Jean Castex, le très discret Coordinateur national à la stratégie de déconfinement, le « Monsieur déconfinement », a même proposé devant le sénat l’établissement d’un plan de reconfinement au cas où les résultats seraient mauvais !!!

 Il faut rappeler que c’est le président, surprenant même ses ministres, qui avait annoncé la réouverture des écoles au 11 mai. Or à ce jour, quel parent peut savoir ce qu’il en sera pour sa progéniture ? Les maires, à juste titre, s’inquiètent de la mise en place des précautions figurant dans l’instruction de 63 pages qui devrait présider à l’ouverture des classes. Chacun fera comme il peut.

La même incertitude règne au Canada. Jusqu’au Premier Ministre Justin Trudeau qui « ne sait pas  » s’il enverra ses enfants à l’école au moment de la ré-ouverture.
Mais le doute ne concerne pas que les enfants. Emmanuel Macron avait laissé entendre que les citoyens les plus vulnérables (comprenez : les plus âgés) devraient prolonger le confinement. Finalement les protestations de tous bords ont eu raison du projet

A 3 jours de la date fatidique, les confinés ne savent pas vraiment qui croire et que croire. On avait d’abord (le président en l’occurrence) parlé d’un déconfinement par région. Oublié ! Puis l’idée d’une carte rouge et verte. Finalement c’est rouge, orange et vert. Mais on ne sait pas vraiment quelles en sont les conséquences à part l’ouverture possible des parcs au 11 mai et peut-être la réouverture des collèges au 18. Ou bien était-ce juste pour désigner les mauvais élèves ?

En fait, tout le monde a attendu le 7 mai pour savoir quel serait le statut de son département. Notre région Rhône-Alpes abandonne sa couleur orange inquiétante. Le rouge se concentre sur le Nord-Est du pays. Mais les trois quart verts des départements ne doivent pas se laisser aller à l’illusion que tout sera désormais comme avant.

Car l’inquiétude autour de la décision de déconfinement s’accroît. Et ce ne sont pas les épidémiologistes qui vont l’apaiser.

Une seconde vague

Ainsi l’équipe de Victoria Colizza  de l’INSERM projette [ Le Monde dans son édition du 7 mai] dans tous les cas une seconde vague entre juillet et septembre. Sa hauteur dépendra des mesures mis en place : « L’épidémie ne pourrait être contrôlée qu’à plusieurs conditions . La première est le maintien des mesures de distanciation physique. « Cela suppose que 50 % des gens restent chez eux – soit que leur activité professionnelle n’ait pas repris, soit qu’ils pratiquent le télétravail –, que les personnes âgées aient réduit de 75 % leurs contacts, et qu’il y ait une réouverture partielle (pas plus de 50 %) de différentes activités et commerces », détaille Vittoria Colizza.

Autre condition pour ce scénario : que le dispositif de dépistage, de traçage et d’isolement des cas et de leurs contacts détecte au moins 50 % des nouvelles infections. « Si 25 % seulement sont identifiés, nous aurions à affronter une seconde vague plus intense que la première, débutant fin juin avec des capacités de réanimation dépassées jusqu’en août », insiste Vittoria Colizza. La modélisatrice souligne qu’au-delà du nombre de tests disponibles, ce dispositif de traçage des contacts nécessite des ressources humaines massives afin de casser les chaînes de transmission.
Dans un scénario où l’ensemble des élèves, de la maternelle au lycée, reprendraient les cours le 11 mai, les chercheurs de l’Inserm envisagent une seconde vague épidémique, similaire à la première. Elle serait toutefois évitée en limitant à 50 % l’effectif pour l’ensemble des classes. Un retour en classe de l’ensemble des adolescents en juin aurait pour effet de submerger les services de réanimation, les nouveaux cas qui en découleraient nécessitant 138 % des capacités. »

Alors on peut penser que lorsque le président Macron a annoncé la ré-ouverture des écoles le 11 mai, il s’est engagé un peu vite et de manière imprudente.  Heureusement la réalité des faits s’est imposée en limitant l’ouverture à la seule primaire et aux élèves volontaires.

Une autre conclusion des épidémiologistes concerne les personnes vulnérables (âge et comorbidité). A défaut de prolongation du confinement, ils insistent sur la nécessité de réduire de 75%  leurs contacts en situation normale. Alors pas question pour nous, les vieux,  de repartir dans une vie sociale sans limite !
Alors, nos projets pour le déconfinement : fêter en famille les anniversaires du mois de mai (en respectant les distances)  et partir en vadrouille en Camping-Car ( dans les 100 km autorisés, le micro-tourisme nous convient bien).

Salut les confinés – 14

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Le télé-travail

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

S’il existe une petite révolution dans cet épisode du confinement, c’est bien celle du télétravail qui a concerné jusqu’à 5 millions de salariés. Comment les salariés concernés ont-ils vécu cette situation ? Le télétravail survivra-t-il dans le « monde d’après »? Le think tank Terra Nova a publié récemment une étude .

Le Clairon, lui, a mené son enquête dans son entourage:

  • Nora, responsable administrative dans une PME de service:
    Moi je milite depuis plus d’un an pour avoir au moins une journée par semaine en télétravail, donc je suis déjà conquise. La fermeture pour travaux de ma boite m’avait déjà fait vivre l’expérience l’été dernier. Mais comme le souligne l’étude pour bien vivre son télétravail, il faut avoir le bon matériel (c est mon cas) et pas d’enfant à domicile !! Si on doit ajouter le travail d’instit ça devient compliqué. Encore plus difficile pour les parents d’enfants en bas ages !
    Ce qui me manque le plus c’est les échanges avec les collègues, les pauses cafés, les restos le midi, la pause au parc tête d or.
    Mon patron souhaite poursuivre le télétravail aussi longtemps que nécessaire (juillet ou septembre!). Pour moi, le bon équilibre serait 2 jours a la maison et 3 jours au travail. Les négociations seront peut être plus faciles dans le futur pour y arriver. L’impact écologique serait sans doute énorme si toutes les entreprises l’adoptaient , et les trajets plus agréables sans embouteillage. On peut quand même espérer que cela fera évoluer les mentalités.
  • Mathias, informaticien chez un éditeur de logiciel :
    Entièrement d’accord avec la semaine de 4 jours dont la moitié en télétravail !J’ ai connu le télétravail (TT pour les intimes) dans mon ancienne boîte. C’est plaisant de ne pas prendre la voiture, pouvoir prendre le petit déj tranquille et ne pas être dérangé tout le temps. On gagne justement du temps sur tous les plans. D’autant plus de nous ne sommes que deux a la maison et à part le fait de recevoir des appels en même temps, ça se passe plutôt bien.
    Le revers de la médaille pour moi c’est aussi le manque de lien social et l’équipement, pas forcément de bureau ou de chaise ergonomique, pas d’imprimante, galères d’internet, etc.. .L’autre truc c est qu’au final on bosse en moyenne beaucoup plus en TT et le soir c’est peinture en ce moment [suite au déménagement ], le confinement est tout sauf reposant pour ma part !
    Au moins les entreprises un peu vieux jeu et réfractaires au TéléTravail comme la mienne se rendent compte que c est possible de faire tourner la boite quasi entièrement a distance (nous sommes éditeurs de logiciels). Et j’espère que ça restera possible dans une moindre mesure après cette crise sanitaire.
  • Mona, chargée de recrutement dans une grande institution sanitaire :
    J’ai entendu parler de cette étude hier à la télé. Personnellement, et je l’ai dit à ma responsable, je me suis bien adaptée au télétravail à 100% et maintenant que je me sens dans ma zone de confort, je voudrais en profiter pour quelques mois encore. Idéalement, j’aimerai inverser les habitudes et faire du télétravail la plupart du temps, et du présentiel ponctuellement. Je gagne 2h de trajet/jour, je ne mets pas d’alarme pour me lever, donc je finis mon sommeil tranquillement le matin sans être dérangée par un « bip bip bip… »
    Je ne me concentre que sur mon travail et je n’ai plus de perte de temps liée aux rumeurs des couloirs.(J’épargne en vêtements et chaussures ! Héhéhé je plaisante un peu). Au niveau du matériel, je suis bien équipée (téléphone pro + pc pro) et on a toujours l’assistance informatique à distance au cas de besoin. A savoir, que chez nous, le télétravail ponctuel était déjà en place, on a l’habitude. En plus, nous sommes nombreux et le campus est tellement grand, que de toute façon, je ne vois pas tout le temps les gens avec qui je travaille.
    Le seul inconvénient pour moi, c’est que je n’ai pas mon siège ergonomique et le bureau installé de façon à avoir une posture correcte. Il faut donc faire attention aux troubles musculo-squelettiques.
  • Clara est économiste chez un constructeur de maison individuelles :

Pour ma part c’est ma première expérience de télétravail, et je peux dire que j’adhère à 100%. Effectivement moins de stress le matin, j’emmène en poussette, Nolhan tranquillement, chez la nounou tous les matins. Je mets a profit mon temps de trajets bureau-maison (env. 1h/jour) pour faire du sport a la place.Je suis plus productive sur mes dossiers, je viens de terminer une maison de 230m2 en 16h de temps de travail contre pratiquement le double au bureau. (Sans cesse dérangée par téléphone/mails/collègues).
Le bonheur de pouvoir gérer son temps comme on l’entends. Pause de midi quand j’ai faim et non à 12h30! Petite sieste après le repas (15min max). Travailler portes et fenêtres grand ouverts! Mettre de la musique. Vraiment c’est une qualité de travail que je ne connaissais pas. 
Inconvénients effectivement : Manque de contacts sociaux et manque d’équipement pour ma part. Je me suis pincée le nerfs sciatique (A cause du sport) mais aussi parce que ma table est trop haute. Ou mon siège trop bas…? Et ce matin j’ai du aller au bureau de tabac avec ma clés USB pour qu’il m’imprime mes plans en A3 couleur. J’ai fais une note de frais pour 7.20€ 🙂
Malheureusement on sent bien que malgré cet essai concluant notre direction n’a pas l’air du tout favorable à une prolongation du télétravail. Covid ou pas covid…
Conclusion : il me faudrait 2 jours au bureau, 2 jours en télétravail et 3 jours de week end!!! Bien sûr. 

Salut les confinés ! épisode 13

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Le jour d’après …

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Avec l’apparition de l’épidémie, avec le confinement, la formule s’est imposée, dans les médias, les cercles de réflexion et les équipes politiques à gauche surtout mais pas seulement. L’idée c’est que cette épidémie bouleverse tellement notre société (« le monde d’avant ») qu’elle va induire un changement total pour nous amener vers « le monde d’après ». La crise serait porteuse de ruptures en chaîne dans nos vies quotidiennes, dans notre manière de travailler et de produire, et dans les façons de faire de la politique et aussi de gouverner. Mais la formule, généreuse, mais trop générale, trop vague, me gêne beaucoup, car elle est porteuse de malentendus et peut-être de frustration.

Il n’y a pas de jours d’après

  • Sur la progression (ou le reflux) de l’épidémie on en sait maintenant plus. Après un ralentissement dû au confinement, le virus est présent parmi nous pour un bout de temps. Il y aura sans doute des accalmies, des vagues en retour tant qu’on n’aura pas atteint l’immunité collective (et encore, l’OMS s’interroge sur son existence…) ou la mise en œuvre d’un vaccin. Donc pas de fin proche et nette de l’épidémie mais une crise sanitaire qui s’étalera sur de nombreux mois. Pour le jour d’après,il faudra donc patienter.
  • Sur le plan économique et plus généralement sur l’évolution de nos modes de vie et la manière de conduire les affaires, à gauche et même à droite on entend nos responsables proclamer « Rien ne sera comme avant ! ».  Cette petite musique, on l’a déjà entendue. Souvenez-vous, au lendemain de la crise financière de 2008, Sarkozy, fustigeant les errements du capitalisme financier devenu fou, proclamant la fin des paradis fiscaux, promettant de mettre l’écologie au centre … Il n’a pas fallu longtemps pour un retour au business as usual

N’est-ce pas ce qui se préfigure avec les mesures du plan de relance ?

  • Les 20 milliards d’€ destinés à sauver « nos » entreprises n’iront pas aux sociétés qui ont des rapports avec des paradis fiscaux, avait promis Bruno Le Maire. Le jour même, la disposition disparaissait de la loi votée à l’assemblée Nationale !
  • Le versement des dividendes sera -t-il annulé cette année dans les entreprises qui auront reçu des aides de l’état ? Rien de sûr ! Le gouvernement les invite à de la modération … Au mieux les actionnaires devront attendre un peu leurs dividendes, à la sortie de crise.
  • Air France va bénéficier de 7 milliards d’€ d’aide.

Une aide conditionnée à des « engagements », il s’agit pour le gouvernement d’en faire « la compagnie la plus respectueuse de l’environnement au monde » … Et pour commencer rouvrir à partir du 11 mai 3 lignes régulières qui pourraient être remplacées avantageusement par des TGV en 2 ou 3 h : Brest, Bordeaux, Montpellier !  70 fois moins de CO2 ! Cherchez l’erreur !

  • L’automobile suivra avec, on s’en doute, la même compréhension des intérêts de l’entreprise.
  • Le patronat français et ses homologues européens ont mené de discrètes opérations de lobbying pour convaincre nos gouvernements d’adoucir ou de repousser l’application des mesures environnementales, d’augmenter le temps de travail etc.

Bref, en matière d’économie, le monde d’après ressemble furieusement au monde d’avant !

Le monde d’après… dans les esprits :

L’air du temps, ces dernières années, avait mis en avant quelques idées : des modes de vie plus respectueux de l’environnement, la protection du climat, des revenus qui dépendraient moins d’un travail rémunéré (revenu universel), la recherche du sens, surtout chez les jeunes, dans les situations professionnelles, le rejet d’activités non-essentielles, inutiles, voire nuisibles. 

La crise du coronavirus et le confinement ont fait l’effet d’une véritable leçon de choses, une véritable expérience vécue sur chacun de ces sujets, qui annoncent une vaste prise de conscience. Dans bien des domaines nous ne sommes pas prêts à revivre le monde d’avant !

Mais le changement, c’est pas automatique !

 Nous sommes tous impressionnés par la baisse de la pollution dans les villes, ces photos satellites qui nous montrent une atmosphère transparente.

La tour Eifel se détachant sur un bleu transparent   Mais que se passera-t-il après le 11 mai ? Laisserons-nous la voiture au garage ? Sortirons-nous enfin le vélo ? Trouverons-nous plus de pistes cyclables, plus sûres ?
 En 2020, le Covid19 pourrait faire baisser les émissions mondiales de CO2 de 5 à 6 % par rapport à leur niveau record de 2019. Entre 2020 et 2050, il faudrait que ces émissions baissent CHAQUE ANNÉE de 6 à 8 %/an pour que les objectifs de l’Accord de Paris soient atteints. (Source Carbon Global Projet). C’est dire qu’il faudra poursuivre l’effort

Est-ce que notre chef de bureau accordera désormais la possibilité de travailler à la maison, cette possibilité qu’il nous avait refusé régulièrement avant le COVID ? Est-ce la fin des réunions interminables, en présentiel, au profit de courtes mises au point par Skype ?

La protection sociale évoluera-t-elle vers un système qui prenne mieux en charge tous ceux qui sont dans la précarité et dans la pauvreté ?

Les hôpitaux auront-ils enfin des moyens suffisants avec des carrières plus attractives pour les soignants ?

Serons-nous plus enclins à consommer local, des produits de saison, auprès de producteurs proches ?

Notre économie saura-t-elle se convertir à plus d’autonomie, dans une globalisation maîtrisée. S’engagera-t-elle vers une transition énergétique indispensable ?

Les réponses à toutes ces questions ne nous seront pas données par la magie du jour d’après. Il faudra continuer à nous impliquer, à nous mobiliser, par nos actions individuelles, par notre participation aux associations et à la vie publique.

Salut les confinés ! -12-

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Covid : La société du spectacle en panne ?

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Je poursuis la réflexion suggérée par Bruno Latour : quelles sont les activités qui nous manquent et quelles sont les activités maintenant suspendues dont nous souhaiterions qu’elles ne reprennent pas ?

Ce qui a marqué le grand public, ces derniers jours c’est l’annulation des grands évènements qui jalonnent ce printemps et ce début d’été à venir :

Le tour de France reporté en septembre, le championnat de foot à l’arrêt, Roland Garros reporté en 2021, pareil pour le festival d’Avignon, les Vieilles Charrues à Carhaix, le Printemps de Bourges : la liste est interminable. Ces reports, ou annulations ont sans doute plus marqué les français que l’annonce de la fermeture de la plupart des usines d’automobiles sur le territoire. Cette attention aux grands évènements sportifs ou culturels serait-elle la marque de fabrique de nos sociétés prospères, attachées au spectacle qu’elles donnent au grand public ?

Dans les années soixante du siècle dernier, un courant intellectuel et militant, le situationnisme avait décrit et critiqué cette société du spectacle

qui transformait en marchandise toute œuvre artistique, tout exploit sportif, tout divertissement collectif, et qui finalement s’étendait à toutes les activités de cette société capitaliste. Si les situationnistes n’ont plus d’actualité en tant que courant intellectuel, la société du spectacle, elle, a prospéré. Que diraient aujourd’hui Guy Debord, son fondateur, et ses amis devant les 22 milliards d’€ brassés par le foot professionnel européen, devant les foules qui se pressent dans les festivals, devenus une source indispensable de revenu pour les collectivités qui les accueillent ? Effectivement ces grands évènements sont devenus avant tout des machines à casch qui s’adressent avant tout à des consommateurs, et qui se sont débarrassés de toute relation à l’expérience de leur public.

Et pourtant, les meilleurs fidèles du Tour de France ne se trouvent-ils pas parmi ces amateurs -individuels ou adhérents d’un club de cyclo-tourisme- qui savent ce que c’est de cracher ses poumons dans l’ascension d’un col,

les meilleurs fans d’un concert n’ont-ils pas monté ou encouragé un orchestre de rock dans leur garage, les vrais habitués du festival d’Avignon ne se rappellent-ils pas encore de leurs cours de théâtre au lycée ou de la troupe amateur à laquelle ils ont participé ?

Les grands évènements du sport et de la culture ont à mon sens oublié ce rapport à la pratique, à l’expérience vécue de leur public. Il n’y a plus de rapport entre la vie d’un petit club de foot animé par des bénévoles et les grandes compétitions professionnelles. C’est juste devenu un spectacle pour des consommateurs.

On se prend à rêver d’un monde où les moyens colossaux du sport et de la culture seraient redirigés et disponibles pour tous les citoyens qui voudraient se perfectionner au foot, s’initier à la flute traversière ou à la pratique de l’orchestre, qui voudraient disposer d’un encadrement qualifié dans leur troupe de théâtre. Peut-être réinventer les maisons de la culture et ouvrir les stades et les gymnases aux enseignants bénévoles, aux amateurs sans perspective de compétition.

 Le business du spectacle a tout perverti. Il faudrait repartir à zéro. Alors, ce sera le jour d’après ?

Salut les confinés ! -11-

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Liberté, égalité, fraternité …mobilité !

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Je poursuis la réflexion suggérée par Bruno Latour : quelles sont les activités qui nous manquent et quelles sont les activités maintenant suspendues dont nous souhaiterions qu’elles ne reprennent pas ?

Il me semble qu’en ce temps de confinement et d’immobilité, il est judicieux de nous interroger sur notre besoin de mobilité, qui apparaît, à la réflexion comme un droit fondamental de l’individu, peut-être à rajouter au fronton de nos mairies à côté des Liberté, Egalité, Fraternité.

Quand on pense à notre ancêtre, Homo Sapiens, toujours en quête de nouveaux horizons, mû par cette curiosité de découvrir ce qui se cachait derrière la ligne d’horizon. C’est ainsi qu’on l’a retrouvé finalement installé dans les moindres recoins de notre planète. La mobilité est bien une caractéristique fondamentale du genre humain.

Plus près de nous, à l’été 1989, les prémisses de la disparition du rideau de fer sont apparues en Hongrie qui avait entr’ouvert la frontière avec l’Autriche.

Les allemands de l’Est se sont précipités dans leur Trabant pour profiter de quelques jours passés à l’Ouest, des vacances bien plus passionnantes que celles proposées par le régime sur les bords de la Baltique. C’était juste quelques semaines avant la chute du mur de Berlin. Cette curiosité pour aller voir de l’autre côté, cette envie irrépressible d’échapper à l’assignation à résidence, à l’immobilité forcée, à ce confinement géant imposé à sa population, a sans doute joué un rôle important dans ce mouvement irrésistible, au moins autant que le rejet d’un état bureaucratique et policier, en plein échec économique.

De nos jours, en plein Covid19, c’est vrai que nous, les confinés, supportons mal cette restriction sévère de nos déplacements à pied, en jogging, en automobile, cette limite étroite de 1 km autour de la maison. Après les inquiétudes -démenties finalement- sur l’alimentation, après la disparition des rencontres familiales ou amicales – légèrement compensée par les Skype et autres Zoom- , l’interdiction de la mobilité pèse fortement sur notre moral. Et nous attendons tous avec impatience le jour où nous pourrons reprendre nos baskets, nos vélos, nos voitures et rencontrer nos amis sans rien demander à personne

Moi-même, tous les jours je lorgne notre camping-car posté dans notre cour, prêt à démarrer dès que le déconfinement sera annoncé. J’ai l’impression de rater le printemps et ses occasions de ballades d’autant plus désirées après ce confinement . D’ailleurs rien de mieux en matière de distanciation sociale qu’une escapade en Camping-car !

En même temps le confinement questionne nos pratiques de la mobilité. Aurions-nous imaginé ces avenues sans embouteillages, ce silence auprès des aéroports, ces images satellites où la pollution de l’atmosphère se trouvait effacée ? Nous sommes bien obligés de mettre en cause nos usages de la mobilité. Sommes-nous prêts à réduire l’utilisation de la voiture individuelle ? Sommes-nous prêts à renoncer à cet aller-retour en Suisse pour manger une fondue à Gruyère, à ce week-end improvisé à Lisbonne, à cette semaine dans une île en Thaïlande. Beaucoup de nos déplacements relèvent plus de l’agrément, voire du caprice que d’une réelle nécessité. C’est, du coup, la croissance continue du tourisme de masse qui est mise en question. D’ailleurs, à Paris, à Barcelone, à Londres, les populations s’élèvent contre l’invasion facilitée par les vols lowcost et les hébergements AirBandB.

Le tourisme débridé peut-il suspendre sa course folle et recouvrer la raison, peut-il retrouver sa vertu première : la découverte d’une autre nature, l’échange et le rapprochement des peuples, la contribution au développement ?

*On a beaucoup parlé de la pénurie de masques et de l’impréparation des autorités. Un excellent article de Politis/Bastamag reprend en détail l’historique de l’abandon d’une indispensable démarche de précaution :

Salut les confinés ! -10-

À la Une

Biens et services essentiels ? Ou pas ?

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais? Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Danièle nous avait conseillé dans son blog  de suivre l’invitation du philosophe Bruno Latour  à l’auto-description proposée dans un article paru le 30 mars sur AOC :

Il s’agit de définir, en période de confinement, quelles sont les activités qui vous manquent et quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles ne reprennent pas.

Et j’ai trouvé que c’était plus intéressant de commencer par les secondes. Car l’occasion est unique de disposer d’une page blanche où il n’y aurait plus de machines à fric du sport professionnel, plus de cours de bourse, plus de pèlerinage à La Mecque ou à Lourdes, plus de safari pour riches au Kenya, plus de semaine au soleil à Saint-Domingue avec des vols low cost, plus de courses automobiles ou de publicité partout. Je les cite en vrac, je vais essayer de hiérarchiser et préciser.

Commençons par la publicité.  Est-ce que ça me gêne vraiment, moi, en tant qu’individu ? Pas d’hésitation, c’est oui !

Pas une demi-heure devant la télé sans qu’on m’invite à acheter un SUV 200cv, de cette marque, de cette autre, et puis celui-ci qui est connecté, cet autre qui passe partout… Quand on sait que personne n’achète des voitures neuves sauf les entreprises et les particuliers aisés de plus de 60 ans. Les autres, plus fauchés, se rabattent sur l’occasion ou les premiers prix. Au bout du compte, on dit que ce sont 3,2 milliards € (à comparer aux 3,8 milliards de la redevance) qui partent ainsi en spot télé. Sans les pubs pour les bagnoles, TF1, M6 ou autres C 8 n’auraient plus qu’à fermer boutique. Si l’on rajoute les autres médias (les journaux papiers, la pub internet …) c’est 16 milliards. Et le double, 33 milliards, si on rajoute les autres canaux de la «communication» (marketing direct, mécénat,relations publiques …)! L’équivalent du budget de l’assurance chômage ou des dépenses de recherche-développement dans les entreprises!

Quand j’achète un yaourt Danone, c’est 15% de son prix qui part dans la pub, autant que les salaires des employés qui contribuent à sa production.

Est-ce que d’autres seraient gênés par la disparition de la pub ? Je n’en connais pas personnellement, chacun (les trois quarts des français d’après une étude) a sa petite astuce pour échapper à la pub : en profiter pour aller pisser, regarder ses mails, ou zapper sur une autre chaîne. Sur internet les bloqueurs de publicité ont un grand succès, au grand regret des annonceurs et de Google.

Sans la publicité, beaucoup de média disparaîtraient :TF1, C8, …Hanouna au chômage, qui s’en plaindrait ? En tout, pas mal d’emplois, dont beaucoup sont précaires pour les techniciens ou trop payés pour les vedettes.

Si on n’a plus la pub, il faudrait bien que les médias soient payés par les utilisateurs : la redevance (les chaînes publiques) ou l’abonnement : le modèle Canal+, les chaînes payantes, Netflix, l’information comme Médiapart. Et c’est le client, l’utilisateur qui décide et pas le système médiatico-publicitaire.

Dans le monde d’après, ces arguments devraient convaincre nos décideurs de supprimer ou de relativiser fortement la publicité. (voir l’excellent article des économistes attérés ) Eh, bien ! Non ! C’est le contraire qui se passe.

Ainsi la majorité macronienne a décidé que le sauvetage de la pub, étranglée par le confinement, était une grande cause nationale. C’est Aurore Bergé, députée LREM qui est montée au créneau.

Rapporteure générale du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle, elle propose, à coté de l’autorisation d’un peu plus de pub dans les programmes,  la mise en place d’un crédit d’impôt sur les dépenses de communication. Il y a urgence, d’après elle, à soutenir les médias mais aussi l’affichage, durant cette crise du coronavirus. Chaque euro dépensé viendra donc en diminution de l’impôt versé par les entreprises, donc payé finalement par les contribuables.

Les citoyens ont l’impression que la pub, c’est la condition du gratuit, mais c’est un faux-semblant. Cette pub c’est le consommateur qui la paye, c’est moi quand j’achète un yaourt Danone, c’est moi quand je paye mes impôts pour permettre que les entreprises déduisent leurs frais de pub. Tout ça pour venir polluer notre environnement immédiat : écran télé ou internet, séquences radio, couloir des métros…

Et pour sourire et vous donner des idées pour utiliser le stock de papier hygiénique et de Sopalin que vous avez dans vos placards: les autoportraits dans les toilettes d’avion de Nina Katchadourian :

Salut les confinés ! -9-

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Covid19 : l’effondrement est remis à plus tard

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais? Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Où sont passés les « collapsologues » qu’on entendait sur toutes les ondes, sur tous les plateaux de télé, il y a quelques semaines ? Pourtant la France à l’arrêt, la planète au point mort, quelle opportunité pour les prophètes de l’effondrement !

Yves Cochet, vétéran de la collapsologie, avec l’effondrement qu’il prédit à nos civilisations droguées au pétrole, donne quelques indications dans le Monde du 30 mars :

   « “Avec mes copains collapsologues, on s’appelle et on se dit : ‘Dis donc, ça a été encore plus vite que ce qu’on pensait !’”, déclare-t-il. Il laisse entendre que cette épidémie, il l’avait annoncé parmi les multiples éventualités à l’origine de l’effondrement : Guerre nucléaire, amincissement de la couche d’ozone, disparition des abeilles entraînant d’immenses famines, pénurie de carburant …la liste est longue des périls, qui nous attendent (page 123, Devant l’effondrement, Les Liens qui Libèrent2019). Bizarrement, parmi « les causes plausibles », il ne cite pas le changement climatique, qui, lui, s’annonce avec certitude.  

En fidèle lecteur, je regarde depuis quelques temps avec intérêt et concupiscence, les troupes de chevaux qui s’ébattent dans les près aux alentours de notre maison. J’ai en tête la prédiction de notre lanceur d’alerte : vu la raréfaction et le renchérissement du pétrole (dont le prix est actuellement au plus bas depuis 2005 – cherchez l’erreur…), d’ici 2030, il faudra repasser au cheval, c’est 35 millions de chevaux qu’il faudra sur nos routes, sur nos chemins, dans nos rues. Alors, comme je ne suis pas en état de reprendre l’équitation (l’arthrose, hélas !), il faut que je me mette en recherche d’une petite calèche…  

Pablo Servigne, lui, reste longtemps silencieux. Sur Facebook, Il suit attentivement tout ce qui est publié mais sans s’exprimer sur la crise qui vient.

Il faut attendre le 4 avril et une interview sur France Inter pour qu’il signale sur son Facebook : « Première interview, je sors de mon trou 😅 ! »

Partageons au moins sa conclusion : « En collapsologie, il y a deux écueils à éviter : le premier, c’est de dire que « tout est foutu ». Le deuxième, dire que « tout ira bien ». On a besoin d’optimistes et de pessimistes actifs, qui se préparent aux multiples chocs à venir, et pas d’optimistes et de pessimistes passifs, dans le déni. »

Moi, je persiffle sur les collapsologues , mais il faut bien reconnaître la justesse de leurs alertes, même si on ne partage ni le scénario qu’ils mettent en avant, ni la stratégie à mettre en œuvre pour nous éviter la catastrophe.

En attendant, notre société « à l’arrêt » continue à nous fournir de l’eau, de l’électricité, du gaz, de l’internet, de l’alimentation, de l’éducation (en mode un peu dégradé) et des soins pour ceux qui sont touchés. Bien loin de l’apocalypse annoncée.

Salut les confinés ! -8-

À la Une

L’indispensable confinement

Près de la moitié de l’humanité confinée ! Un fait sans précédent, une expérience sans comparaison : les épidémiologistes les plus confirmés n’ont pas de certitudes. Quelques précédents sont examinés à la loupe :

La grippe espagnole, si elle a peu généré de mesures publiques dans une Europe sortant à peine d’une guerre terrible, a fait l’objet de plans locaux aux USA. Ainsi on a pu comparer les résultats entre les différentes villes : des mortalités qui passaient du simple au triple avec un avantage pour les confinements stricts.

En 2020, en compilant les données de différents pays, les épidémiologistes de l’Imperial Collège de Londres, le centre le plus pointu en la matière, souligne l’effet du confinement : en France ce sont 2500 morts évitées au 30 mars.   

Et puis l’exemple de la Chine en train de lever les barrières à l’issue d’un confinement réussi a fini de convaincre les responsables européens, puis tous ceux de la planète avec quelques exceptions.
 Il faut dire que la plupart des gouvernements, mal préparés, n’avaient pas beaucoup d’alternative : peu de masques, peu de tests, peu de protections, peu de lits de réanimation… Alors on revenait aux vieilles méthodes, apparues au Moyen-Age et qui finissaient par obtenir des résultats.

 Mais il y a confinement et confinement ! Et le diable est dans les détails. Ainsi on a vite passé sous silence le fait que la quarantaine de Wuhan ne s’était pas réduite au slogan « Restez chez vous ! ». Les autorités chinoises ont ainsi inspecté toutes les familles du périmètre qui étaient ravitaillés de l’extérieur, diagnostiqué les malades pour les isoler dans des hôtels transformés en centres d’isolement, multiplié les test …

Une quarantaine très active sans se cantonner comme en France aux contrôles policiers sur la voie publique, comme on sait bien faire dans notre cher pays démocratique. Une efficacité qui inspire d’ailleurs à nos responsables et commentateurs officiels français des sous-entendus à peine voilés, des soupçons sur le nombre réel, bien plus grand, dit-on, de morts, sur le thème « les chinois nous ont menti ! ». Une manière de se dédouaner face aux accusations d’impréparation qui leur sont adressés à juste titre.

Les limites du confinement

Du coup, les autorités montent en épingle les « manquements » au confinement, traquent les rassemblements, couvrent de honte les urbains réfugiés dans leur résidence secondaire…

Ils oublient que le confinement ne peut pas être total comme nous l’avons expliqué à l’épisode précédent. Les activités « essentielles » concernent entre 4 et 6 millions de salariés. Il faut bien faire tourner les hôpitaux, les centrales électriques, les circuits d’alimentation pour la population et bien d’autres activités, dont la liste s’allonge petit à petit. Nous nous sommes réjouis, par exemple, de l’annonce ce week-end de l’ouverture des jardineries pour garnir notre potager de plants de salades, de tomates, de courgettes qui seront bien utiles pour un confinement qui risque de durer…

Ces salariés qui se déplacent sur leur lieu de travail sont exposés au virus, plus (les soignants) ou moins (les jardiniers). Ils ont des familles qu’ils peuvent exposer au virus. Les porteurs sains peuvent continuer à contaminer pendant le confinement.

Le confinement « gèle » la progression de l’épidémie, il réduit les contaminations, les hospitalisations, les décès. Tout le monde s’en réjouit à juste titre. Mais il ne supprime pas l’épidémie qui ne sera vraiment éradiquée que le jour où une partie importante de la population sera immunisée ou que le jour où un vaccin efficace sera disponible. Les épidémiologistes parlent d’un délai de 18 mois, sauf si on trouve des méthodes plus actives.

Sortir du confinement

Tout le monde parle des exemples singapourien, taïwanais ou coréen qui ont obtenu des résultats très encourageants sans confinement généralisé. Le secret commun : une détection massive par test, un traçage numérique des contacts, un isolement ciblé des positifs.
Les sondages montrent que les Français, les Européens sont prêts à entrer dans de tels dispositifs, en accompagnement d’un déconfinement progressif.
Et puis la mise au point tant espérée de traitement devrait faire baisser les entrées en soins intensifs, les décès et ainsi relâcher la pression sur les hôpitaux.  
C’est pas pour tout de suite, mais il faut s’y préparer !
Pour l’instant : RESTONS CHEZ NOUS !

A voir une video de Maxime Lambrecht

Salut les confinés -7-

À la Une

Confinement total ? pas vraiment !

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Restez chez vous ! Nous sommes tous confinés, nous répètent les autorités, les médias et notre entourage. Autour de nous, c’est vrai : Nora assure l’administratif de sa boîte à distance chez elle, Mathias s’occupe de résoudre les problèmes numériques des utilisateurs depuis chez lui avec une connexion capricieuse. Pour Clara c’est arrêt maladie pour garde d’enfants (sa boîte de construction immobilière a fermé), mais son compagnon, artisan peintre à son compte hésite à reprendre après 2 semaines de congé confiné. Quand à nous deux nous sommes confinés à la maison comme la plupart des 17 millions de retraités.

Qui sont les confinés ?

  • Les congés maladie « Covid » sont confinés à la maison puisqu’il faut une présence pour les 12 millions de scolaires privés d’écoles. Leurs revenus sont variables : une base de50 % du net avec maintien suivant les conventions collectives . Le délai de carence de 3 jours a été supprimé pour tous les cas. Combien sont-ils ? On n’a pas les chiffres de l’assurance maladie mais on peut supposer qu’ils sont aussi nombreux que les chômeurs partiels.
  • On sait que 4 millions de salariés (un sur cinq dans le privé) sont au chômage partiel, pour beaucoup avec maintien partiel ( 84% du net) de leur salaires. Sont-ils tous confinés ? Pas sûr car le chômage « partiel » peut ne concerner qu’une partie du temps travaillé. Il n’est pas rare qu’ils doivent se déplacer sur le site de l’entreprise et ainsi croiser une contamination potentielle.
  • A cela s’ajoutent les télétravailleurs : on dit que 40% des activités pourraient faire l’objet d’un travail à distance. Combien en réalité dans le cadre de cette épidémie ?

En résumé : – plus de 62 millions de français sont confinés

  • 2, 7 millions d’étudiants
  • 12 millions de scolaires
  • 17 millions de retraités
  • Les autres inactifs : 11 millions
  • les chômeurs partiels : 4 millions
  • arrets maladie Covid : ~ 4 millions
  • les télétravailleurs : ~ 8 millions
  • Les demandeurs d’emploi en catégorie A: 3,3 millions

– Prés de 5 millions sont non confinés

Combien sont-ils ? On sait que 2 salariés sur 5 du privé sont a priori confinés. Et on estime à 40% ceux qui sont en télé-travail. Alors, quand on compte à la louche, 40%+40% = 80%, on peut estimer à 20% ceux qui ne sont pas confinés à cause de leur travail soit pour une population active de 27 millions, 5 millions de salariés non confinés.

Qui sont-ils ? En théorie il s’agit de salariés travaillant dans des secteurs « essentiels ».

On pense évidemment à la Santé, à la Poste, aux pharmacies, aux commerces alimentaires, bureaux de tabac, animaleries, stations-service… Mais aussi l’agriculture, la logistique, les banques, les transports, l’énergie, les télécommunications. Beaucoup de fonctionnaires aussi sont indispensables. Sans compter les activités entre deux, par exemple les services à domicile :

Nous avons pour la maison un contrat avec une entreprise. Après une première quinzaine de fermeture totale (heureusement nous ne sommes pas dans les cas de dépendance), on nous propose de rétablir le ménage (mais pas avec Virginie qui préfère rester confinée) et la tonte de la pelouse qui commence à revenir à un état sauvage. Proposition accueillie avec soulagement. De son coté Hanna a vu sa voisine âgée décéder sans aucune aide à domicile en raison du confinement. Quel est le caractère « essentiel » des activités ? Comment en juger ? Volontariat des salariés ou obligation ?

L’autre question porte sur la protection de ces salariés. La CGT commerce a porté plainte contre Carrefour – et la ministre Muriel Pénicaud pour “atteinte involontaire à la vie” et “mise en danger de la vie d’autrui” dans le magasin de Saint-Denis, où une salariée et déléguée syndicale CGT, Aïcha Issadouene, est décédée des suites du Covid-19 le 26 mars, selon le courrier adressé à la juridiction.
La CGT fait valoir que les vitres en plexiglas protégeant les caissières n’ont été mises en place que le 20 mars dans cet établissement, que le personnel n’a pas reçu de masques et que tous les rayons sont ouverts au public, et non les seuls rayons correspondants à des achats de première nécessité.

C’est là qu’on rejoint la question de la pénurie des protections face au virus qui impacte d’abord les soignants mais aussi tous les métiers en contact avec le public, les caissières, les policiers par exemple dépourvus de masques !

Ainsi le confinement touche une large majorité de la population. Mais ceux qui continuent à travailler sont nombreux. Pas étonnant quand on considère que, sous confinement, la production tourne quand même à 65% de la normale.

Salut les confinés ! -6-

À la Une

Covid19 : les chiffres comptent !

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Chaque jour le Ministre de la santé et le directeur général de la santé rendent compte de l’évolution de l’épidémie, essayant de répondre à l’exigence de transparence que ressent la majorité des citoyens.

Du coté des médias sociaux, l’épidémie suscite de nombreuses vocations d’apprentis épidémiologistes plus ou moins inspirés.

Aujourd’hui le Clairon va essayer, en toute modestie, de porter le regard sur la manière dont sont fabriqués les différents indicateurs qui nous sont présentés.

Le nombres de cas déclarés : Il s’agit du nombre de cas diagnostiqués après un test PCR en hôpital. Un certain nombre de test dans les laboratoires médicaux en ville agréés, sur ordonnance d’un médecin commence à être disponible malgré un gros retard à l’allumage dû au manque de matériel. Chiffre officiel 40 174 cas depuis le début de l’épidémie. Tout le monde s’accorde à estimer ce chiffre très largement sous-estimé du fait du petit nombre de tests réalisés.  En réalité, sans doute 3 à 4 fois plus. La semaine dernière, pour la première fois, se rajoutent 40.000 nouveaux cas de coronavirus estimés par les généralistes en ville et remontés à Santé Publique France. En l’absence de test à la portée des généralistes, ce chiffre est incertain.

Le nombre de cas hospitalisés/ en réanimation. Ce sont les indicateurs les plus fiables, car ils sont transmis en temps réels par les établissements de santé à Santé Publique France. Au 29 mars 19 354 personnes sont hospitalisées. 4 632 cas graves nécessitent des soins très lourds en réanimation

Les décès : Il s’agit des décès déclarés en Hôpital sur des malades déclarés COVID19. Au nombre de 292 le 29 mars C’est un indicateur fiable mais incomplet. Il n’inclue pas pour l’instant les morts en EHPAD et ceux à domicile. Il permet de suivre la progression de l’épidémie et devrait nous annoncer la stabilisation tant attendue

En régime normal, avant le COVID 19, en mars 2019 p.ex, on enregistrait chaque jour 2000 décès, toutes causes confondues. Parmi ces décès, 57,5 % étaient déclarés en Hôpital ; 10,9 en maison de retraite et 26,7 % à domicile.

Donc les chiffres de l’hôpital ne reflètent qu’une grosse moitié des décès en France. Les autres sont déclarés à l’état civil des 36 000 communes de France sans indication des causes de la mort, et centralisées par l’INSEE qui s’est organisé récemment pour publier chaque jour cet indicateur https://insee.fr/fr/information/4470857

Cet indicateur permet de repérer la surmortalité due à l’épidémie. Pour l’instant la surmortalité n’a été observée qu’au niveau local (Grand Est, Ile de France)

Les décès en Ehpad ne faisaient pas l’objet d’une procédure particulière.  A partir de la semaine prochaine ils seront centralisés auprès de Santé Publique France sur la base d’une estimation (compte tenu de la pénurie de tests) des établissements sur les cas suspecté COVID19.

  • Les décès au domicile sont déclarés en mairie, toutes causes confondues. Sont transmis à l’INSEE et à l’INSERM qui en fait l’étude a posteriori. Pour l’instant les médecins qui établissent les certificats n’ont pas les moyens d’établir avec certitude la cause COVID19, vue la pénurie des tests. Ceux-ci ne sont pas inclus dans les 34 maladies à déclaration obligatoire comme la rougeole, le chikungunya, la rage … qui sont des maladies contagieuses à présence permanente.
  •  Le taux de mortalité (nombre de décèsCOVID19/nombre de cas diagnostiqués) est très différent suivants les pays : de plus de 10% en Italie, il s’établit à 0,5 % en Allemagne et 5% en France. Cela dépend essentiellement de l’avancée dans le temps de l’épidémie et surtout de la politique de dépistage : l’Allemagne va porter, d’ici fin avril, les tests à 200 000 par jour, la France à 50 000 si tout va bien.
    En chine, c’est l’heure des bilans : la mortalité se situerait à 1,4% dans la localité de Wuhan. Mais des révélations récentes suspectent une sous-déclaration des décès.

Ce qu’il faut retenir :

  • Le nombre de cas réels est largement sous-estimé, vu l’importance des cas sans symptôme. La multiplication à venir des tests permettra de mieux cerner cette population. Sans être devin, il devrait à terme dépasser le million à la sortie du confinement (surtout si on rajoute les positifs aux tests sérologiques, c’est à dire tous ceux, symptomatiques ou non, qui ont contracté le virus dans le passé récent et qui ont surmonté l’infection) .
  • Le nombre de cas en réanimation est l’indicateur stratégique pour la survie du système hospitalier
  • Le nombre des décès devrait être complété prochainement pour se rapprocher de la réalité. Pour l’instant l’indicateur actuellement disponible des décès en Hôpital permet de suivre fidèlement la progression de l’épidémie.
  • Le dépistage (test + isolement) sera absolument décisif à la sortie du confinement pour éviter un rebond de l’épidémie, tant qu’un vaccin ne sera pas disponible

A voir : Thierry Crouzet un internaute qui aime les chiffres et l’informatique a créé un modèle pour suivre l’épidémie . Son BLOG

Salut les confinés – 5-

À la Une

Vie quotidienne en confinement

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Hier Danièle est allée faire des courses alimentaires (c’était son tour). Première tentative au Leclerc le plus proche.

Et tout d’abord un bruit de fond qu’on perçoit à distance avant de s’approcher de l’entrée. Le bruit des roues du chariot sur le revêtement goudronné. Des files de chariot dès l’ouverture à 8 h 30. Des chasseurs- clients souvent masqués et munis de gants et bien déterminés à ramener leurs indispensables vivres dans leurs tanières. Danièle a préféré se rabattre sur la petite supérette du village.

Plus tard dans la matinée c’est la demi-heure de pratique physique. Danièle s’improvise professeur de Qi Qong au soleil dans le jardin. Les cerisiers commencent à fleurir .
Nora, notre fille qui partage notre habitation mais dans un logement séparé préfère pratiquer son yoga chez elle. Antonio profite de la non-école pour se lever tard.
Céline, notre locataire dans un logement séparé aussi, partage nos activités, avec distances de sécurité. Nous pratiquons le co-confinement avec précaution. On peut ainsi se retrouver pour le repas, sur la terrasse en plein air, autour d’une grande table qui respecte la distance, avec des couverts et plats séparés.

L’après-midi c’est notre promenade, nous deux avec le chien dans un rayon de 1 km autour du domicile. De jour en jour on rencontre (à distance ) les mêmes promeneurs avec les mêmes chiens.
Et hier en fin de journée, on a testé une conférence familiale sur Internet. Une manière d’avoir des nouvelles :

Mathias et Noémie rangent les cartons du déménagement de samedi dernier. Clara et Dimitri se sont lancés dans le débroussaillage et le jardinage. Ils étaient en congé mais Clara devrait reprendre le travail lundi, mais sans consigne de son employeur qui aurait fermé le siège de l’entreprise. Nora qui apprécie en général les sorties, les soirées avec les copains ronge son frein à la maison entre télétravail et télé scolarité de son fils. Antonio est parti chez son père pour voir sa petite demi-soeur qui vient d’arriver … Et puis ça nous permet de voir en direct le petit dernier qui fait des progrès tous les jours.

Comme le soulignent la plupart des internautes confinés, c’est nécessaire de se doter de nouvelles routines . Pour nous , ça ne nous a pas beaucoup changé de notre vie de retraités dans un environnement privilégié .

Ce qui n’est sans doute pas le cas de tous les confinés.Quand on pense aux familles des cités coincées dans un F4 dans une barre de HLM ou pire les SDF …

Salut les confinés ! -4-

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Prenons des nouvelles !

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

  • Hier matin, nous avons su que Filo, le petit fils allait mieux, qu’il avait bien dormi. Il reste un peu fatigué. Un soulagement même si l’on sait que les enfants ne développent pas de formes graves de la maladie (à la différence de la grippe A de 2009).
    Cela nous amène à donner des nouvelles de nos amis à travers le monde :
  • A Washington (DC- USA), Julie a démarré le confinement. (avec les normes américaines de distance sociale : 1m 80 au lieu du mètre européen):

Oui, comment se protéger, c’est la grande question vu le manque de masques et de gel. Nous sommes tous assez démunis face à l’incurie de nos divers gouvernements, certains plus que d’autres il faut le dire. Il est difficile de faire pire que chez nous.
Nous avons fait nos courses ce matin avec un masque sur le visage et des gants, on étouffe sous le masque, et on se demande si cela protège vraiment, mais c’est mieux que rien.On a eu de la chance d’en acheter deux il y a une semaine, et de trouver une boite de 100 gants chirurgicaux. il y a deux jours, payés sans doute deux à 5 fois fois le prix (25 dollars les 100?).
On essaiera de faire le moins de courses possible et de se contenter de ce que l’on a acheté. Un nouveau mode de vie moins consommateur et plus « temps de guerre ». Ici à Washington, les jeunes n’ont pas encore l’air de comprendre la distanciation sociale. J’attends les prochains chiffres de contamination avec inquiétude.Nous pouvons encore sortir nous ballader, donc on va marcher une heure chaque jour. Mais aujourd’hui, il pleut.
Ici les magasins ouvrent de 7h à 8 h pour les vieux de plus de 60 ans, ainsi on évite les foules et les magasins ne sont pas encore dévalisés. Et parait-il ont été nettoyés la veille au soir. Bref on fait comme tout le monde, on fait comme on peut. Et il faut aussi ne pas se disputer car le stress favorise les disputes. On se chamaille pas mal, mais heureusement, on se réconcilie toujours car ce n’est pas du lourd. Alors il faut s’estimer heureux d’être en couple dans ces temps difficiles.Bon courage !

  • Ebbe (Copenhague, Danmark) s’est retiré dans sa « cabane » d’un beau rouge de « fallun »au bord de la mer:

Nous ne sommes pas juridiquement confinés (encore) ici au Danemark, mais beaucoup de monde ont maintenant compris de garder la distance et de rester en famille étroite (si l’on a une famille!). Dès aujourd’hui, les groupes au-dessus de 5 personnes sont interdit à l’intérieur et bien à l’extérieur. Les restaurants et cafés sont maintenant fermés. Les grands surfaces couvert fermés aussi. La frontière entre le Danmark, la Suède et l’Allemagne est fermé depuis Samedi passé. Nous pouvons partir théoriquement en Suède parce que la frontière est ouverte pour les Danois, mais nous nous ‘abstenons’. L’économie en ligne fleurit due à la peur d’aller au supermarché. Même Dorte et moi avons fait notre premier achat de vivres en ligne.
Comme les parisiens et autre habitants des grands ville les gens qui peuvent, se déplacent dans leur maisons d’été si possible. Un électricien vient Mercredi prochain pour installer une pompe « air à air«  dans notre  «cabane » de 35 m2 sur la côte. Avec ça nous pourrons vite chauffer la maison. Il fait encore un peu froid ici avec 6-10 degrés. Je pense que notre gouvernement a pris conscience du développement en Italie, et il a pris des mesures très vite pour retarder et prolonger la propagation de l’épidémie. 
Bon, je vais terminer ici, ma fille Katrine a appelé. Elle fermera probablement ses trois magasins vintage bientôt. et elle est en train de monter un magasin en ligne pour compenser la perte de revenu

  • Gesine, mon ex-belle soeur nous écrit du nord de Berlin :
    Nous aussi sommes confinés. Heureusement nous habitons maintenant dans une petite ville à la campagne et non plus à Berlin. Dans notre petite ville c’est comme chez vous. Tout est fermé, sauf les grands supermarchés. Nous restons à la maison, mais on peut encore aller en Ville et aller se promener en vélo dans la nature. Pour l’instant il n’y a personne de malade dans notre ville. Nous vous souhaitons une bonne santé.

Et maintenant la courbe du jour :

En matière de mortalité les courbes espagnoles et italiennes n’indiquent guère de ralentissement. La courbe britannique s’est cependant nettement infléchie ces derniers jours. L’Allemagne et les Etats Unis suivent toujours très fidèlement la France avec quelques jours de retard. On reviendra plus tard sur cette comptabilité macabre – les chiffres sont -ils justes ? Quelles sont les incertitudes ?

Alors, à un prochain épisode. Nous avons du temps pour nous. RESTONS CHEZ NOUS!

Salut les confinés -3-

À la Une

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Bas les masques !

On a eu la nouvelle hier, Filo, notre petit fils qui vit à Vincennes avec sa mère est sans doute atteint : fièvre, toux, fatigue les symptômes suggèrent au médecin un COVID19. « Suggèrent … » Pas moyen d’en savoir plus, car les tests ne sont pas accessibles pour ceux qui peuvent rester chez eux. Alors, sa mère qui partage son confinement est -elle contaminée ou sera-telle contaminée ? Impossible à savoir. Sans doute, dit le médecin.

La mère et le petit rentrent donc chez eux, croisent sans doute de nombreux passants dans la rue ou dans le métro. Sans protection.  Eh oui ! Aucun masque disponible ! Pareil pour le gel hydroalcoolique. Y a-t-il un dispositif de surveillance particulier des contaminés ? Un suivi par téléphone ? Un confinement renforcé avec livraison des courses ? Eh non !

Pendant ce temps les autorités essayent de faire honte au gens qui vont faire un jogging à coté dans le bois de Vincennes en respectant les distances de sécurité, et les surveillent avec des drones policiers. Où sont les insouciants ?

Une partie de la population néglige les règles de confinement, c’est sans doute vrai. Mais on peut penser qu’elle serait mieux disposée si les autorités mettaient en œuvre toutes les précautions nécessaires.

Alors, impréparation des autorités ?

Cette histoire de masque revient sans cesse : pas assez pour les soignants, pas assez pour les caissières de supermarché, pas assez pour les simples citoyens qui commencent à tousser. Après avoir évoqué pendant des semaines de simple problèmes de logistique pour distribuer les stocks d’état, on a fini par se rendre compte qu’il n’y avait pas de stock stratégique, rien, nada (à part 120 millions de masques chirurgicaux qui ne peuvent pas protéger les soignants à la différence du FFP2 introuvable). Alors, pour évacuer les responsabilités  on évoque le marché noir , les saisies policières dans des parapharmacies tenues par des chinois, on fait appel aux dons,  etc.

Pour la première fois Olivier Véran a reconnu la situation réelle : tout en déportant la responsabilité sur son prédécesseur en 2012 Marisol Touraine qui avait détricoté la notion de stock d’état. Il revenait dès lors à chaque institution de faire ses réserves stratégiques en masques, vêtements de protection, gel etc. C’est dire qu’avec les problèmes de financement, les hôpitaux ont vite oublié les stocks de précaution. L’idée derrière c’est que quand on en a besoin, il suffit de s’en procurer sur le marché et notamment auprès de l’industrie chinoise, bien moins chère. On oubliait ainsi qu‘en cas d’épidémie la planète entière recherche les mêmes produits : il n’y a plus de marché.  

Il faut dire qu’un mauvais souvenir a sans doute pollué la question : La grippe A ou grippe porcine ou grippe mexicaine – H1N1 en 2009.

Dès le printemps 2009, un nouveau et méchant virus grippal était apparu au Mexique. L’OMS l’avait rapidement qualifié d’hautement dangereux puis déclaré comme PANDEMIE.

Tous les états avaient donc anticipé l’arrivée de l’épidémie pour l’automne et l’hiver prochain. En France Roselyne Bachelot, ministre de la Santé de Sarkosy, avait mis le paquet : 94 millions de doses de vaccin, 30 millions de Tamiflu (un antiviral qui s’est révélé finalement inefficace) et un milliard de masque chirurgicaux et 700 millions de FFP2. On a parlé d’un plan de 1,7 milliards d’€. Le public avait réagi mollement aux invitations à se faire vacciner. Danièle et moi, nous avions fait la queue dans un gymnase, par civisme comme un peu moins de 6 millions de français.  Et surtout le virus s’est révélé faiblard, même pas au niveau de la grippe saisonnière. Bref un fiasco, une casserole que Bachelot a traînée longtemps, contrariant ainsi ses ambitions politiques.

Alors cet épisode de la grippe a sans doute définitivement découragé les responsables politiques à se préparer à une pandémie.

Mais cela n’aurait pas dû les dispenser d’être réactifs. Courant janvier les données de l’épidémie du coronavirus étaient sur la table, les chinois avaient joué la transparence , après un léger retard à l’allumage bureaucratique. Or ce n’est que fin février que les masques ont été commandés : plus de disponibilités sur le marché international, on s’est tourné vers des industriels français dont peu avait survécu à l’atonie de la demande.

En Bretagne, Honeywel avait délocalisé sa production en Tunisie :

Les chinois qui voient le péril reculer et leur demande de masque fléchir, s’offrent désormais le rôle du bon samaritain en fournissant les équipements tant désirés aux européens. C’est sans doute auprès d’aux que Véran a passé sa commande de 250 millions d’unités.

Et ne parlons pas des tests. Dès le début mars la Corée du Sud était en capacité de pratiquer 20 000 tests par jour quand en France nous étions à 1000/ jour (qui a été porté à 8000/jour récemment). Et les résultats sont là : une croissance de l’épidémie largement contenue.

Alors, on ne va pas tirer sur l’ambulance. Au stade où nous en sommes, les occasions ont été ratées. Nous n’avons plus le choix : restons chez nous !  pour essayer de soulager le système de santé et les soignants en première ligne.

Salut les confinés ! – 2-

À la Une

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Chaque matin la presse est épluchée sur le net. Inutile de dire le sujet de mes recherches. Les infos qui nous parviennent interrogent la gestion de la crise par le gouvernement :

  • L’étude des épidémiologiste anglais (Neil Ferguson -Imperial College, Londres – voir cet article du Monde) met en perspective l’épidémie : progression exponentielle, pas de repli véritable du virus tant qu’une part importante de la population (60 à 70 % de la population) n’aura pas été contaminée et n’aura développé ainsi son immunité (« immunité collective ») .
  • Ensuite plusieurs scénarios sont envisagés pour freiner la progression de la maladie. Un chiffre choc : si rien n’est fait, en 2020, 510 000 morts au Royaume-uni en 4 mois(à droite ci-contre les projections pour GB et USA).
  • Les confidences d’Agnès Buzyn dans la presse : En tant que médecin au fait de l’actualité de la Chine, elle aurait prévenu le gouvernement dès janvier de la gravité de l’épidémie. On aurait pu espérer qu’elle remue ciel et terre pour donner l’alerte. Elle a préféré se prêter à une « mascarade » – ce sont ses termes-, à quitter son poste de ministre de la Santé, à se présenter à une élection qui auraient dû être reportée et supporter une défaite peu glorieuse. Edouard Philippe n’a pas démenti, arguant que les scientifiques n’étaient pas tous d’accord sur le sujet.
  • Un collectif de médecins porte plainte contre le premier ministre et le ministre de la santé pour n’avoir pas agi à temps pour endiguer l’épidémie de Covid-19 en France. Il leur reproche de s’être abstenus « volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant […] de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes »,

Au bout du compte, beaucoup de temps a été perdu, avant qu’on commande la fabrication des masques auprès des rares entreprises françaises qui en avait gardé la capacité, avant d’envisager la fermeture des écoles, puis des commerces et lieux publics, puis de déclarer le confinement.

Comment l’expliquer ? Comment expliquer que des responsables politiques bien informés, que des scientifiques compétents aient pu hésiter, aient pu reporter le moment des décisions alors que les données de l’épidémie étaient sur la table.

A mon sens il s’agit d’une méconnaissance profonde (ou un déni tacticien ?) de ce qu’est une progression en matière d’épidémie.

Chaque jour, les autorités ont rendu publics les chiffres de l’épidémie, le nombre de décès, le nombre de cas supplémentaires depuis la veille, mais un autre chiffre -stratégique, lui- restait dans l’ombre : tous les 3 jours le nombre de cas double ! C’est ce qu’on appelle une progression géométrique (et non pas arithmétique). Illustrons les deux termes :

-Progression arithmétique : A partir de 1000 cas au jour J, la progression est, par exemple de 500 cas par jour. A J+1 on en est à 1500 cas, à J+2 on en est à 2000 ; au Jour J+9 on en est à 5000 cas. A J +12 on en est à 6500 cas

-Progression géométrique (ou exponentielle) : A partir de 1000 cas au jour J, le nombre de cas double tous les 3 jours. A J+3 on en est à 2000, à J+6 on est à 4000, à J+9 on en est à 8000. A J +12 on en est à 16000cas !

Au fur et à mesure de l’avancée dans le temps, l’écart entre deux progressions s’agrandit, devient monstrueux. Tout s’est passé comme si nos responsables ne connaissaient que l’arithmétique Et puis en cas de doute il suffisait de regarder les chiffres de l’Italie qui avait juste 8-9 jours d’avance sur nous.

Du coup nous nous sommes tournés vers l’exemple chinois en l’édulcorant puisque nos mœurs politiques et sociétales ne peuvent être comparés.

Ça donne la quarantaine en conservant une bonne partie des transports, ça donne le confinement mais sans comité de quartier du parti communiste pour contrôler, ça donne les autorisations de sortie papier versus le trackage numérique de tous les déplacements des confinés et surtout la géolocalisation de tous les malades testés positifs à travers Baï Du, le google chinois …

Du coup, on a négligé d’autres exemples :

-la Corée du Sud qui a mis en place un dispositif massif de tests : 10 000 par jour (au moment où on en pratiquait 1000 en France) et un suivi numérique et physique de tous les infectés. Résultat : une épidémie contenue assez tôt

-Taïwan et Singapour se sont appuyés énormément sur le numérique et des mesures de confinement très ciblées

Ces deux exemples démontrent leur efficacité avec un endiguement efficace de la maladie. Il faut dire que les populations ont encore en tête le SRAS de 2003 qui les avaient durement frappées (à la différence de la France largement épargnée).

Ces méthodes n’étaient pas applicables en France pour des raisons culturelles (rejet d’un état policier…) mais aussi de moyens techniques : la pénurie de masques, la faible disponibilité des tests, la faible réactivité sur le numérique…

Danièle, mon épouse qui partage mon confinement, tient un journal régulier dans lesmotsjustes

Salut les confinés !

À la Une

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion ?

C’était mardi après-midi, notre première sortie sous le régime du confinement, munis chacun de notre attestation cochée au dernier alinéa:

  • > déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l’activité physique individuelle
    des personnes, à l’exclusion de toute pratique sportive collective, et aux besoins
    des animaux de compagnie.

Et notre chien en guise de laisser-passer

Un petit tour dans les vergers, retour par le chemin de la Clôtre. Pas un chat dans les rues. Ça contraste avec le mardi matin où chacun avait tenu à profiter du beau temps avant le début officiel du confinement. On a le sentiment que la météo nous fait le cadeau d’un passage ensoleillé prolongé pour nous consoler de cette situation un peu angoissante.
Voici 3 jours que nous nous interrogeons sur les précautions à prendre. Pas question de céder à la panique. La crise risque de durer. A Wuhan, ils en sont à 8 semaines de confinement sévère et ce n’est pas fini. Chez nous le virus n’est pas présent partout mais dans 15 jours il sera sans doute dans notre environnement immédiat.

Les vieux n’ont pas plus de risque de contracter la maladie. En  revanche les conséquences peuvent être plus graves que pour les plus  jeunes. La fragilité respiratoire (les bronchites à répétition) augmente la gravité.
 -Les grandes réunions familiales (genre anniversaires) il faut les reporter .
 -Les repas hebdomadaires (la « cantine » du mercredi ) il faut les annuler.
-Les visites aux personnes vulnérables on peut peut-être les garder avec des précautions?
 Nous avons décidé le garder le contact avec Antonio (à distance de sécurité) qui habite avec sa mère dans l’autre partie de la maison, même si ce n’est pas recommandé pour les vieux que nous sommes.
 Un moment nous avons eu l’idée de partir quelques jours en camping-car ; c’est une forme de confinement plutôt agréable. Mais les restrictions de circulation ont tué dans l’œuf notre projet.
Ce sont là des réflexions de retraités. Je pense aux jeunes qui nous entourent qui continuent d’aller au travail (lorsque l’entreprise le juge indispensable), de s’occuper des enfants, de faire leurs courses etc… Pas facile
 

Jeudi matin : le frigo est vide après une semaine de restrictions, il est temps d’aller faire les courses au Leclerc le plus proche (5km). Des amis m’ont prévenu; samedi, lundi, encore mardi c’était de la folie : parking plein à craquer, files d’attente monstres, rayons dévalisés. La panique , la peur que les commerces soient totalement fermés avaient poussé des hordes de consommateurs vers les commerces alimentaires.

Or aujourd’hui, rien de tel. Les rayons ont été réapprovisionnés sauf la farine, les pâtes, et les conserves. Les clients pas trop nombreux circulent entre les allées dans le calme. Avec quelques aménagement pour protéger les employés : panneaux de plexiglas devant les caissières, cordon de distance devant les balances des fruits et légumes. Au rayon alimentation animale je croise une cliente ravie devant les étals regarnis : Samedi il n’y avait plus rien – le désert !

Nous profitons donc de ces instants de liberté. il paraît que certains en abusent, en profitent pour faire des rassemblements interdits . A Collioure, Marc, le frère de Danièle réfugié dans le sud, nous informe que l’accès des plages a été interdit par la préfecture : on se serait cru face à l’affluence habituelle d’un week-end ensoleillé de printemps. En Italie le gouvernement réfléchit à des restrictions nouvelles : réduction des horaires d’ouvertures des commerces, interdiction de toute activité sportive ou physique à l’extérieur.

Nos amis de Venise s’inquiètent devant ce qu’ils perçoivent comme de la désinvolture des français face à un danger qu’ils sous-estiment : L’appel de Venise . Et rappellent qu’on a juste une grosse semaine de retard sur notre voisin.

Vassivière : un lac entre îles et presqu’îles

À la Une

A La fin d’un été sédentaire, à fuir la chaleur au bord de la piscine ou sur notre chantier de climatisation, nous voici partis pour Vassivière, un lac artificiel entre Creuse et Limousin, à la réputation établie de fraîcheur et de plaisirs aquatiques. Nous avons d’abord fait halte sur le plateau de millevaches où il y a plus de forêt et d’étangs que de vaches.

A st Merd les Oussines, après un tour à l’étang (ci-dessus) nous avons découvert les vestiges d’une villa et d’un sanctuaire gallo-romain. Les bourgeois gallo-romains s’étaient construit une belle villa, avec piscine, eau chaude et grande cuve, avec vue sur un plan d’eau, et sur la Vienne naissante. Etonnant, dans cette région reculée, loin des grandes routes de l’antiquité.

A Tarnac nous avons fait nos courses au Magasin Général, l’épicerie-restaurant alternative, toujours tenue -pour la plupart-par les historiques du « groupe de Tarnac. Un lieu d’approvisionnement et de rencontre dans ce village important qui avait failli perdre son seul commerce d’alimentation.

On trouve tout ce qu’il nous faut pour remplir nos soutes et notre frigo. Comme chaque matin, de vieilles estivantes se donnent rendez-vous devant un café avec leurs petits-enfants.

Deux belles aires de camping car (gratuite à St Merd) Payante à Tarnac. L’employé municipal est charmant et parle simplement de l’affaire de Tarnac qui a divisé le village dont le châtelain est le patron de l’hebdomadaire – très à droite- Valeurs Actuelles. Un grand écart pour cette commune qui a élu une maire Front de Gauche !

Le lac de Vassivière est immense et accessible en quatre points seulement Auphelle et Pierrefite (commercial et bruyant), Broussas (où nous nous sommes installés) et Mas Grangeas (reculé).

Des bâteaux navettes permettent de rejoindre les différentes presqu’iles. l’île est accessible par un pont à partir de Pierrefite.

Calme de fin de saison, eaux basses pour maintenir les cours d’eau en aval et…alimenter le refroidissement de la centrale nucléaire de Civeaux ! Danièle s’éprend de ses paysages à la tombée de la nuit

Coucher de soleil en face de la presqu’île de Broussas

Passereaux dans les arbres, baignade en eau trouble sur des plages d’arène granitique.

Petite déception sur l’île où nous avons du mal à comprendre les démarches des artistes du Centre International d’Art et du Paysage. Parcours à la recherche des sculptures dans la forêt et au bord de l’eau.

le Centre International d’Art et du Paysage et son « phare »

Masgrangeas et son village-vacances en partie abandonné vendu à la découpe.

Les vestiges d’un gigantesque village-vacance qui accueillait un grand camping , des locaux communs (à gauche les restes du restaurant), des commerces (demeure aujourd’hui un bistro, boutique multi-services) et une centaine de logements de vacances vendus alors à des particuliers Des maisons à vendre, d’autres à louer et des propriétaires qui s’accrochent après avoir passé deux ans à tout remettre en état (34 m2 par logement) . Le camping sous les arbres au bord d’une plage de sable fin est à vendre depuis 15 ans

Mais nous devons faire le plein, le plein d’eau, de gaz, de vivres. Rien de cela aux abords immédiats du lac. Il faut pousser six kilomètres dans les terres au Nord : Royère de Vassivière, petit bourg animé et alternatif, Vival, le boucher, le café du coin, l’atelier. La bâtisse centrale sur la place a été reprise par des jeunes tendance alternatifs : L’Atelier : café, restaurant, boutique, lieu d’expos , de concerts. Un vrai lieu de vie pour ce petit village !

Un peu plus loin, le lac de La Vaud-Gélade alimente en amont celui de Vassivière. Une aire naturelle au détour de la route nous amène dans un bois clair tout au bord d’une presqu’île

Nous sommes seuls avec les pêcheurs, il pleut, l’employée municipale passe néanmoins collecter son dû. Le matin ramène le soleil qui peine à disperser les nappes de brumes sur l’étendue d’eau.

Sur le chemin du retour , nous faisons un crochet par la vallée de la Sioule, profonde et encaissée, sur ce plateau des Combrailles, à l’ouest de Clermont-Ferrand . Un snack bar à vendre, un village vacances immense et peu fréquenté, des terrains de tennis à l’abandon comme la piscine, un camping vide et des pêcheurs. Un spectacle de fin de saison ! Il est temps de rentrer

Une agriculture sans agriculteurs *

Voici plus de 50 ans, un livre nous annonçait « La Fin des paysans ». Quand l’ouvrage sort, en 1967, le constat dressé par Henri Mendras fait l’effet d’une bombe :

le sociologue y prédit rien de moins que la disparition de la civilisation paysanne et son remplacement par une autre, technicienne. « C’est le dernier combat de la société industrielle contre le dernier carré de la civilisation traditionnelle », prévient-il en introduction.

Que s’est-il passé depuis ? Si tout le monde s’accorde sur la place décroissante des agriculteurs dans l’économie, la société et la vie politique de notre pays, le modèle et la réalité de l’exploitation « familiale » comme base essentielle de la production agricole n’a pas vraiment été contesté. De tous les bords , de la FNSEA qui a tout intérêt à maintenir cette fiction, de la Confédération Paysanne qui milite pour le maintien et le développement d’une agriculture paysanne, de la classe politique dans son ensemble, on feint de ne pas voir une évolution qui modifie profondément les conditions de la production agricole. Pourtant comment ne pas voir ce vrai chambardement ?

Les agriculteurs : de moins en moins nombreux !

1 587 600 en 1970 ; 389 000 en 2020 : un nombre d’exploitations divisé par quatre en cinquante ans. Et ce n’est pas fini : 342 000 attendus en 2025. Premières victimes les exploitations d’élevage et généralement les petites fermes. Les chiffres ne surprennent pas, tant la tendance est connue et vérifiée sur plusieurs décennies

La part des agriculteurs exploitants dans l’emploi total ne représente en 2021 que 1,5% contre 7 ,1 % il y a quarante ans.

Les terres délaissées sont d’abord vendues aux voisins qui s’agrandissent, entraînant l’augmentation des surfaces moyennes. Entre 1970 et 2020 la superficie moyenne a augmenté de 50 ha .elle est actuellement de 69 ha (comparable à l’ Allemagne , mais 2,5 supérieur à l’Espagne, 3 fois à l’Italie). Cette croissance en taille profite aux moyennes et aux grandes exploitations.

De la ferme à la firme …

Cultiver la terre en famille est une figure maintenant largement minoritaire. Le temps est loin où le couple partageait la même activité agricole (aujourd’hui 80% des conjoints n’ont pas d’activité sur l’exploitation), où le grand-père à la retraite donnait la main aux travaux des champs et où au moins un des fils avait le statut d’ « aidant familial » .

L’agriculture « familiale » se réduit maintenant à un chef d’exploitation travaillant souvent seul (42% des exploitations en France) ou avec des salariés et associés non familiaux. Les exploitations authentiquement « familiales » ne représentent plus que 30% des exploitations et 28% de la production agricole française.

Reste la propriété foncière comme caractéristique familiale. La terre s’acquiert encore essentiellement par l’héritage. Au moment des successions, les frères et sœurs ne se satisfont plus comme jadis de l’indivision, ou de soultes au long cours lorsque le frère resté à la ferme tentait difficilement de dériver une partie des revenus vers les collatéraux. D’où le succès des outils financiers : Groupement foncier agricole GFA, société civile d’exploitation agricole SCEA, ou même société anonyme SA, SARL. Les collatéraux se comportent de plus en plus comme des investisseurs, pouvant valoriser ou même vendre leurs parts, ou exploiter via un prestataire, plutôt que de conclure des baux avec un fermier trop protégé à leur goût.

L’agriculteur désormais seul à organiser la production ne peut lui-même tout faire et maîtriser toutes les opérations.

D’où une explosion de la sous-traitance, du recours à des firmes spécialisées dans les travaux agricoles et même le conseil à la conduite de l’exploitation, sans parler de l’intervention d’acteurs en amont (coopératives, fournisseurs), ou en aval (coopératives aussi et distributeurs, labels …)

L’agriculture familiale est un modèle qui n’a plus vraiment de réalité sauf dans des secteurs particuliers : produits régionaux de qualité, élevage de montagne, petit maraîchage/horticulture, agriculture bio, qui se maintiennent et se développent à coté de ce grand chambardement.

 Comment peut-on promouvoir un modèle d’agriculture paysanne et à quelle condition ? Telle est la question urgente qui se pose à tous ceux qui se sentent concernés par la production de notre alimentation.

*J’ai repris le titre d’un livre excellent : Une agriculture sans agriculteurs de François Purseigle et Bertrand Hervieu éditions Sciences Po

Identité : Au singulier ou au pluriel ?

J’ai du mal avec ce terme qui envahit tous nos espaces : Identité visuelle, littéraire, politique, sociologique, nationale, raciale, sexuelle, genrée…

Quand j’étais gamin, au moment où on rentre au collège, au moment où on découvre le monde et la société dans laquelle on va évoluer, en matière d’identité, je ne connaissais que la carte d’identité, un document qui désigne et atteste la singularité d’un individu, et puis en mathématique les « identités remarquables » où les deux termes de chaque côté du signe = ont même valeur. Il n’était pas question que l’identité désigne l’appartenance à : un groupe, une nation, un genre ou que sais-je encore. Cette polysémie du terme est récente, elle fait florès dans tous les domaines. Cela mérite de s’y attarder.

L’identité c’est d’abord ce qui me désigne, moi, comme entité singulière, unique.

Dans la plupart des pays développés, chacun se voit associé à un numéro national d’identification qui certifie, avec la carte d’identité, que je suis bien moi.

Et la malveillance n’est jamais loin :  il peut arriver qu’on se fasse passer pour moi. Et cela peut m’attirer bien des ennuis. La loi réprime sévèrement l’usurpation d’identité  : Elle peut constituer un délit pénal, pouvant être sanctionné de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende, comme le précise l’article 434-23 du Code pénal. Avec internet l’usurpation d’identité peut devenir massive. 

Mais cette nécessité de prouver son identité touche aussi les objets, dès le moment où ils sont uniques. Ainsi toute œuvre d’art précieuse n’est rien sans son certificat d’authenticité. Et le processus s’invite aussi dans le domaine de la création numérique (NFT) et dans les actifs financiers :

ainsi les cryptomonnaies : Bit Coin et autres Ethereum n’auraient pas vu le jour sans le processus de certification numérique : la blockchain.  

Je citais plus haut les identités remarquables. C’est aussi dans la vie : Madeleine et Marie -Jo mes copines d’enfance étaient des vraies jumelles, j’avais du mal à les distinguer. Elles étaient identiques, presque totalement. Leur ADN est le même, ce qui complique sérieusement certaines affaires criminelles impliquant des jumeaux. En avançant en âge elles avaient pris chacune leur personnalité et les années avaient marqué différemment leurs traits. Elles étaient bien deux personnes distinctes.

Mais tous les jours, nous rencontrons des identités plus vagues, comme ces pêcheurs que j’ai croisés au cours de ma promenade le long de la rivière.

Peu m’importe de savoir s’il s’agit de Pierre, Paul ou Jacques : ce sont à mes yeux des pêcheurs qui ont en commun une caractéristique : celle de passer des heures à surveiller distraitement le bouchon qui danse sur l’eau. Une catégorie, mais qui ne livre pas la nature de chacun d’entre eux, son essence. C’est leur identité du moment, face à mon regard qui ne cherche pas à en savoir plus.

Les choses se compliquent lorsque la catégorie tend à résumer une personne ou un groupe, qu’elle tend à constituer l’essence même des individus. Je ne sais pas si Willy Schraen, le président des fédérations de chasseurs est un cinéphile passionné, un bon père de famille ou s’il est collectionneur de timbre. Quand il parle à la télévision, c’est un chasseur, c’est le chasseur, celui qui représente tous les chasseurs, l’essence même du Chasseur.

Et lorsqu’il appelle à une manifestation pour défendre la chasse, ceux qui y répondent se rassemblent pour défendre leur identité de chasseur. C’est donc un mouvement d’appartenance qui les motivent. C’est là qu’on trouve le ressort puissant qui met dans nos sociétés modernes l’identité en tête de bien des opinions et des mouvements et son besoin jamais satisfait de reconnaissance.

Ce sentiment d’appartenance, qui est d’autant plus fort qu’il est porté par une minorité qui se sent en danger, remise en cause, ne résume pas la totalité de l’individu. On peut être chasseur et militant de gauche, ou même écologiste sincère (pas seulement de façade comme l’expose le discours « vert » des chasseurs). L’individu n’est pas obligé de respecter la cohérence, il porte en lui ses contradictions. Il peut héberger plusieurs identités.

Les identités sont désormais en question sur tous les terrains. Le gamin que j’étais, ne songeait pas à se définir comme mâle, blanc et hétérosexuel, français issu d’une classe (relativement) aisée. Insouciant de ces enjeux devenus maintenant envahissants, il ne se doutait pas qu’un enfant, puis un adolescent se verrait un jour sommé par ses camarades, son entourage, de se définir dans son genre, son orientation sexuelle, sa nationalité, sa couleur de peau. Preuve d’une interrogation existencielle, une étude récente au sein d’une dizaine de lycées de Pittsburgh a révélé une incertitude croissante en matière d’identité sexuelle : 10% des élèves se déclaraient transgenres ou non binaires ou de genre incertain

Dans certains cas, la découverte de son (ses) identité(s) est une occasion de prendre conscience des discriminations, des injustices subies et de les affronter. Le mouvement LGBT+, le mouvement Black Lives Matter, le féminisme militant, en sont l’illustration avec bien d’autres

En revanche il existe des courants qui mettent en avant une identité unique, particulièrement à droite, plutôt à l’extrême droite, une identité qui surplombe tout : la nation, la race … Ces groupes se désignent eux-mêmes comme identitaires et en sont fiers. L’identité joue en l’occurrence le rôle d’un poison qui intoxique nos sociétés et visent à détruire le vivre ensemble.

Alors, laissez-nous un peu respirer, tenons à distance ces identités qui nous enferment !

Prix Nobel : qui est Annie Ernaux ?

Je ne suis pas un grand lecteur mais j’ai toujours eu de l’attention pour les romans d’Annie Ernaux : Les années , évidemment, Passion simple , et  Mémoires de filles .  Une bien petite partie de son « œuvre ».

Et c ‘est toujours avec intérêt et plaisir que j’ai retrouvé ses récits , toujours inspirés de sa vie. Tout le monde souligne à juste titre la qualité de l’écriture, son souci de précision, son honnêteté, une honnêteté rare dans ce domaine de l’autobiographie qui est souvent l’occasion de se donner le beau rôle.

Faut-il  d’ailleurs parler d’autobiographie quand l’auteur s’interdit souvent de parler à la première personne du singulier?  Dans les années on lit plutôt le nous, les on , dans Mémoires de Fille c’est plutôt La fille  ou elle qui est nommée, que l’auteure examine avec détachement  sur une photo d’époque. Si l’auteure renoue avec le je dans Passion simple c’est plutôt pour s‘attribuer un rôle d’observatrice, qui respecte une distance considérable avec elle-même.

Lorsqu’on fait de sa biographie la matière de son œuvre, il faut bien se soumettre au regard public et interroger les rapports de Annie Ernaux auteure littéraire avec Annie Ernaux, la vraie personne, sa réalité sociale. L’actualité nous donne l’occasion de recenser les images qui courent dans les médias, plus ou moins déformées, plus ou moins suscitées par Ernaux elle-même. Essayons d’en faire le tour et d’en évaluer la portée :

« Annie Ernaux est une transfuge de classe. »

Annie Duchesne est née le 1er septembre 1940 à Lillebonne (Seine-Maritime). Elle passe son enfance et sa jeunesse à Yvetot en Normandie. Née dans un milieu social modeste, de parents qui étaient parvenus à s’extraire de leur milieu ouvrier, devenus petits commerçants qui possédaient un café épicerie, Annie Ernaux fait ses études à l’université de Rouen puis de Bordeaux. Mais c’est à l’âge du lycée qu’elle est percutée par les différences sociales, lorsqu’elle se retrouve au pensionnat Saint-Michel avec les jeunes filles de la bonne société de Rouen, à mille lieues de l’épicerie d’Yvetot.

La petite bourgeoise, bien modeste, se frotte pour la première fois à la grande bourgeoisie provinciale. Après le bac, elle délaissera une carrière d’institutrice de campagne avec sa démission de l’école normale d’instituteur de Rouen. Elle n’est pas douée pour faire la classe, elle ne se sent pas la vocation

Il s’agit là du récit d’une ascension sociale pas toujours facile, confrontée au mépris des classes dominantes, suscitant parfois de la honte chez l’auteur.

De là à tresser une légende qu’elle a en partie alimentée, de « transfuge de classe » qui se serait arrachée au petit prolétariat ouvrier d’Yvetot grâce à sa  qualité de « bonne élève » et ses succès académiques qui la conduisent à l’agrégation de lettres et au professorat, il y a peut-être une précaution à respecter avec la réalité sociologique, n’est pas Didier Eribon ou  Edouard Louis *  qui veut.

« Annie Ernaux est une féministe »

En choisissant de parler de sa vie de jeune fille , de jeune femme, sans crainte d’évoquer son initiation sexuelle dans un contexte humiliant ( Mémoire de fille) ou son avortement dans la clandestinité (L’évènement), Annie Ernaux a su mettre en lumière des épisodes difficiles qui attendaient beaucoup de femmes de sa génération, une génération d’avant 1968 et ses remises en question. A cette époque, l’auteure était déjà installée dans la vie, un métier, un mari , deux enfants … La vie rangée est progressivement remise au placard, ce qui l’amènera sans doute à l’écriture avec son premier roman Les armoires vides en 1974. Elle reprendra cette évolution vers plus de liberté  dans Les années  (2008).

Annie Ernaux , c’est le thème d’une femme dans ses bonheurs et malheurs dans une société dominée par les hommes, écrit à la première personne. Pas de doute, ces sujets parlent à la plupart de ses lectrices. Mais est-ce pour autant une auteure féministe ?

Ce n’est sans doute pas à moi, mâle hétérosexuel, d’en juger.

Mais je dois dire que j’ai été choqué du récit de Passion simple où la narratrice raconte une liaison torride avec ce jeune étranger « qui aimait les costumes Saint-Laurent, les cravates Cerruti  et les grosses voitures » (on n’en saura guère plus). Pendant ces longs mois d’une passion totale, la narratrice ne fera rien d’autre que l’aimer et l’attendre pendant ses longues absences. Rien d’autre n’occupera son esprit. N’est-ce pas un exemple d’emprise qui ne peut s’établir que dans un rapport de domination ?  La servitude est-elle plus belle lorsqu’elle est volontaire ? Ce récit d’un consentement total à la soumission est-il envisageable pour une féministe à l’heure de #MeTo ?

« Annie Ernaux est une révoltée »

Il s’agit là d’une constante dans l’évolution de l’auteur, estimant que ses origines sociales (l’épicerie d’Yvetot ) la désignent naturellement comme un des porte-drapeaux de la gauche de la gauche .

C’est de notoriété publique que l’auteure s’est engagée publiquement à de nombreuses reprises, signant en mai 2019 une tribune proclamant « Les gilets jaunes, c’est nous ! », jusqu’à sa désignation au parlement de l’Union Populaire, éphémère création dans le cadre de la campagne de Jean-Luc Mélenchon. « Les rêves n’existent pas au passé. Je suis toujours révoltée. Je ne peux pas me taire » dira-t elle.

C’est une constance qui l’honore, qu’on partage ou non son attrait pour les insoumis. Mais quelle légitimité pour parler au nom des déshérités, soixante ans après avoir quitté son milieu populaire d’origine ?

A l ‘annonce de son prix Nobel, Mélenchon « pleure de bonheur » (sic) sur son compte Twitter…

*Didier Eribon (Retour à Reims) , Edouard Louis  (Pour en finir avec Eddy Belle Gueule ) ont tous les deux publié des succès de librairie qui rapportent leur jeunesse et leur sortie d’un milieu ouvrier très pauvre  grâce aux études .